« Les organisations les plus en avance sur le digital sont aussi de loin les plus rentables »
Décideurs. L’année 2014 ira-t-elle vers une digitalisation toujours plus grande des stratégies médias ?

Guillaume de la Fléchère et Jean-Philippe Chevret.
Oui, car plus personne ne peut ignorer que le processus de digitalisation de la société est engagé et a désormais atteint définitivement le marché de masse. Les médias sont devenus digitaux au même titre que le consommateur, et avec lui son parcours d’achat. Les marques doivent en tenir compte si elles ne veulent pas être rapidement hors-jeu. Capgemini Consulting et le MIT l’ont récemment mis en lumière dans leur étude sur les Digirati, démontrant que les organisations les plus en avance sur le digital sont aussi de loin les plus rentables ! Ce transfert vers le digital doit nécessairement s’intégrer dans les stratégies médias. Et paradoxalement, la France, alors qu’elle est le second pays au monde le mieux pourvu en équipement numérique, accuse avec la seizième place un important retard dans ses investissements média digitaux, notamment face aux Anglo-Saxons. Un conseil, comme le disait Paracelse : « C'est la dose qui fait le poison ». S’il est capital d’opter pour une politique digitale ambitieuse, gare à ceux qui misent tout sur le « performance marketing », en oubliant que l’écosystème digital pour être vertueux doit aussi tenir compte des autres leviers qui incarnent la marque comme le social, l’e-réputation, les contenus et surtout l’image.


Décideurs. Ce digital peut-il constamment aller aussi vite que le « mix marketing » ?

G. de la F. et J.-P. C.
Le mix marketing ne peut pas aller aussi vite que le digital. Il n’y a pas une année sans innovation technologique majeure et pas un jour sans son plein de nouveautés. Il ne serait pas cohérent de vouloir faire évoluer sa stratégie marketing en temps réel. Nous travaillons avec nos clients à intégrer durablement le digital dans leur stratégie marketing, à casser les silos entre les différents canaux médiatiques, à fixer les KPI [Key Performance Indicator, NDLR] du succès. Par ailleurs, nous les accompagnons dans la prise en main et l’adoption des nouvelles technologies de planning, d’achat ainsi que dans la gestion et l’analyse des données.


Décideurs. Le data planning paraît prendre le pas sur le médiaplanning… Pouvez-vous nous en dire plus ?

G. de la F. et J.-P. C.
Chez nous, la donnée a toujours été placée au cœur de la réflexion stratégique. C’est depuis notre création en 2007 un de nos plus gros postes d’investissement. À l’heure de l’explosion des données émises par les consommateurs, nous avons très tôt intégré le data planning au cœur de notre offre mais aussi en tant que composante de la réflexion stratégique. On ne s‘improvise pas data planner ou data analyst. Au-delà de l’équipe qui pilote les campagnes RTB [Real Time Bidding, NDLR] sur des modèles de performance, l’ensemble de nos équipes display auront été formées à l’utilisation des outils de planning et de gestion opérationnelle des campagnes avant la fin du premier trimestre 2014. Un stratège média ne doit plus opposer média planning et data planning, mais au contraire adopter une pensée qui place le client ou le prospect au cœur de la réflexion média. Nous recrutons des statisticiens et des analystes pour répondre à ces nouveaux besoins et enrichir nos équipes. Enfin nous avons créé une communauté de data planners au niveau international qui échange en permanence sur les best practices, la technologie, les modèles d’attribution… Ce qui s’applique digital s’appliquera demain à l’ensemble des médias. Néanmoins nous sommes convaincus que le data planning ne répond pas à toutes les problématiques pour une marque. Pour développer la notoriété, l’image… et la positionner comme une marque partenaire pour ces clients, les dispositifs éditoriaux, de brand content, d’événementiel, d’activation sont indispensables.


Décideurs. Qu’en est-il du brand content ? Est-il, lui aussi, une valeur constante, voire montante ?

G. de la F. et J.-P. C.
Si le brand content reste une valeur sûre, on voit désormais se développer le native advertising, le buzzword qui va supplanter le brand content en 2014 ! Autrement-dit, « intégrer-associer-fusionner » les contenus de la marque dans un univers éditorial en adéquation. Le native est un levier protéiforme, pouvant être piloté à la performance (comme Ligatus, Outbrain, Videostep…) ou à l’opposé, le fruit d’une réflexion avec les éditeurs pour créer des opérations en réelle osmose avec le flux rédactionnel. Une façon de délivrer du contenu de marque intégré, respectant les attentes des consommateurs et le contrat de lecture de l’éditeur, comme par exemple l’e-magazine que nous avons co-créé avec Le Monde et IBM en janvier 2010 et qui évolue devenant en 2013 un e-board pour s’adapter aux nouvelles habitudes de lecture de la presse sur tablette (lesclesdedemain.lemonde.fr).


Décideurs. Vous semblez parier sur la disparition progressive des structures traditionnelles de conseil et d’achat d’espaces. Au profit de quoi ?

G. de la F. et J.-P. C.
Bienvenu à Gattacaddexchange ! Demain, les achats média online et offline deviendront une « commodities » pilotée à travers des plateformes automatisées, où un expert fera le travail de dix aujourd’hui. Les grandes agences et les plus en retard sur le digital seront les plus directement touchées. On va voir apparaître de nouvelles structures courtes, mixant achat automatisé et analyse des data, issus du monde des technologies, des médias de la publicité… Chez Neo@Ogilvy, qui n’est pas une agence média traditionnelle, notre modèle « Channel Agnostic » est fondé sur une très forte brique stratégique, un accompagnement très senior, un ADN digital avec une approche totalement transparente sur les nouveaux modèles de data planning et médiabuying. C’est pourquoi nous nous sentons moins concernés, mais restons toujours très vigilant,s en quête d’innovation et de veille stratégique.

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