Que nous réserveront les banques centrales en 2024 ? Le pic d’inflation est-il réellement passé ? Quelles thématiques privilégier ? Tour d’horizon des marchés avec Guillaume Dard, président, et Sébastien Barbe, directeur général, Montpensier Finance.

 

Décideurs. Vous venez de lancer un fonds obligataire, pourquoi ? Quelles en sont les spécificités ?
 
Sébastien Barbe. Nous avons lancé le fonds M All Weather Bonds (SRRI 2*) le 29 août dernier, notre premier fonds total return obligataire multi-stratégies. Les trois thèmes d'investissement obligataires sur lesquels le fonds se concentre sont les emprunts d'États, le crédit, la diversification. Il propose une exposition diversifiée aux marchés obligataires avec un focus sur la gestion des risques et une approche extra-financière - le fonds est article 8 SFDR. L’approche total return nous semble particulièrement adaptée au marché des taux volatils actuels qui possède une grande variété de sous-classes d’actifs qui interagissent entre elles. L’équipe cherche à générer de la performance dans tous les types de marchés. Ce fonds met en œuvre le principe des "3 C" cher à Montpensier Finance : chaque idée d’investissement est analysée selon un score mêlant notre degré de Conviction, son positionnement Contrariant par rapport au consensus et sa Convexité. Nous allouons des budgets de risque de manière itérative de sorte à rechercher une allocation optimisée à chaque environnement de marché.

 

"Les économies s’adaptent à ce jour à un contexte de taux et d’inflation plus haut"

L'augmentation des taux d'intérêt à court terme et le souhait des banques centrales de réduire la liquidité disponible accroît bien sûr le risque d’erreur de politique monétaire. Cependant, il est paradoxal de noter que les économies s’adaptent à ce jour à un contexte de taux et d’inflation plus haut. Même si l'inflation devrait diminuer dans les prochaines publications, cela pourrait être toutefois temporaire : le rebond des prix de l'énergie, une possible sortie du cycle de déstockage, et le constat que les économies et l’emploi résistent à cet environnement pourraient surprendre les investisseurs.

 

*Indicateur synthétique de risque – sur une échelle de 1 : risque le plus faible, à 7 : risque le plus élevé

 

En tant que maison ISR, dans quelle mesure votre société de gestion s'engage-t-elle auprès des entreprises en portefeuille pour promouvoir des pratiques plus durables ?

 

S. B. Montpensier Finance a mis en place une politique d’engagement robuste pour ses investissements, avec pour objectif de sensibiliser les entreprises aux enjeux de développement durable. Dans ce cadre, nous menons des campagnes d’engagement sous forme de dialogue avec les entreprises mais aussi à travers des actions collectives d'engagement, afin d'encourager de meilleures pratiques environnementales, sociales, et de qualité de gouvernance, notamment lorsque certaines caractéristiques apparaissent insuffisamment prises en compte. Ces échanges nourrissent nos analyses et complètent la prise en compte d’indicateurs de performance extra-financière.

 

Nous exerçons également nos droits de vote afin d’inciter la diffusion des meilleures pratiques de gouvernance, y compris concernant les sujets sociaux et environnementaux. Parmi eux, nous pouvons citer des résolutions de plus en plus répandues telles que le "Say on Climate", dispositif actionnarial concernant la stratégie d’une entreprise en matière de climat. Enfin, les gérants et les analystes ESG agissent en toute indépendance, dans l'intérêt exclusif des porteurs.

 

Quelle est votre vision sur l'évolution de la réglementation ISR ?

 

Guillaume Dard. La réglementation tend vers l'uniformisation et la mise en place de définitions communes à tous les acteurs de la place. Plus de 93 % de nos encours pour les fonds ouverts relèvent des classifications Article 8 ou Article 9 SFDR, avec 96 % de nos encours ouverts labellisés ISR. Nous suivons de près l’évolution de la réglementation extra-financière, et souhaitons autant que possible participer à ces travaux, notamment à travers notre adhésion à des groupes de travail et à la plénière Investissement Responsable de l’AFG, toujours avec pour objectif de promouvoir de meilleures pratiques, plus transparentes et harmonisées.
 
Le segment des actions thématiques a-t-il toujours le vent en poupe ? Parlez-nous de vos stratégies internationales phares.

 

G. D. Les thématiques d’avenir sont des tendances de long terme bénéficiant de taux de croissance supérieurs à la croissance mondiale et qui devraient bénéficier de flux d’investissement supérieurs à la moyenne du marché. Avec la transition climatique, la quatrième révolution industrielle portée par l’IA, le cloud et les techniques génétiques s’avère un phénomène majeur. Ces nouvelles manières de produire et de consommer impliquent de nouvelles perspectives de croissance économique et de développement durable, donnant naissance à de nouveaux gagnants et perdants, avec la disparition d’anciens opérateurs historiques et l’émergence de nouveaux leaders.

 

"La quatrième révolution industrielle portée par l’IA, le cloud et les techniques génétiques s’avère un phénomène majeur"

Chez Montpensier Finance, notre ambition est de rechercher ces nouveaux leaders dans le but de créer de la valeur pour nos investisseurs. En d’autres termes, avoir l’objectif de transformer les tendances macroéconomiques en investissements attractifs. Pour cela, nous nous sommes focalisés sur quatre grandes thématiques qui présentent selon nous de forts potentiels et axés sur les objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies que sont la transition climatique (avec le fonds M Climate Solutions), le sport et le bien-être (M Sport Solutions SRI), la santé (Aesculape SRI) et le Cloud (M Cloud Leaders SRI).
 
Qu’attendre de la Fed et de la BCE dans les mois à venir ?

 

G. D. Les deux banques centrales sont passées sur une posture de "pause vigilante", inquiètes d’une possible résistance de l’inflation mais soucieuses de ne pas mettre en risque des économies fragilisées par des contextes de taux et géopolitiques défavorables. Aux États-Unis, la récession tant annoncée est sans cesse décalée dans le temps et la conjoncture résiste presque de façon surprenante. De nombreux signes de décélération sont visibles avec la chute des mises en chantier de l’immobilier et la remontée des créances douteuses sur les cartes de crédit et dans l’automobile. Mais l’emploi, qui est certes un indicateur retardé, ne faiblit pas, au contraire. La Fed, qui a remonté ses taux au-delà du seuil symbolique de 5 %, peut se permettre d’attendre compte tenu d’une part de la baisse rapide de l’inflation, autour de 3 % désormais, et d’autre part de l’impact à mesurer de la forte hausse des taux longs récente.

 

La position de la BCE est plus délicate. Les derniers indicateurs font état d’une récession industrielle, en particulier en Allemagne, aux prises avec un changement profond de son modèle d’activité. En parallèle, l’inflation demeure plus forte en Europe qu’aux États-Unis alors que les taux sont moins élevés, l’emploi résiste, ce qui explique la virulence des partisans d’une orthodoxie monétaire rigoureuse. Malgré tout, elle devrait faire preuve de prudence, la problématique de la dette de certains États membres monte dangereusement. On pourrait se diriger donc, en Europe comme aux États-Unis, vers un long plateau sur les taux, au moins jusqu’au second trimestre 2024, sauf bien sûr en cas d’accident financier ou de nouvelles révisions à la hausse de l’inflation.

 

Comment voyez-vous l’évolution des marchés pour 2024 ?

 

S. B. La Chine demeure la clé du retour d’un cycle économique positif, entraînant l’ensemble de sa zone géographique et de l’Europe. Pour cela, il sera nécessaire qu’elle relance plus franchement son économie afin de faire revenir la confiance des acteurs économiques, en particulier dans le secteur privé. Cela semble possible, voire en cours, car le pacte social chinois a toujours intégré une dimension de prospérité économique importante.

 

Si cette reprise cyclique à venir est un élément positif, il l’est moins sur les perspectives d’inflation. Dans ce contexte, nous avons besoin aussi que les banques centrales ne décident pas de resserrer plus encore leur politique monétaire. Les tensions géopolitiques considérables actuelles pourraient toutefois les en dissuader. Dans ce contexte qui intègre bien sûr son lot d’incertitudes, les marchés d’actifs risqués pourraient enfin connaître une année favorable. Nous en avons besoin pour adresser les problématiques d’investissement sur les grandes thématiques du futur.

 

 
Communication publicitaire – La décision d’investir tient compte de toutes les caractéristiques, objectifs et risques de l’OPCVM. Lire attentivement le prospectus, le KID et le document précontractuel SFDR avant tout investissement. Les OPCVM présentent notamment un risque de perte en capital.

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