Fin décembre, la biotech nantaise annonçait que son médicament, le XAV-19, restait efficace contre le virus Omicron. Si sa production a déjà commencé, il doit encore obtenir les autorisations de la part des autorités sanitaires afin d’être distribué dans les hôpitaux. Un vrai parcours du combattant.

En juin 2020, nous échangions pour la première fois avec Odile Duvaux, présidente de Xenothera. À l’époque, la biotech nantaise qui avait obtenu un financement public, lançait des essais cliniques sur un médicament qu’elle avait dans ses cartons et pensait efficace contre la Covid-19. Depuis, les obstacles, mais aussi les victoires, s’enchaînent. Les sujets de frustrations ? Le temps pour valider les essais cliniques. "On devait finir mi-2021. On a pris un an de retard", déplore Odile Duvaux. En cause, la taille de son entreprise qui ne peut pas peser à coups de millions sur des essais qui nécessitent un grand nombre de volontaires et une grande réactivité des laboratoires.

Un traitement français

La biotech doit également convaincre des autorités qui, elles-mêmes, composent avec "le tapis roulant de la connaissance", comme l’appelle Odile Duvaux. "Des variants apparaissent, la compréhension de la maladie évolue, des traitements qui semblaient efficaces ne le sont plus, une partie des gens sont vaccinés, etc." Tout cela demande aux autorités de se montrer agiles et de donner la priorité à certains dossiers. Sans revoir pour autant à la baisse leur niveau d’exigence. "Tout le monde sait que les autorités françaises sont parmi les plus dures au monde. Si elles valident notre traitement cela nous ouvrira naturellement les portes d’autres pays, souligne Odile Duvaux, pour qui le choix de passer par une validation hexagonale était évident. C’est une question de loyauté, la France nous a soutenus dans notre financement et les essais cliniques ont lieu en France." Si le pays venait à ne pas donner son aval, Xenothera pourrait néanmoins se tourner vers le Royaume-Uni ou les États-Unis, qui sollicitent fortement la biotech et sont connus pour avoir une balance risques-bénéfices parfois plus pragmatique.

"Tout le monde sait que les autorités sanitaires françaises sont parmi les plus dures au monde"

Xenothera tente d’obtenir l’AMM (autorisation de mise sur le marché) auprès des autorités européennes et œuvre en parallèle sur l’industrialisation de son médicament, le XAV-19. "C’est un travail de fond, qui est déjà bien avancé. Le but étant de raccourcir les délais de production." Lesquels sont de plusieurs semaines. Pour le moment, Xenothera affiche 26 000 doses en stock produites dans l’Hexagone sur les 30 000 commandées par le gouvernement français. Un nombre qui devrait couvrir entre six et 12 mois les besoins du pays pour ce médicament, baptisé le XAV-19.

Éthique et valeurs

Ce traitement par anticorps polyclonaux s’adresse aux patients infectés par le virus depuis six à neuf jours et qui passent à un stade d’aggravation. Soit une petite partie des personnes positive à la Covid et pour lesquelles l’équilibre risques/bénéfices est assuré. "L’utilisation d’un médicament doit être justifiée éthiquement. La plupart des personnes vont générer leurs propres anticorps. On ne leur en donne pas en prévention du risque d’aggravation qui ne concerne que 1 % à 5 % des patients touchés." Et, bonne nouvelle, XAV-19 reste efficace face à Omicron !

La Biotech a également signé un protocole d’accord avec le conglomérat vietnamien Vingroup en vue de la commercialisation de son traitement. Pourquoi le Vietnam ? Au-delà de l’implication du gouvernement local sur le sujet, Xenothera rappelle vouloir partager sa production entre les pays à faibles revenus et les pays les plus riches. Question de valeurs.

Et pour ce qui est de la rentabilité du médicament ? Depuis sa création en 2014, Xenothera s’est financée à hauteur de 30 millions d’euros en equity et a perçu 10 millions de fonds publics. La biotech rappelle que ce sont les autorités sanitaires qui avancent un tarif pour les médicaments. "Elles proposent un prix calculé en fonction du service médical rendu, explique Odile Duvaux. Plus le médicament va permettre de réduire les dépenses de santé, plus le tarif proposé peut-être élevé." Mais d’ajouter : "On a fait des simulations et on maîtrise nos prix de revient. Notre but néanmoins reste de soigner les gens, pas de faire des milliards de profits." Reste à connaître l’éventuelle date de mise sur le marché du XAV-19.

Olivia Vignaud

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