À la tête de l'Anru depuis novembre 2014, François Pupponi œuvre auprès d'acteurs publics et privés pour redonner un second souffle aux zones urbaines les plus défavorisées du territoire français.

Décideurs. L'Anru existe maintenant depuis près de douze ans. Comment envisagez-vous votre mission ?

François Pupponi. Mon rôle est à la fois celui d’un facilitateur et d’un instigateur d’actions fortes, notamment dans les domaines de l’habitat social. Ma première priorité consiste à poursuivre notre action dans les territoires historiques de la politique de la ville et à bien achever tout ce qui a été entrepris depuis la création de l’Anru, il y a maintenant douze ans, en faveur de la transformation profonde du cadre de vie des habitants. Ma deuxième priorité porte sur le fait de favoriser l’installation dans les quartiers populaires de familles de niveau social plus élevé mais surtout et avant tout de populations salariées. Il est indispensable de nous mobiliser pour éviter que ces territoires continuent à se paupériser. Et surtout, il faut parvenir à mettre en œuvre une véritable politique de peuplement, principale garante de la cohésion et de l’équilibre des territoires. C’est la clé pour améliorer la mixité sociale et changer l’image de ces quartiers. Cela nécessitera que bailleurs, élus et services de l’État gèrent ensemble les attributions de logements.

Nous devrons donc être vigilants sur les politiques de l’emploi en accompagnant les projets susceptibles de ramener de l’activité par de l’artisanat, du commerce ou encore des pépinières d’entreprises.

Décideurs. Le programme Anru 2 a été lancé il y a dix-huit mois. Quelles sont ses ambitions ?

F. P. À mon sens, l’ambition majeure est de globaliser la politique de la ville et de faire en sorte que toutes les interventions menées sur les quartiers par les différents acteurs publics et privés le soient en cohérence. En intégrant les programmes de renouvellement urbain aux contrats de ville nous allons être en mesure d’agir dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, de la justice, de la santé, des transports… pour rétablir l’égalité républicaine dans les quartiers. Le problème du chômage reste criant dans les zones en rénovation urbaine. Nous devrons donc être vigilants sur les politiques de l’emploi en accompagnant les projets susceptibles de ramener de l’activité par de l’artisanat, du commerce ou encore des pépinières d’entreprises. Nous travaillons d’ailleurs, avec tous nos partenaires impliqués dans le programme investissements d'avenir, à co-investir dans ces quartiers avec des investisseurs privés. Avec la Caisse des dépôts, nous pouvons mobiliser 250 millions d'euros de fonds propres dans tous les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Enfin, les conditions de réussite de notre action reposent sur une participation véritable des habitants qui sera facilitée par les nouveaux conseils citoyens : leur implication le plus en amont possible est indispensable et devra aller de pair avec des moyens accrus et un renforcement de l’accompagnement mis à leur disposition.

De multiples quartiers sont de véritables réussites, nous pouvons être fiers de ce que nous avons accompli dans le premier programme.

Décideurs. Quels sont les territoires où le renouvellement urbain est prioritaire ?

F. P. De multiples quartiers sont de véritables réussites, nous pouvons être fiers de ce que nous avons accompli dans le premier programme. Le nouveau programme national de renouvellement urbain, soutenu par l’Anru, représente vingt milliards d’euros d’investissement et permettra d’agir sur 450 quartiers en métropole et outre-mer, là où les dysfonctionnements urbains sont les plus criants, dont 200 prioritaires au niveau national. Ils ont été sélectionnés parmi les 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville. L’objectif est de changer l’image de la ville, pas uniquement d’un quartier. Sont apparus de nouveaux quartiers dans les villes moyennes, avec de véritables poches de pauvreté qui n’avaient pas été concernées jusqu’alors par la rénovation urbaine et qui seront dorénavant pris en compte. Par ailleurs, avec la métropole du Grand Paris, l’Anru pourra accompagner des projets de renouvellement urbain mieux intégrés dans les dynamiques territoriales, car conçus et menés à la bonne échelle. L’émergence des nouvelles agglomérations, la création de la Métropole du Grand Paris vont donner une réelle impulsion et permettre de créer des dynamiques territoriales à la bonne échelle, dans lesquelles l’ANRU s’inscrira naturellement.

 

Décideurs. En quoi votre fonction de maire de Sarcelles impacte-t-elle votre action ?

F. P. Être l’élu d’une ville et de quartiers stigmatisés donne une certaine expérience. Près de vingt ans en tant que maire de Sarcelles m’ont donné une connaissance intime des attentes des habitants. Je les ai vus évoluer à travers la transformation progressive de leur environnement. Les questions techniques ou économiques représentent certainement une part importante du temps consacré par un élu local, mais je persiste à penser que le volet social doit être considéré à chaque instant. J’ai appris à Sarcelles ce que les citoyens pouvaient apporter à la ville. Ensemble, on a fait de belles choses, mais il est urgent de faire en sorte que les habitants disposent des mêmes chances que s’ils venaient d’autres villes. Je compte sur nos nouveaux outils d’intervention : zones franches, co-investissement, aide à l’installation d’entreprises… Cependant, la France urbaine est très diverse, chaque opération de rénovation doit donc être adaptée aux spécificités du territoire.

 

Propos recueillis par Boris Beltran

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