Préoccupation ancienne, le chômage technologique est une question lancinante qui resurgit régulièrement. Alors mythe ou réalité ?

Parmi les défis économiques des prochaines années, l’automatisation est pointée du doigt pour la menace qu'elle ferait peser sur l'emploi. Son ampleur pourrait atteindre de telles proportions que c’est toute la structure salariale qui est remise en cause.

 

42 % des emplois menacés

 

Aux États-Unis, pas moins de 47 % des emplois sont menacés à moyen terme selon une étude réalisée par les chercheurs américains, Carl Benedikt Frey et Michael A. Osborne en 2013.  La France et le Royaume- Uni ne sont pas mieux lotis avec respectivement 42 % et 35 % de la population active qui seraient concernés. Les emplois les plus menacés : les hôtes de caisse, les métiers de l’administration ainsi que les vendeurs dans le commerce de détail. Selon l’étude, ce n’est pas moins de 4,2 millions de détaillants et 3,4 millions de caissiers qui sont sous la menace de la mécanisation de leur travail aux États-Unis.

 

Idem en France : selon le rapport établi en 2016 par le Conseil d’orientation pour l'emploi relatif à son impact, les agents d’entretien représentent par exemple près de 21 % des emplois concernés par le risque de suppression, soit 320 000 personnes.

 

Des chiffres à nuancer

 

Ces chiffres sont néanmoins à nuancer. De nombreuses incertitudes planent autour de l’effet global de la robotisation dans l’emploi. Et cela pour deux raisons. La première est qu’ils ne prennent pas en compte la création d’emplois induite par ces nouvelles technologies : de manière directe, dans des secteurs tels que la R&D, la conception ou encore la commercialisation, ett de manière indirecte avec l’évolution d’anciens postes vers de nouvelles tâches. On observe ainsi que la création de ces nouveaux métiers entraîne un éclatement de métiers déjà existants qui se spécialisent, comme les webmasters ou les spécialistes des réseaux sociaux. Tout cela n’est pas sans rappeler la théorie de la « destruction créatrice » de l’économiste Joseph Schumpeter.

 

La deuxième raison est qu’il est difficile de savoir à quelle vitesse se diffusera l’automatisation. Il y a en effet des facteurs d’acceptabilité sociale, de mode d’organisation, de positionnement et de rentabilité économique à prendre en compte. « L’automatisation n’est pas automatique » résume Nicolas Le Ru, responsable au département Travail Emploi Compétence chez France Stratégie. Le meilleur exemple en la matière demeure le déploiement des premières caisses automatiques dans les grandes surfaces en 2004. Dix ans plus tard, le nombre de caissiers n’avait diminué « que » de 10 %. On en comptait toujours 185 000 en France en 2014 alors que certaines études anticipaient déjà leur disparition. Cela s’explique par le fait que la clientèle préfère garder un contact humain et que les grandes chaînes ont été confrontées à des nombreux bugs. Derrière ce constat, il y a surtout l’idée que l’homme dispose encore d’un avantage compétitif par rapport aux robots grâce à son adaptabilité, sa flexibilité et son sens des relations. Mais pour combien de temps encore ?

 

Un accompagnement obligatoire

 

En attendant, il est évident que le suivi des personnes les plus menacées par l’automatisation est nécessaire. Face à un besoin de former les individus au numérique, les pouvoirs publics doivent mettre en œuvre un système d’accompagnement afin d’assurer au mieux la transition technologique. L’État doit s’emparer de la question pour permettre la complémentarité entre l’homme et la machine. Et si les pouvoirs publics ne s’en chargent pas, de grands groupes se sont déjà saisis du sujet. Neuflize OBC a, par exemple, déboursé plus de dix millions d’euros dans la formation et dans l’accompagnement du changement au digital.

 

Gatien Pierre- Charles 

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