Chez BNP Paribas, une "gouvernance diversité" a été mise en place. Un sujet majeur pour le groupe que nous explique Elisabeth Karako.
Entretien avec Elisabeth Karako, Directrice de la Diversité Groupe, BNP Paribas


Décideurs. En matière de diversité, à quel point les problématiques diffèrent-elles d’un pays à un autre ? Comment relever ce défi de l’internationalisation ?

Elisabeth Karako.
La diversité ne s’appréhende pas de la même manière en France et dans les autres pays du Groupe BNP Paribas. C’est pourquoi, j’ai mis en place en 2012 une « gouvernance diversité » qui consiste en la création d’un comité international réunissant vingt-huit Diversity Officers, RH et managers. Ce comité se réunit deux fois par an pour partager les meilleures pratiques. Ainsi, notre action est glocale* : chaque pays doit suivre les grandes orientations stratégiques définies au niveau du groupe, tout en développant parallèlement des actions locales propres à ses besoins et sa culture. Avant la mise en place de cette gouvernance, il était important que les gens s’approprient la notion de diversité et comprennent les enjeux de RSE et de performance. Deux ans après son lancement, ce comité a permis d'accélérer le développement des actions diversité partout dans le monde.

Décideurs. Quels axes stratégiques sont définis pour promouvoir cette diversité ?

E. K.
Notre CEO et notre DRH sont très engagés sur ces sujets, ce qui constitue un véritable gage de réussite. La « gouvernance diversité » met en avant les grandes orientations définies par notre girection générale. L’un des grands axes est l’égalité femmes/hommes, pour lequel les progrès sont suivis en direct par notre CEO. Nous avons fixé un objectif chiffré pour augmenter le nombre de femmes dans les postes de "senior managers", représentant environ 2200 personnes. Aux prémices de la politique « diversité » nous étions à 15 %, en 2012 nous avons atteint notre objectif de 20 % et aujourd’hui souhaitons atteindre 25 %. Il est très important d’avoir des objectifs chiffrés car cela permet de prendre conscience des enjeux et d’agir en conséquence. De plus, en 2006, nous avons créé un réseau de femmes, l’Association BNP Paribas MixCity, particulièrement actif, qui complète les actions menées par la RH : 750 femmes dans le réseau français et 12 réseaux dans le monde.
Un deuxième axe majeur est l'internationalisation du groupe. Nous travaillons sur l’identification de notre vivier de talent et la mobilité de nos cadres à l'international. Le siège doit être plus représentatif de la population internationale du groupe BNP Paribas. La diversité englobe de nombreux autres axes que nous devons tous traiter. En France, il existe vingt critères de discrimination et pour plusieurs d'entre eux (handicap, seniors...) nous signons des accords d'entreprise avec les partenaires sociaux, accompagnés d'indicateurs de suivi.

Décideurs. Comment lutter contre les stéréotypes dans l’entreprise ?

E. K.
Ce sujet a été largement traité à l'ONU lors de la dernière réunion des Women's Empowerment Principles début mars, BNP Paribas étant signataire. Des biais discriminatoires affectent de nombreux processus RH, d'où la nécessité d'auditer et de les adapter. Dans cette optique, nous sommes en train par exemple de mettre en place au service du recrutement, des entretiens structurés qui permettent d’éviter tout biais discriminatoire pendant un entretien, en ne laissant aucune place à la subjectivité. L’objectif est de trouver la parfaite adéquation – factuelle – entre les candidats et les postes à pourvoir. De manière générale, nous organisons également dans plusieurs entités des formations qui créent de véritables "électrochocs" et qui font prendre conscience aux collaborateurs de leurs propres stéréotypes, ce que nous pouvons appeler les "bugs du cerveau". Une personne qui discrimine le fait le plus souvent sans s’en rendre compte.

Décideurs. Quelles sont, selon vous, les caractéristiques du leadership au féminin ?

E. K.
Parler de leadership au féminin est déjà selon moi une forme de discrimination en soi. Il existe effectivement un style de leadership distinctif chez les femmes et les hommes mais il n'est pas inné, il est culturel. Il faut travailler sur un management "intelligent" : les bons managers sont ceux qui cultivent à la fois les qualités rationnelles (souvent dites "masculines") et les qualités émotionnelles (souvent dites "féminines"), qu'ils soient hommes ou femmes. Cela commence dès l’enfance, où tout individu devrait développer ces deux types d'intelligence, le QI et le QE. Les femmes doivent aujourd'hui cesser de s'autocensurer, de ne pas "oser ", et les hommes devraient nous aider à aller plus loin sur le sujet de l'Egalité. Tout le monde trouvera un intérêt à atteindre un équilibre et une parité dans l'entreprise.

* globale et locale

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