Alors que les impératifs extra-financiers pèsent de plus en plus, les sociétés peinent à réagir. Joséphine Simeray, directrice conseil du RaiseLab, une structure de conseil aux entreprises, présente les partenariats entre grands groupes et start-up comme autant de leviers de croissance.

Comment le contexte sociétal et environnemental influe-t-il sur les entreprises ? 

Les entreprises sont pressurisées par le haut comme par le bas. Il leur incombe d’élaborer des moyens de production plus simples, avec plus de transparence et des composés différents. Elles ne peuvent plus se permettre de "greenwasher". Cela prévaut autant pour les consommateurs, la réputation de l’entreprise, que pour les employés, pour qui,  en matière de captation et de rétention de talents, c’est devenu impensable.

"[Les entreprises] ne peuvent plus se permettre de "greenwasher""

Le contexte se transpose dans la réglementation de tous les secteurs. Les lois Agec "Anti-gaspillage pour une économie circulaire" interdisent les emballages plastiques dans le domaine de la restauration. Tout un secteur doit se mettre en conformité et s’affranchir de pratiques quotidiennes. Au cours d’une de nos missions, nous avons assisté un groupe aéroportuaire dans une mission de remplacement des sachets en plastique. Il s’agissait de sélectionner les technologies les plus pertinentes à introduire sur le terrain et au plus tôt les déployer à l’échelle des aéroports.

De quelle manière les partenariats entre grands groupes et start-up ont-ils évolué ?

Alors que les impératifs augmentent en matière environnementale, sociétale ou encore socio-économique, même les plus grandes entreprises cessent de croire à leur auto-suffisance. Elles doivent prendre l’habitude d’identifier sur la chaîne de valeur les points de tension du marché, et comprendre les problématiques dans les usages des consommateurs finaux afin d’y apporter des solutions.

Les start-up, quant à elles, ont toujours eu conscience de la nécessité de recourir à des acteurs extérieurs pour passer à l’échelle et s’imposer sur le marché. Pour les grands groupes, cela n’a pas toujours été le cas. Il y a quelques années, s’adosser à un incubateur de jeunes pousses impliquait moins un engagement qu’une initiative pour bien se faire voir. Chez les acteurs traditionnels du marché, les états d’esprit changent. Depuis la pandémie, les start-up ne sont plus perçues comme des terrains de jeux pour s’essayer à des projets sans lendemain. Les grands groupes ont pris conscience qu’il leur revient de chercher des éléments de réponse auprès d’acteurs innovants. Les directions de l’innovation en particulier veulent capitaliser sur ces rencontres.

Le cabinet de conseil RaiseLab facilite la création d’alliances stratégiques. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Pour se transformer, les grands groupes et les ETI ont besoin de chercher en externe des ressources nouvelles. Nous identifions les start-up les plus pertinentes en fonction des problématiques. Nous nous occupons des rouages de la mise en relation jusqu’à la contractualisation des partenariats. Il faut définir les objectifs, puis, en déterminer la cohérence. Comment construire ce projet, la feuille de route, les indicateurs de résultats et enfin, les contrats d’alliance entre les parties prenantes ?

Dans cette gestion de projet très complexe, nous avons à cœur d’échanger avec le plus grand nombre de parties, afin de soutenir au mieux le déploiement et la pérennité de l’initiative. Si notre premier interlocuteur est souvent la direction de l’innovation, nous échangeons avec les directions IT, achats, juridique, afin de cerner toutes les notions budgétaires et de propriété intellectuelle.

De quelle manière ces impératifs environnementaux influent-ils sur l’accompagnement de RaiseLab ?

Nous suivons en ce moment un sujet relatif à une filière de recyclage de produits cosmétiques invendus. En l’occurrence, il faut non seulement créer une filière là où il manque des acteurs mais aussi en comprendre les coûts associés. Sous ces prismes écologique et climatique, les entreprises vont chercher des solutions rationnelles, économiquement viables. Nous conseillons également l’incubateur Green Sciences du Groupe L’Oréal, dans la mise en place de technologies disruptives qui favorisent la recherche autour de matières premières plus respectueuses de l’environnement et du consommateur final.

"En 2022, 60% des projets traités par RaiseLab ont été directement liés à l’un des objectifs de développement durable définis par l’ONU"

Il y a urgence à faire différemment. En 2022, 60% des projets traités par RaiseLab ont été directement liés à l’un des objectifs de développement durable définis par l’ONU. Relever ces défis exige d’aller plus loin et de nouer des partenariats pour y répondre de manière plus efficace, rapide et pertinente.

Pourriez-vous nous donner un exemple d’accompagnement dans le domaine de la santé ?

Dans le domaine de la santé, nous accompagnons le laboratoire pharmaceutique Chiesi sur son programme WeStart2, dont le partenariat avec une start-up participe à la digitalisation du parcours de soins. La numérisation d’informations sensibles facilite une meilleure anticipation de la part des professionnels en plus de favoriser les interactions avec eux. Si ce partenariat bénéficie en premier lieu aux patients atteints de maladies respiratoires, nous appelons de nos vœux qu’il gagne en ampleur pour inclure des patients sur toute aire thérapeutique.


Quelles tendances envisagez-vous pour les prochains mois ? 

La notion d’impact va grandissante. Les préoccupations en la matière, et le nombre de projets connexes, ne vont qu’augmenter. Ces alliances sont l’occasion de faire différemment, de faire mieux et plus vertueusement. De plus en plus, les entreprises d’envergure prennent conscience que s’allier avec une start-up peut constituer un véritable levier de croissance. RaiseLab se focalise sur ce sujet pour maximiser les chances de réussite des projets. De telle sorte que ces alliances deviennent des réponses à des enjeux stratégiques d’aujourd’hui et de demain.

Propos recueillis par Alexandra Bui

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