Cédric Testut, l’alliance parfaite entre technicité, rigueur et simplicité
Pur produit de l’université de Paris-Sorbonne, Cédric Testut hésite un moment entre une carrière d’ingénieur financier et une carrière de juriste d’affaires à l’issue d’un cursus bi-disciplinaire marqué par le droit et la finance. Parallèlement titulaire du Capa, il finit par choisir le droit lorsqu’il intègre Linklaters en tant qu’avocat salarié avant d’être recruté en 2001 par France Télécom (désormais Orange) pour un poste de juriste financier. Cédric Testut retrouve alors ses deux passions réunies dans une seule et même activité. Son parcours transversal fait de lui le candidat idéal pour l’entreprise à une période où cette dernière s’inscrit dans un projet stratégique de restructuration du fait du montant historique de sa dette évaluée à plus de 60 milliards d’euros.
Des opérations de financement structuré à la renégociation de contrats avec les fournisseurs en passant par des cotations en Bourse, Cédric Testut contribue activement au plan de sauvetage "Ambition FT 2005" mis en oeuvre par Thierry Breton, alors PDG du principal opérateur de téléphonie en France. Son premier grand défi professionnel couronné de succès, Cédric Testut bénéficie de la confiance du top management et devient responsable juridique financier en 2005.
Depuis, il n’a cessé de gravir les échelons au point de succéder à Nicolas Guérin à la tête de la direction juridique du groupe, en avril 2018. S’il reconnaît au moment de sa prise de fonction, qu’il possédait une simple connaissance théorique de certains sujets – notamment en matière de droit de la concurrence, de la consommation ou encore des relations avec les institutions publiques –, il assure cependant que "c’est en cela que réside le défi de ce type de poste". C’est donc en toute humilité que Cédric Testut entend apporter sa pierre à l’édifice et poursuivre l’oeuvre de son prédécesseur. "Nicolas Guérin a su donner un rayonnement et une qualité à la direction juridique du groupe qu’il me faut poursuivre et faire perdurer", note-t-il.
Décideurs. Quels sont les principaux enjeux auxquels vous faites face dans votre secteur d'activité ?
Cédric Testut. Nous sommes positionnés sur un marché concurrentiel et en constante évolution qui nécessite de se réinventer pour s’adapter rapidement au changement ou l’anticiper.
Un autre enjeu plus spécifique concerne l’usage du téléphone mobile qui est devenu un objet du quotidien. En plus de sa fonction initiale, il sert aujourd’hui à accéder à la donnée, à regarder des contenus audiovisuels et même à télétravailler dans certains cas. Il est aussi utilisé comme portefeuille électronique et propose une panoplie de plus en plus large de services de « mobile finance » à nos clients Orange Bank ou Orange Money en Afrique. Pour faire face à tous ces défis, il est plus que nécessaire pour nous, opérateurs télécoms, d’obtenir et de préserver nos fréquences télécoms, de densifier notre réseau et améliorer sans cesse l’accès au réseau internet (rapidité, débit, couverture). C’est dans cette logique que s’inscrit l’arrivée de la 5G qui va être disponible d’ici fin 2020 et qui par ailleurs dynamisera la concurrence dans notre secteur d’activité en ouvrant vers de nouveaux usages, dont beaucoup restent à imaginer.
Justement parlant de 5G, pouvez-vous nous expliquer pourquoi son déploiement suscite autant de polémique ?
D’emblée, il faut avouer que ce débat a principalement lieu en France et assez peu en Europe. Le déploiement de la 5G a soulevé cependant une prise de conscience légitime de la part de nos concitoyens. Nous assistons à un phénomène particulier en France autour de cette problématique, lié à des garanties de santé publique, à des enjeux environnementaux et de protection des données personnelles.
Sur le plan de la sécurité sanitaire, il faut noter qu’à ce jour, les études sur l’impact de la 5G sur la santé des populations n’ont jamais été concluantes. Dans certains pays nordiques, qu’on ne peut pas soupçonner de légèreté sur ces thématiques, les autorités de régulation n’ont pas évoqué de risque sanitaire particulier. Et la 5G n’y fait pas polémique comme on le constate en France.
Sur la partie environnementale, il faut savoir qu’en condition de charge moyenne, un site 5G est 5 fois plus efficace énergétiquement qu’un site 4G avec 5 bandes de fréquences. Un ralentissement du déploiement de la 5G nécessiterait une augmentation des antennes 4G, au détriment de l’impact sur l’environnement. On voit aussi que certains élus locaux exigent une baisse du débit d’absorption spécifique (DAS) et en parallèle refusent l’implantation de nouvelles antennes de télécommunication. Or, pour réduire le DAS, il faut augmenter la couverture réseau donc renforcer le nombre d’antennes. La démarche des maires apparaît donc contradictoire sur le fond.
Comment êtes-vous organisé au sein de la direction juridique pour répondre à ces problématiques ?
Ces sujets ont trait principalement aux relations avec les autorités et le public et concernent à première vue moins le service juridique. Toutefois, nous juristes restons mobilisés pour faire face aux contentieux via des actions collectives menées par des plateformes de défense d’intérêts des consommateurs et sur les implantations d’antennes. Nous apportons également notre concours, par exemple, à l’obtention des fréquences, aux sujets RSE et immobilier et au marketing des offres. En somme, nous intervenons sur une palette large afin d’assurer la sécurité juridique du déploiement de la 5G.