Après avoir notamment dressé la liste des objectifs qu’il s’est fixé pour son second mandat à la tête de la CNCG, Benoist Lombard revient sur la digitalisation du métier de conseiller en gestion de patrimoine qu’il veut encadrer et sur l’émergence d’une nouvelle concurrence. Seconde partie de notre entretien.

Décideurs. Vous avez affirmé votre volonté de conforter l’exercice de votre profession en aidant les cabinets de gestion de patrimoine à faire face aux très importantes contraintes réglementaires.

Benoist. Lombard. Nous avons œuvré dans ce sens en mettant à disposition de nos adhérents des kits d’outils. Notamment, des procédures ont été mises en place afin que les cabinets qui subissent l’absence du dirigeant unique suite à son décès ou à une incapacité de gérer (accident grave) puissent perdurer. L’objectif est ici d’assurer la continuité des prestations délivrées aux clients ainsi que celle de l’entité adhérente. Comment se matérialise ce suivi ? La Chambre peut assister la famille dans la recherche d’un gérant temporaire en collaboration avec le président de région. Le « Kit de pérennité » à disposition des adhérents comporte des modèles de documents validés juridiquement afin de permettre d’anticiper les situations d’urgence visées. Par ailleurs, un « Kit jeune installé » encourage les nouveaux talents à nous rejoindre. Cet accompagnement s’effectue en donnant la faculté aux nouveaux CGP d’être conseillés par des professionnels expérimentés, des « sages » en quelque sorte, présents dans chaque région. Enfin, bien évidemment, la CNCGP est la seule association de CIF à mettre à disposition de ses adhérents un « Kit réglementaire » exclusif composé de 53 documents réglementaires couvrant l’intégralité de ses activités plurielles.

 

Décideurs. Vous souhaitez également favoriser la digitalisation de votre activité. Sur ce segment, vous devez cependant faire face à l’émergence d’une nouvelle concurrence avec laquelle vous ne partez pas toujours sur un pied d’égalité.

B. L. Nous souhaitons encourager la Fintech dite « régulée », c’est-à-dire celle qui respecte les obligations réglementaires. Nous avons déjà échangé avec l'association des professionnels du crowdfunding, Financement Participatif France (FPF), pour qu’émergent les statuts d’intermédiaires en financement participatif (IFP) et de conseils en  investissement participatif (CIP). Nous participons également à l’évolution du cadre fiscal qui régit ces nouveaux outils d’investissement. C’est ainsi que l’imputation des pertes suite au défaut de remboursement d’obligations émises par une société privée est depuis la loi de finance pour 2016 autorisée. Cette préconisation avait été soumise par la CNCGP à FPF dans le cadre du Livre Blanc remis au Premier ministre en 2015.

 

Décideurs. Pourquoi avoir tant critiqué certains « robo-advisors » ?

B. L. Je  me suis effectivement élevé contre ceux qui exercent leur activité en tant que Conseiller en investissements financiers. Il est en effet illusoire de penser que l’on puisse délivrer des prestations de CIF sans jamais avoir rencontré le créancier de sa prestation. Comment rendre dans ces conditions un conseil individualisé et adapté ? J’ai longuement échangé avec l’AMF sur ce sujet. Et je peux vous dire qu’elle se pose également un certain nombre de questions. Des aménagements sont très prochainement à prévoir : l’AMF hésite pour l’instant entre adapter les statuts actuels et élaborer un statut spécifique.

 

Décideurs. Les « robo-advisors » que sont Yomoni, Advize et Marie Quantier ont chacun choisi un statut spécifique pour exercer leur activité.

B. L. En tant que société de gestion de portefeuille, Yomoni a fait le choix d’un statut spécifique non régulé par les CIF. Je n’ai pas à porter de jugement. L’AMF ayant le droit de délivrer un agrément à toute société lorsqu’elle le juge pertinent. Les robo-advisors proposent par définition une allocation d’actifs reposant sur un algorithme. Leur activité se cantonne à cela. Ils n’ont pas vocation à délivrer un conseil d’ingénierie patrimoniale ou sociale. Il faudra cependant me prouver qu’un algorithme est capable d’offrir une gestion plus pertinente que celle délivrée par des sociétés de gestion entrepreneuriales.

Par ailleurs, il est acquis que tous les acteurs soumis au même statut de CIF doivent être traités équitablement. Un robo adviser qui épouse le statut de CIF plutôt que celui de SGP ou de PSI doit donc respecter le parcours client extrêmement balisé qui nous est imposé par l’AMF.

Or, le respect de ce parcours ne peut s’affranchir de la rencontre physique avec le client.

Parmi les sujets qui nous interpellent, nous avons ainsi pu constater que le document d’entrée en relation qui doit être remis au préalable à l’investisseur est bien confié par ces fintechs à leurs clients mais uniquement lorsqu’un contrat est conclu, ce qui revient à contredire la règlementation. Par ailleurs, quels sont les éléments de preuve retenus par les robo-advisers pour justifier que la personne qui a réalisé le placement est la même que celle qui contracte, que c’est bien cette personne qui a rempli en ligne le questionnaire investisseur ? Enfin, comment vérifier les éléments d’identification du client sans jamais le rencontrer ?

 

Propos recueillis par Aurélien Florin

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