Mathieu Gallet, nouveau président de Radio France, détaille sa vision du média radio. 
Décideurs. Que représente pour vous le monde de la radio et plus particulièrement Radio France ?

Mathieu Gallet. La radio est un média totalement en phase avec les évolutions des technologies et les progrès du numérique qui lui offrent un large champ d’opportunités. Plus particulièrement, Radio France représente mon univers radiophonique depuis l’âge de 18 ans. Si je n’ai jamais travaillé en radio, j’en suis un gros consommateur : c’est en effet le premier média que j’utilise à mon réveil et le dernier lorsque je me couche. Il combine informations, débats, programmations musicales et m’accompagne ainsi tout au long de mes journées. Même lors de mes déplacements à l’étranger, je peux l’écouter grâce aux applications mobiles.


Décideurs. Vous évoquez la mobilité. Comment la concilier avec la radio filmée ?

M. G. Avec Internet on peut regarder et écouter la radio partout dans le monde. De plus, il est maintenant possible d’enrichir les programmes de la radio, comme les prime-times matinaux, en mariant le son, les images, l’infographie et les diffuser sur des plates-formes numériques à large audience. Ces nouveaux modes de diffusion permettent d’élargir le public traditionnel de la radio vers de nouveaux auditeurs. Néanmoins, même avec l’avènement de la « radio filmée », la radio, ce n’est pas la télévision. La radio garde sa spécificité : être un média d’accompagnement, on peut faire autre chose en l’écoutant.


Décideurs. Justement, votre programme à la présidence de Radio France plaide un retour au « média chaud ». Le direct est-il compatible avec le format de l’investigation ou de l’enregistrement ?

M. G. Je souhaite que France Info renoue avec ses fondamentaux, à savoir : faire de l’info en continu avec de l’actualité « chaude ». Il est important que l’antenne reste un média vivant et réactif. Pour autant, il ne s’agit pas de délaisser complètement les programmes enregistrés et l‘investigation, qui demandent un temps de travail différent. Nous devons faire face à un univers concurrentiel qui a évolué et dans lequel coexistent les chaînes d’info comme BFM, I>télé, LCI mais aussi des pures players de l’Internet, et enfin les médias presse comme Le Monde ou Le Figaro qui possèdent leur propre site web et qui diffusent l’information en continu.


Décideurs. À l’instar d’un groupe de presse avec ses titres, raisonnez-vous en termes de « marque »?

M. G. Chacune de nos antennes doit être spécifique, avoir une personnalité qui fonctionne comme un « label », offrir des repères clairs. Nos publics doivent pouvoir trouver ce qu’ils recherchent derrière chaque proposition éditoriale. Nous devons affirmer l’identité de nos radios, la décliner et veiller à ce que les programmes reflètent la promesse faite à l’auditeur. C’est encore plus vrai aujourd’hui car nous évoluons dans un monde très connecté et concurrentiel, dans lequel il faut réussir à s’affirmer avec nos spécificités qui sont celles du service public : qualité, diversité, indépendance. Il nous faut imaginer le service public radiophonique de l’an 2020.


Décideurs. Quelles innovations de rupture allez-vous conduire à Radio France afin de maintenir, voire améliorer ses performances ?


M. G. L’une de nos grandes missions sera d’affirmer l’identité de nos sept chaînes dont les programmations sont les socles. Nous les déclinerons ensuite sur tous les canaux de distribution : FM, Internet, applications mobiles, réseaux sociaux … et travaillerons sur leur référencement afin d’optimiser leur indexation sur tous les carrefours d’audience en ligne . En utilisant au mieux les nouvelles technologies nous devons rendre nos programmes accessibles au plus grand nombre .


Décideurs. Radio France c’est 4 300 salariés, sept stations, mais aussi du conservatisme et la menace de grèves. N’éprouvez-vous pas quelques craintes à ce sujet ?

M. G. J’aborde ce nouveau tournant de ma carrière sereinement. J’ai vécu des périodes un peu chahutées à l’INA, notamment durant les deux premières années où j’ai dû négocier le nouvel accord d’entreprise, où j’ai connu des grèves et des moments de tension comme dans toute vie d’entreprise. Mais j’ai une bonne capacité de résistance au stress et si j’avais à un moment ou à un autre eu des craintes, je n‘aurais pas brigué la présidence de Radio France.


Crédit photo : Stéphane Grangier


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