À la tête de la direction M&A de Doctolib, plateforme incontournable de la "start-up nation", Mathieu Gattaz, issu d’une famille d’entrepreneurs, combine la veine de l’entrepreneuriat familial avec l’énergie d’un startupper. Du département tech de Morgan Stanley à la direction M&A de Doctolib, retour sur la carrière d’un fonceur.

Le débit rapide, plus à l’aise avec le tutoiement, on le rencontre à l’occasion d’une visio sur Teams où il est devenu si pratique d’échanger. Très vite, on comprend que Mathieu Gattaz aime l’action et n’a pas peur de prendre des risques, dans sa carrière comme pour un deal. Mais pas de place à l’erreur pour celui qui a passé onze ans en banque d’affaires, dont plus de la moitié chez Morgan Stanley en tant que directeur au sein du département Tech, « L’une des meilleures équipes Tech de banque d’affaires au monde », précise-t-il. Né dans une famille d’entrepreneurs, l’actuel directeur M&A de Doctolib, qui siège également au conseil d’administration de Radiall, – dont l’actuel PDG n’est autre que Pierre Gattaz – a pensé son parcours comme un deal M&A, avec exigence et ambition.

"un Français qui va à Amsterdam, c’est plus original qu’un Français qui va à Londres"

Se démarquer à l’étranger

Diplômé -entre autres- de la Toulouse Business School, il précise "il n’est pas standard de sortir de ce type d’école d’avoir mon parcours". Très tôt il privilégie "l’ancrage des entreprises dans l’économie réelle ", et choisit de se tourner vers la finance d’entreprise plutôt que celle de marché. Il s’oriente d’emblée vers la banque d’investissement, un environnement réputé exigeant avec ses débutants. Soucieux de se démarquer, ce n’est pas en France ou à Londres qu’il décide de postuler mais aux Pays-Bas. Il insiste "un Français qui va à Amsterdam, c’est plus original qu’un Français qui va à Londres". Mathieu Gattaz commence alors comme analyste M&A chez RBS Global Banking, où il vivra un deal de l’intérieur à l’occasion du rachat de la banque d’investissement par ABN AMRO. Au bout de 4 ans, toujours porté par l’ambition d’aller plus loin, il part à Londres pour rejoindre le Graal de la banque d’affaires, Morgan Stanley. Dans le cadre d’une évolution de poste, il choisit le département Tech plutôt que la direction régionale du Benelux. Un choix audacieux, mais l’époque est propice au secteur ; en 2017, la tech explose en Europe. Après 4 ans à œuvrer côté conseil, il souhaitait « connaître autre chose que la banque d’affaires » et surtout, pour cet entrepreneur dans l’âme, "voir l’avènement de la tech de l’intérieur". Pragmatique, il sait que les postes de direction en M&A sont rares et chers "Il y a une centaine de postes en France avec peu de rotation, et souvent des évolutions internes".

"En M&A, on peut être le plus brillant des financiers, mais sans empathie, on ne rachète pas une boîte "

Doctoliber

Pourtant, il ne se décourage pas. En janvier 2021, lorsqu’il apprend qu’un poste s’ouvre chez Doctolib, et qu’il s’apprête à candidater, il reçoit un mail le matin même. Le chasseur de tête de la start-up souhaite le rencontrer. Devenu un véritable "Doctoliber" comme sont surnommés les collaborateurs de la société, Mathieu Gattaz se rappelle à l’époque de la réputation de la plateforme au-delà des frontières de l’Hexagone : "En étant Français, c’était difficile de passer à côté du succès de Doctolib, même en vivant à l’étranger." À cela s’ajoutait "la mission extraordinaire de la société de changer la vie des praticiens et des patients avec la technologie" en plus d’un "super fit avec l’équipe et le CFO ". En avril 2021, Mathieu Gattaz prend les rênes de la direction M&A de Doctolib. Depuis, la start-up valorisée 5,8 milliards d’euros a réalisé une dizaine de transactions sous sa direction, dont la société néerlandaise Siilo,  l’allemande Aaron.AI et la suisse Typeless. Interrogé sur les qualités indispensables en M&A, il dresse sa liste sans hésiter : "Beaucoup d’humilité, ne pas avoir peur de prendre des risques, disposer d’indispensables compétences techniques et de beaucoup d’empathie".

Véritable chef de file, Mathieu Gattaz prône une approche hyperactive et humaine du métier : "En M&A, on peut être le plus brillant des financiers, mais sans empathie, on ne rachète pas une boîte. Nous avons une fonction proche des dirigeants, nous sommes au cœur de la machine entrepreneuriale, il est indispensable de maîtriser les aspects opérationnels et financiers, mais malgré tout, si on ne se pousse pas à l’action on ne fait pas de deal". À l’évocation de ses meilleurs souvenirs, il retient les célébrations en équipe, dont celle d’un trophée interne remporté par la direction M&A à l’occasion de la dernière levée de fonds de Doctolib, et quand tous ses collaborateurs lui ont récemment fêté ses quarante ans. Un sens du collectif qu’on retrouve dans ses passions : "Mon hobby, c’est ma famille et mes amis.". Il est également adepte des grandes compétitions sportives. Autant de moments de moments de convivialité qui lui sont chers, et où, comme en M&A, la victoire s’écrit en équipe.  

 

Parcours : 

  • 2005 : diplômé de TBS
  • 2010 : arrive à Amsterdam comme analyste M&A chez RBS Global Banking, avant le rachat par ABN AMRO
  • 2014 : intègre Morgan Stanley à Londres d’abord en tant qu’associé M&A et gravit les échelons jusqu’à la direction exécutive du département tech.
  • 2014 : devient membre du board de Radiall ou il siège encore aujourd’hui
  • 2021 : rejoint la France et prend la tête du M&A de Doctolib

 

 

Céline Toni