Année record pour le bureau de Paris mais aussi pour le cabinet au niveau mondial, 2021 a été l’occasion pour White & Case de s’illustrer sur des dossiers de place et d’intervenir sur des opérations toujours plus techniques et sophistiquées. Nathalie Nègre-Eveillard et Saam Golshani, associés, reviennent sur la force de la pluridisciplinarité d’une équipe ayant pour ambition de couvrir l’ensemble du spectre du private equity et au-delà.

Décideurs. 2021 a été un millésime exceptionnel pour l’écosystème du private equity, comment l’avez-vous vécu au sein de l’équipe ?

Nathalie Nègre-Eveillard. L’année 2021 a été remarquable pour le cabinet dans son ensemble et plus particulièrement pour notre pratique private equity. Il s’agit avant tout d’un effort collectif car notre équipe est aujourd’hui remarquablement bien constituée par sa taille mais aussi grâce à la variété des compétences et des segments couverts.

Notre développement est constant, Marc ­Petitier nous a notamment rejoints en fin d’année 2020 puis Xavier Petet en fin d’année 2021. Tous deux ont développé des expertises dans le domaine des infrastructures, qui complètent le précédent recrutement d’une équipe dotée d’une compétence reconnue sur les sous-jacents. 

Ces différentes arrivées expliquent l’abondance de dossiers en la matière. À titre d’exemple, nous sommes intervenus sur un dossier phare, début d’année 2022, en accompagnant Macquarie Asset Management, agissant au sein d’un consortium, dans le cadre de l’acquisition pour 2,5 milliards d’euros du spécialiste de l’énergie photovoltaïque, Reden Solar, auprès d’Infravia et Eurazeo. 

Saam Golshani. Aujourd’hui, notre positionnement pluridisciplinaire nous permet de couvrir tous les segments du private equity afin d’accompagner investisseurs financiers et corporates. En matière de SPAC, nous travaillons main dans la main avec l’équipe marchés de capitaux du cabinet. Cette stratégie nous a permis d’intervenir sur l’intégralité de ces opérations en France et nous travaillons actuellement sur plusieurs transactions de "de-SPACing". Nous avons notamment conseillé SPAC Pegasus Entrepreneurs, et ses sponsors Tikehau Capital et Financière Agache, lors de son de-SPACing avec FL Entertainment, groupe mondial de divertissement. Il s’agit du plus important de-SPACing jamais ­réalisé en Europe à ce jour.

Quant aux situations spéciales, nous apportons à la fois des compétences en matière de restructuring mais aussi un accompagnement des fonds au-delà de ce contexte. Nous avons d’ailleurs conseillé le premier actionnaire de Technicolor, le fonds Angelo ­Gordon, sur un projet d’émission d’obligations convertibles sophistiquées pour un montant total de 300 millions d’euros, dans le cadre du projet d’IPO de Technicolor Creative ­Studios (TCS).

Du côté de la tech, nous continuons de développer notre savoir-faire, notamment sur le segment "fast growth" en venture capital. Nous sommes d’ailleurs intervenus sur la quasi-totalité des investissements en growth de Goldman Sachs et de SoftBank en France. Ainsi, nous avons accompagné les levées de fonds les plus importantes qui ont récemment permis l’émergence de licornes en France.

C’est cette adjonction des différents talents et la manière dont l’équipe a été composée qui nous permet aujourd’hui de démultiplier notre force de frappe et une capacité d’intervention qui est probablement la plus large du marché.

"Nous sommes intervenus sur la quasi-totalité des investissements en growth de Goldman Sachs et de SoftBank en France" S. Golshani

L’année 2022 s’annonce plus délicate. Quelles grandes tendances de marché affectent les dossiers ?

S. G. Nous constatons actuellement un accroissement des difficultés pour structurer des financements bancaires de LBO. Cela s’explique à la fois par le conflit russo-ukrainien mais aussi par la remontée des taux. Le marché bancaire en est ralenti, y compris sur le large cap. Pour pallier le marché bancaire habituel au cours de ces opérations, le direct lending sur lequel nous sommes très présents et sur lequel nous allons continuer à nous renforcer est intéressant.

Pour autant, l’année 2022 n’atteindra pas les niveaux incroyables de 2020 et 2021 même si les acteurs du private equity sont favorisés par rapport aux corporates en matière d’investissement. Les stratégies de build-up seront affectées, car les sociétés en portefeuille vont être influencées par ce contexte de marché plus difficile.

Concernant l’investissement primaire, les fonds ont levé beaucoup d’argent et peuvent profiter de la situation actuelle pour mener des opérations. Seul bémol, ce financement sera plus cher et plus difficile à mettre en place.

N. N-E. Néanmoins, les dossiers ne sont pas du tout à l’arrêt et les mandats continuent d’arriver. En revanche, les process et les délais de transaction sont en train de s’étirer sensiblement pour les raisons mentionnées par Saam. Nous aurons donc un décalage probable avec des opérations qui se réaliseront sur la deuxième partie de l’année même si elles sont d’ores déjà bien entamées.

Par ailleurs, nous remarquons de plus en plus de situations complexes sur le retour de deals primaires. Nous l’avons notamment constaté lorsque nous sommes intervenus aux côtés du groupe Apave et de son actionnaire Gapave dans le cadre de l’investissement de PAI Partners dans le capital du groupe. Un dossier primaire particulièrement délicat avec un actionnariat associatif peu banal. Cette complexité se retrouve aussi sur les deals minoritaires. En effet, un certain nombre de fonds de place, qui traditionnellement se plaçaient uniquement sur des opérations en majoritaire, ont aujourd’hui levé des fonds pour se positionner sur des opportunités en minoritaire. 

"On remarque de plus en plus de situations complexes sur le retour de deals primaires" N. Nègre-Eveillard

Pour vos équipes, quels sont les défis du moment dans les opérations de private equity ?

N. N-E. La place grandissante du contrôle des investissements étrangers en a fait un élément incontournable dans la plupart des dossiers de M&A et de LBO. La tech, la santé, les infrastructures et, aujourd’hui plus que jamais, la sécurité et la souveraineté alimentaire deviennent des enjeux stratégiques.

Pour répondre aux besoins croissants du marché, nous avons récemment monté une équipe entièrement dédiée à cette pratique "FDI" ["Foreign Direct Investment", Ndlr] au niveau européen, pilotée depuis Paris par notre associé Orion Berg. Cela a une résonance toute particulière car aujourd’hui plusieurs fonds cherchent à s’équiper pour traiter ces sujets au niveau français et international.

S. G. En matière de LBO, la jurisprudence du Conseil d’État en matière de management packages rend ces opérations plus sensibles. On le voit notamment avec la décision rendue dans le dossier ­Wendel-Editis qui requalifie en salaires le produit de cession des titres que détenait un dirigeant. Sur ce sujet, nous avons travaillé pour adapter la position du cabinet afin d’apporter à nos clients une sécurité juridique grâce à des mécanismes qui permettent d’aligner les intérêts du management et des investisseurs.

"La place grandissante du contrôle des investissements étrangers en a fait un élément incontournable dans la plupart des dossiers de M&A et de LBO" N. Nègre-Eveillard

Les niveaux de valorisation observés au cours de cette période sont-ils vraiment raisonnables ?

S. G. Dans un contexte de quantitative ­easing et de fortes liquidités sur le marché, l’argent est fléché dans la valeur des actifs. Nous ne sommes pas en train de revivre l’effet de la bulle Internet. Si les valorisations sont importantes, c’est que la compétition entre les acheteurs est forte et que le rationnel, au-delà des business plans, n’est pas décorrélé de la réalité. De plus, on voit bien que les leviers ne sont pas ­extraordinairement agressifs. 

N. N-E. Il y aura peut-être un point d’attention sur les sorties de cette année. Ce sera l’occasion de s’interroger sur les raisons des belles performances des entreprises. Sont-elles conditionnées par un secteur porteur et résilient ou doivent-elles être normalisées pour les analyser de manière plus pérenne, c’est-à-dire sans tenir compte des effets positifs du Covid ?

"En matière de LBO, la jurisprudence du conseil d’État concernant les management packages rend ces opérations plus sensibles" S. Golshani

Quels sont les projets de développement de l’équipe ?

S. G. Nous avons beaucoup d’ambition et donc de projets dans les cartons ou déjà bien avancés. Évidemment, nous souhaitons poursuivre le renforcement de toutes les équipes du bureau de Paris et plus particulièrement en matière de private equity, nous allons continuer notre dynamique de croissance avec l’arrivée d’associés pour couvrir encore plus le champ des possibles. Cette pluridisciplinarité fait notre force aujourd’hui et nous devons toujours chercher à la parfaire au gré des tendances, et des problématiques et besoins spécifiques de notre clientèle.

Propos recueillis par Béatrice Constans

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