De l’intérêt d’avoir le statut de société de gestion au processus de sélection de gérants, les associés du multi-family office Officium partagent leur expertise de l’investissement non coté, avec en toile de fond l’importance d’élaborer un scénario macroéconomique.

 

Équipe :

Raja Saidi Kachtouli, Directeur général

Milène Gullient, Directeur général délégué

Isabelle Chazarin, Directeur général délégué

Éric Séheux, Président

 

Décideurs. Allons dans le vif du sujet, vous avez le statut de société de gestion…

Officium. Nous avons effectivement la spécificité d’être à la fois multi-family office et société de gestion. Dans le cadre du service apporté à nos clients, le conseil en allocation d’actifs est un élément-clé. Ce conseil doit être réactif, indépendant et concerner tous types d’actifs. Par conséquent, nous voulions cet agrément afin de pouvoir faire bénéficier du mandat de gestion à nos clients. Il permet d’adapter rapidement les allocations d’investissement dans des moments comme ceux que nous traversons actuellement. Nous souhaitions aussi être capables de proposer une grande diversité d’investissements, notamment non cotés. Grâce à ce statut, nous avons la capacité de créer des feeders de manière totalement autonome et ainsi de pouvoir travailler avec les plus grands investisseurs mondiaux du non-coté, qu'ils soient européens ou nord-américains.

Qu’est-ce qu’un feeder ?

Le principe est de créer un fonds positionné sur une stratégie sélectionnée. C'est une forme de délégation de mandat. Chacun de nos clients va pourvoir investir dans le fonds et nous agrégeons ainsi leurs besoins afin d’investir chez des gérants internationaux où les tickets d’entrée sont de l’ordre de dizaines de millions d'euros. Cette structuration nous permet d'aller chercher des gérants inaccessibles sans cet agrément.

Quelle est votre approche du non-coté ?

Depuis près de vingt ans, nous envisageons le non-coté de façon structurelle. Notre sélection d’investissements non cotés est toujours guidée par un scénario macroéconomique. En fonction de celui-ci, nous privilégions certaines classes d’actifs non cotées, certains segments et une diversification géographique appropriée. Ensuite, un travail méticuleux est réalisé pour sélectionner le gérant. Dans ce cadre, le réseau que nous construisons depuis vingt ans et notre base de données quantitatives et qualitatives sont des outils précieux. Nous rencontrons à chaque fois entre 30 et 50 intervenants opérant dans la stratégie déterminée. Nous sélectionnons des équipes expérimentées, ayant démontré une bonne capacité d’exécution et disposant de résultats solides dans la durée. Nous portons également une attention particulière à la pérennité de l’équipe et à leur prise en compte des facteurs environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance.   

 

"Nous portons une attention particulière à la pérennité de l’équipe"

 

À titre d’exemple, en 2019, de nombreux indicateurs laissaient présager la fin du cycle de croissance. Nous avons donc investi en dette privée senior à taux variable avec une diversification européenne. D’autre part, nous nous sommes positionnés avant la crise du Covid sur l’immobilier logistique, souhaitant profiter de la forte croissance du e-commerce. Actuellement, nous levons notre troisième fonds d’infrastructures. C’est une classe d'actifs particulièrement bien adaptée au contexte économique, à nos besoins sociétaux et offrant aux investisseurs des revenus souvent indexés à l'inflation. Enfin, nous conseillons d'investir en private equity secondaire. Il permet notamment l'acquisition de parts déjà détenues par des investisseurs, avec des décotes d'autant plus importantes que la crise économique l'est aussi.

Comment diversifier dans le non-coté ?

Nous distinguons trois classes d’actifs non cotés : le capital investissement, l'immobilier et les infrastructures. Nous pouvons accéder à chacune d’entre elles de deux façons : en dette ou en capital, et il existe plusieurs sous-segments au sein de ces catégories. Ainsi, le marché du capital investissement peut se subdiviser entre capital-risque, capital développement, capital transmission et capital retournement. Et dans le cas de la dette, la position dans la structure du capital revêt une grande importance. Les paramètres sont donc nombreux et, en fonction de la conjoncture, nous réduisons le nombre de gérants susceptibles de nous intéresser. Nous conseillons également de constituer l’allocation sur plusieurs millésimes et avec plusieurs devises.

En matière de conditions macroéconomiques et de non-coté, s’agit-il nécessairement de long terme ?

L’investissement non coté convient à des investisseurs de long terme car il ne permet pas d’être agile en matière d’allocation sur un horizon plus court, justifiant un poids adapté au sein des portefeuilles. Lorsque nous investissons au sein d’un actif non coté, le temps joue un rôle important car nous sommes engagés sur un nombre d'années significatif. Ainsi, quand vous faites une due diligence, l’un des principaux critères est la sélection d’équipes pérennes, dotées d’un track record de qualité et d’une bonne capacité d'exécution sur différentes phases de cycle. Nous devons néanmoins tenir compte de la conjoncture économique et des changements de comportement sociétaux.

Pouvez-vous nous donner un exemple de sélection de gérant ?

Prenons l’exemple du secondaire. Nous sommes entrés dans une période plus compliquée du cycle économique, avec les implications que l’on connaît sur l'inflation, les hausses de taux, une éventuelle récession... Ce contexte nous a donné envie d’investir sur le marché secondaire, anticipant que des investisseurs allaient avoir besoin de vendre des participations afin de récupérer des liquidités avec des décotes potentiellement importantes, pouvant aller jusqu'à 50 % en 2001 et en 2008.

Par ailleurs, nous souhaitions offrir une diversification géographique à nos clients qui détiennent une majorité de leurs actifs en Europe. Nous avons ainsi sélectionné un gérant américain présent depuis 1994 sur le segment de l’investissement secondaire, levant son dixième fonds sur cette thématique et ayant traversé avec succès plusieurs crises. Évidemment, le passé ne reflète pas l'avenir, mais quand des gérants ont déjà une expérience des moments compliqués, cela aide.

Une fois que vous avez déterminé une stratégie, le client vous suit-il nécessairement ?

Nos clients souhaitent que nous soyons force de proposition. Ils apprécient notamment Officium pour sa capacité à analyser en permanence la situation macroéconomique et à leur proposer des solutions d’investissement adaptées. D’autre part, nous proposons régulièrement à nos clients d’échanger avec les gérants, d’appréhender leur stratégie et de la valider avec nous. Comme vous l’avez compris, nous proposons actuellement d’investir en infrastructures européennes Core, Core+, donc assez défensive et sur du private equity secondaire plutôt nord-américain. Un client qui rejoint Officium rejoint également notre vision de l'allocation d'actifs.

Comment diminuer les risques liés au non-coté ?

Nous sélectionnons des fonds diversifiés tant en matière de secteurs que de zones géographiques. Nous nous intéressons uniquement à des fonds axés sur des stratégies déterminées en amont et préalablement validées. Le temps long implique des risques multiples qui peuvent se greffer en cours de route, comme les risques de retournement de cycle économique ou les risques géopolitiques. C’est pourquoi nous diversifions géographiquement nos investissements en Europe et aux États-Unis. Finalement, la sécurité commence par la diversification.

Votre travail macroéconomique est-il spécifique au non-coté ou bien global ?

Nécessairement global, ce qui nous permet de proposer des portefeuilles complémentaires entre le coté et le non-coté. Nous nous appuyons sur nos équipes internes, dotées de compétences aiguisées en économie et également en économétrie permettant de modéliser la partie risque. Nous observons aussi ce que font les plus grands investisseurs au monde, particulièrement les grands fonds de pension, parce que nos clients ont un profil qui s’en approche. Un fonds de pension a une vision long terme de ses investissements et diversifie ses actifs sur toutes les classes d’actifs, cotées et non cotées.

Nous avons par ailleurs accès à la recherche économique de tous les professionnels avec lesquels nous travaillons, ainsi qu’à des recherches économiques indépendantes car nous savons bien qu’il existe des biais. Nous devons capter la meilleure information possible en toute circonstance, l’analyser en permanence et nous remettre en question chaque jour, tout en ayant de fortes convictions.

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