Polyglotte, internationale et classée depuis plusieurs années dans la catégorie "excellent" en arbitrage international, l’équipe parisienne d’Hogan Lovells fait figure de proue. Elle nous livre ici une vision à 360 degrés de l’arbitrage d’aujourd’hui.

Décideurs. L’usage des audiences virtuelles s’est étendu depuis le Covid. L’arbitrage va-t-il devenir une juridiction digitale ?

Gauthier Vannieuwenhuyse. La communauté de l’arbitrage s’est très vite adaptée au contexte de la pandémie. Les institutions d’arbitrage et les cabinets d’avocats (notamment Hogan Lovells) ont mis en place rapidement des protocoles prévoyant les garde-fous indispensables à l’usage de la visioconférence pour les audiences.

Thomas Kendra. Dès que le monde s’est réouvert, il y a eu un élan pour revivre comme avant et certains ont pensé que c’était la fin des audiences virtuelles. En réalité, elles demeurent utiles dans certains contextes, et notamment quand elles sont hybrides, c’est-à-dire combinées avec une audience en présentiel pour certains des participants à ­l’audience.

Laurent Gouiffès. En tant qu’arbitre, j’ai souvent l’occasion de faire des audiences en visioconférence. Bien qu’il y ait parfois des problèmes techniques, je pense qu’elles sont adaptées pour les audiences de procédure. Cela permet en effet de réduire les coûts de manière significative. En revanche, en fonction des circonstances, il me semble préférable que les audiences sur le fond se déroulent en présentiel, car le contact humain est parfois irremplaçable.

Avec ces nouveaux usages, comment préserver la souveraineté numérique ?

Laurent Gouiffès. Le sujet majeur est celui de la cybersécurité. Au quotidien, nous travaillons avec des prestataires qui garantissent un niveau très satisfaisant de sécurité. Pour les dossiers sensibles, le niveau de cybersécurité peut être très élevé. Je repense notamment à un dossier de plusieurs milliards d’euros relatif à des contrats gaziers. Pour ce dossier, l’ensemble des documents, emails, échanges avec les clients, passaient par une plateforme ultra-sécurisée.

"L’écosystème à Paris est très favorable à l’arbitrage"

Les tensions internationales, la guerre en Ukraine, encouragent-elles le recours à l’arbitrage ?

Laurent Gouiffès. L’arbitrage est le mode normal de résolution des différends relatifs au commerce international et le demeure dans ce contexte de tensions internationales. Il peut être particulièrement utile pour résoudre les litiges liés aux conséquences économiques du conflit armé, notamment dans le secteur de l’énergie.

Les recours en annulation initiés devant la Cour d’appel de Paris ces deux dernières années ont fait beaucoup parler d’eux. Paris reste-t-elle une place de droit favorable à l’arbitrage ?

Thomas Kendra. L’écosystème à Paris est très favorable à l’arbitrage, et cela inclut notamment la présence à Paris de l’institution d’arbitrage la plus renommée, la CCI, un cadre législatif moderne et un corps judiciaire, qui inclut de véritables spécialistes de la matière arbitrage.

Gauthier Vannieuwenhuyse. Le juge de l’annulation est plus attentif à certains sujets spécifiques comme la corruption ou les conflits d’intérêts des arbitres. Nous remarquons dans notre pratique une augmentation des recours en annulation. Mais en réalité, peu de sentences sont annulées et la jurisprudence française demeure « arbitration-friendly ». Force est de constater que les arrêts confirmant les sentences arbitrales défrayent moins la chronique.

Melissa Ordonez. Paris demeure leader sur le marché de l’arbitrage mondial et tous les acteurs internationaux y sont présents. Ce caractère international s’illustre d’ailleurs parfaitement au sein de notre équipe, composée d’avocats de 10 nationalités et capables de travailler en 8 langues différentes. Moi-même, je suis colombienne. J’ai grandi dans plusieurs pays. Nos interventions ne se limitent donc pas à la France et couvrent l’ensemble du globe.

Quelle est votre pratique des modes amiables de résolution des litiges ?

Thomas Kendra. La médiation peut être une bonne option dans certains dossiers mais cela nécessite qu’il y ait une réelle volonté de la part des parties de conclure un accord amiable. En revanche, dans les situations de tensions fortes, où des enjeux de principe ou d’égo sont au cœur du litige, la médiation n’est pas forcément appropriée. Parfois, initier une procédure contentieuse permet de cristalliser le litige, afin que chacune des parties revienne à une position plus raisonnable, qui pourra éventuellement permettre par la suite de trouver un accord amiable. Quatre-vingt-dix pour cent de nos médiations aboutissent à un accord amiable car nous savons reconnaître les situations dans lesquelles ce processus sera efficace.

Melissa Ordonez. Dans certains dossiers où les parties ont des approches très opposées, l’arbitrage crée l’occasion d’un échange, d’une confrontation propice à l’élaboration d’un accord transactionnel. De manière générale, nous assistons à une demande croissante de la part de nos clients concernant la médiation.

 "Nous assistons à une demande croissante de la part de nos clients concernant la médiation"

L’arbitrage sera-t-il le mode de résolution des litiges ESG, climatiques ou sur le devoir de vigilance ?

Gauthier Vannieuwenhuyse. Dans certaines circonstances, l’arbitrage pourra être adapté, notamment dans le contexte de la supply chain si certaines normes ESG ne sont pas respectées par l’un des cocontractants. Mais le recours au juge judiciaire demeure le principe, notamment dans le cadre de la loi française sur le devoir de vigilance.

Melissa Ordonez. Dans le domaine environnemental, quelques arbitrages sont en cours, par exemple sur des questions de révocation de licence de fracking. L’arrêt de l’exploitation de centrales nucléaires décidé par le gouvernement allemand a également donné lieu à ­arbitrage. Avec la croissance des réglementations environnementales, on peut s’attendre au développement de ce type d’arbitrage. 

Prochains rendez-vous

02 octobre 2024
Sommet du Droit en Entreprise
La rencontre des juristes d'entreprise
DÉJEUNER ● CONFÉRENCES ● DÎNER ● REMISE DE PRIX

Voir le site »

02 octobre 2024
Rencontres du Droit Social
Le rendez-vous des acteurs du Droit social
CONFÉRENCES ● DÉJEUNER  

Voir le site »

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024