Les scandales touchant à la vie privée de François Hollande et le sort réservé à des femmes ministres laissent planer l’idée d’une possible sanction du Président par l’électorat féminin. Enquête.
Les femmes et le Président
« Trompeurs, c'est à vous que j'écris : Attendez-vous à la pareille. » Ce n’est pas la lettre d’un corbeau ou d’une Cassandre, mais bien la morale du Renard et la Cigogne. Dans cette fable de La Fontaine, reprise d’Ésope, tel est pris qui croyait prendre. Et c’est le renard qui rentre « portant bas l’oreille ».
Des tromperies, des coucheries, des mensonges, mais aussi des disputes, des limogeages… tout cela pourrait être au choix le cadre d’une mauvaise rubrique « courrier des lecteurs », d’un piètre Feydeau ou les « coulisses d’un vaudeville d’État ». C’est ainsi qu’Élise Karlin, journaliste à L’Express, sous-titre son ouvrage Le Président qui voulait vivre ses vies (Fayard), récit de la coexistence difficile entre le domaine privé de François Hollande et son action publique.
Il faut dire que si l’on adjoint à son bilan une ancienne compagne présente dans son gouvernement, une ex-première dame prolifique et une maîtresse sous les feux des projecteurs, le président de la République paraît tendre lui-même le bâton pour se faire battre. Il n’y a qu’à lire la bande dessinée Hollande et ses deux femmes de Renaud Dély et Aurel (Glénat), ainsi que les dizaines d’ouvrages qui y sont consacrés, pour se rendre compte à quel point le chef de l’État entretient un rapport pour le moins singulier avec les femmes.
Que pensent-elles de lui ? Ont-elles confiance ou lui en veulent-elles pour ses dérapages ? Doit-il craindre de leur part une sanction en 2017 ? Autant de questions qui animent déjà communicants et spin doctors prêts à insuffler au Président les éléments de langage et les gestes à l’adresse du sexe dit faible.
« Comportement en chaque instant exemplaire »
Retour en mai 2012. Plus précisément durant le débat de l’entre-deux-tours lorsque le candidat socialiste lâche sa célèbre anaphore. À la sixième répétition, il se lance : « Moi Président, je ferai en sorte que mon comportement soit en chaque instant exemplaire. » Quelques jours plus tard, le 16, il nomme le premier gouvernement paritaire de la Ve République : dix-sept femmes à la tête de responsabilités diverses. Comme en écho au tout premier ministère des Droits de la femme d’Yvette Roudy sous la présidence de François Mitterrand.
Durant sa campagne, François Hollande avait avancé quarante engagements pour garantir les droits des femmes et transformer la société vers plus d’égalité. À peine élu, il signe le pacte pour l’égalité, reprend l’idée d’un ministère du Droit des femmes et programme la panthéonisation de Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle-Anthonioz.
Sphère privée et action publique
Deux ans et demi plus tard, en janvier 2014, le magazine people Closer publie des photographies confirmant les rumeurs autour de la relation du président de la République et de l’actrice Julie Gayet. La sphère privée est touchée. « François Hollande est condamné à voir son intimité déballée, sa rupture étalée, sa nouvelle vie commentée chapitre après chapitre. Lui si sévère à l’égard de l’exhibitionnisme sentimental de son prédécesseur restera dans les mémoires pour une histoire de cœur, de casque intégral, de chaussures cirées et de dérobades à scooter », écrit Élise Karlin.
Valérie Trierweiler, qui occupe alors le rôle de première dame, quitte le Château. Elle tirera de cet épisode un pamphlet intitulé Merci pour ce moment (Les Arènes) au succès retentissant.
L’action publique n’est pas non plus épargnée. À quelques mois d’intervalle, deux femmes se retirent – volontairement ou non – du gouvernement. Delphine Batho, tout d’abord, qui sous Jean-Marc Ayrault perd son portefeuille de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie en juillet 2013. Puis Cécile Duflot, ministre du Logement et de l'Égalité des territoires, à l’arrivée de Manuel Valls à Matignon. L’Élysée en sera quitte pour deux nouveaux opus : Insoumise (Grasset) pour la première et De l'intérieur, voyage au pays de la désillusion (Fayard) pour la seconde. Succès éditoriaux là encore.
Delphine Batho n’est pas tendre. Elle dénonce « l’injustice » de sa mise à l’écart. Elle ne doit d’être congédiée qu’à sa remise en cause de « l’autorité » du Premier ministre. Il la limogera, une simple « formalité imposée par le président de la République ». La ministre a beau se défendre d’être « une petite fille » qui ignore les « quelques relents de sexisme ultra-minoritaires », c’est trop tard. Elle a défié les hommes du gouvernement. Ces « machos », comme l’admet Daniel Cohn-Bendit. Sans doute les mêmes qui avaient émis des caquètements de poule à la prise de parole dans l’hémicycle de Véronique Massonneau, députée EELV de la Vienne.
Cécile Duflot n’est pas plus accommodante. La parité dans le gouvernement ? « Le gouvernement était paritaire, mais les réunions restreintes, les plus importantes politiquement, étaient la plupart du temps exclusivement masculines.» Dans les cabinets ? « Les directeurs étaient la plupart du temps des hommes et les cabinets étaient loin d’être paritaires. » Peut-on être une femme en politique ? « On a assigné celles qui font de la politique à deux rôles : la jolie potiche souriante ou celle qui adopte les codes masculins, cheveux courts, tailleurs gris et visage fermé ! Je suis une mère de famille nombreuse, pas mince et en plus écolo. »
Faveur et défaveur des femmes
Du côté des citoyens, les chiffres varient peu selon les instituts de sondage. La plupart s’accordent à remarquer qu’en 2012, au premier tour de la présidentielle, François Hollande n’a reçu davantage de votes favorables de la part des femmes que dans une mesure limitée : 30,2 % contre 27 % pour les hommes. Au second tour, seulement un point sépare le vote masculin (51 %) du vote féminin (52 %). Le survote féminin, même s’il est léger, l’emporte. Au même moment, sur les dix candidats à la magistrature suprême, une réduction nette du clivage entre les genres est confirmée, exception faite d’un sous-vote féminin à l’adresse de Marine Le Pen, alors que leur défiance à l’égard de la politique est légèrement plus importante, en raison d’un pragmatisme et de peurs plus marqués.
Durant les deux premiers mois de son mandat, la popularité de François Hollande se maintient. « Le Président oscille entre 61 % et 63 % chez les hommes et 59 % et 57 % chez les femmes », constate Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d’entreprise à l’Ifop. Deux ans plus tard, en octobre 2014, elle sombre à 15 % chez les hommes et 14 % chez les femmes. Elle perd d’ailleurs cinq points chez ces derniers et trois chez les femmes après l’épisode du livre de Valérie Trierweiler. Des données qui se confirment avec la dernière étude de l’institut de sondage : 15 % de popularité chez les hommes et 14 % chez les femmes. « Les chiffres sont vraiment très proches », constate Frédéric Dabi, son directeur général adjoint.
Aucun décrochage féminin
On retrouve quasiment le même écho lorsqu’on ressort les cotes de confiance du Président : d’un à quatre points maximum d’écart entre les deux sexes pour BVA Opinion. L’affaire Gayet et l’ouvrage de Valérie Trierweiler ne changent pas la donne : un ou deux points d’écart seulement. En somme, aucun décrochage féminin à proprement parler. « Le rapport de François Hollande aux femmes n’a pas d’incidence visible dans nos baromètres », résume Emmanuel Rivière, directeur de la business team stratégies d'opinion de TNS Sofres. Comment expliquer pareil phénomène ?
Réponse d’Éric Bonnet, directeur des études politiques de BVA Opinion : « On ne juge pas différemment le président de la République et son action selon que l’on est un homme ou une femme, pour la simple raison qu’on ne "genre" pas le vote. Ajoutons également qu’en France, à la différence des pays anglo-saxons, on ne juge pas la personne privée mais l’élu. » « Le caractère politique prime le caractère privé », surenchérit Jean-Daniel Lévy, directeur du département opinion d’Harris Interactive.
Pas de conséquence sur le vote des femmes
En mai 2011, c’est une autre affaire brûlante qui éclate : le scandale DSK. Et qui pose la question de l’enjeu électoral féminin.
Les politologues Réjane Sénac et Maxime Parodi résumeront* ainsi la situation : « La publicisation de l’égalité femmes-hommes comme enjeu politique (…) est à éclairer par le croisement d’un contexte particulier, celui du renouveau du féminisme dans le cadre d’une crise économique mondiale, de la mise en examen de Dominique Strauss-Kahn et Georges Tron pour agression sexuelle et tentative de viol, et du moment électoral présidentiel. »
Aussi étonnant que cela puisse paraître, la révélation des frasques et abus sexuels du directeur du FMI n’a pas entraîné de sur-réaction chez les femmes. La sanction à son endroit fut d’égale violence chez les femmes et chez les hommes. Son actuelle cote d’avenir le confirme : 23 % chez les hommes et 24 % chez les femmes (TNS Sofres) souhaitent le voir jouer un rôle !
Ainsi, les scandales n’auraient ainsi pas de conséquence sur le vote des femmes. Janine Mossuz-Lavau, directrice de recherche CNRS au Cevipof (Sciences-Po) est très claire : « Si elles s’y intéressent, elles ne s’y attardent pas. Et, à la différence du chômage par exemple, cela n’a pas d’influence. »
De là à penser que les femmes sont insensibles aux dérapages des représentants publics, il y a un pas à ne pas franchir. L’automne 2012 et ses nombreux couacs, la conférence de presse de mai 2013 et l’affaire Cahuzac ont entraîné un décrochage féminin, sans doute davantage dû à des éléments comme celui d’une autorité remise en question, comme avec le tweet du 12 juin 2012 de Valérie Trierweiler en soutien à Olivier Falorni. « En France, l’autorité a du succès, comme en témoigne la popularité de personnalités telles que Nicolas Sarkozy, Alain Juppé ou Laurent Fabius. Mais cette attente d’autorité est autant partagée par les hommes que par les femmes », explique Jean-Daniel Lévy.
Une image perturbée
Reste que ces événements ont bien un impact sur l’image du Président. Entre 2000 et 2012, François Hollande est régulièrement apparu comme « sympathique » et « proche des gens ». Mais les photographies dans Closer sont venus altérer son image. « Plus que la compassion pour Valérie Trierweiler, c’est l’égoïsme de François Hollande qui joué en sa défaveur », commente le directeur du département opinion de Harris Interactive. L’Ifop, de son côté, rapporte que pas moins de sept points d’écart distinguaient les deux sexes en janvier dernier sur la question de l’image sympathique du Président. Preuve que dans l’imaginaire féminin, le Président socialiste n’est plus si « exemplaire ».
Julien Beauhaire
Lire également : Comment votent les femmes ?
* Gender gap à la française : recomposition ou dépassement lors de l’élection présidentielle de 2012, Revue française de science politique, Presses de Sciences Po (2013/2, Vol. 63, pp. 225-248)
Des tromperies, des coucheries, des mensonges, mais aussi des disputes, des limogeages… tout cela pourrait être au choix le cadre d’une mauvaise rubrique « courrier des lecteurs », d’un piètre Feydeau ou les « coulisses d’un vaudeville d’État ». C’est ainsi qu’Élise Karlin, journaliste à L’Express, sous-titre son ouvrage Le Président qui voulait vivre ses vies (Fayard), récit de la coexistence difficile entre le domaine privé de François Hollande et son action publique.
Il faut dire que si l’on adjoint à son bilan une ancienne compagne présente dans son gouvernement, une ex-première dame prolifique et une maîtresse sous les feux des projecteurs, le président de la République paraît tendre lui-même le bâton pour se faire battre. Il n’y a qu’à lire la bande dessinée Hollande et ses deux femmes de Renaud Dély et Aurel (Glénat), ainsi que les dizaines d’ouvrages qui y sont consacrés, pour se rendre compte à quel point le chef de l’État entretient un rapport pour le moins singulier avec les femmes.
Que pensent-elles de lui ? Ont-elles confiance ou lui en veulent-elles pour ses dérapages ? Doit-il craindre de leur part une sanction en 2017 ? Autant de questions qui animent déjà communicants et spin doctors prêts à insuffler au Président les éléments de langage et les gestes à l’adresse du sexe dit faible.
« Comportement en chaque instant exemplaire »
Retour en mai 2012. Plus précisément durant le débat de l’entre-deux-tours lorsque le candidat socialiste lâche sa célèbre anaphore. À la sixième répétition, il se lance : « Moi Président, je ferai en sorte que mon comportement soit en chaque instant exemplaire. » Quelques jours plus tard, le 16, il nomme le premier gouvernement paritaire de la Ve République : dix-sept femmes à la tête de responsabilités diverses. Comme en écho au tout premier ministère des Droits de la femme d’Yvette Roudy sous la présidence de François Mitterrand.
Durant sa campagne, François Hollande avait avancé quarante engagements pour garantir les droits des femmes et transformer la société vers plus d’égalité. À peine élu, il signe le pacte pour l’égalité, reprend l’idée d’un ministère du Droit des femmes et programme la panthéonisation de Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle-Anthonioz.
Sphère privée et action publique
Deux ans et demi plus tard, en janvier 2014, le magazine people Closer publie des photographies confirmant les rumeurs autour de la relation du président de la République et de l’actrice Julie Gayet. La sphère privée est touchée. « François Hollande est condamné à voir son intimité déballée, sa rupture étalée, sa nouvelle vie commentée chapitre après chapitre. Lui si sévère à l’égard de l’exhibitionnisme sentimental de son prédécesseur restera dans les mémoires pour une histoire de cœur, de casque intégral, de chaussures cirées et de dérobades à scooter », écrit Élise Karlin.
Valérie Trierweiler, qui occupe alors le rôle de première dame, quitte le Château. Elle tirera de cet épisode un pamphlet intitulé Merci pour ce moment (Les Arènes) au succès retentissant.
L’action publique n’est pas non plus épargnée. À quelques mois d’intervalle, deux femmes se retirent – volontairement ou non – du gouvernement. Delphine Batho, tout d’abord, qui sous Jean-Marc Ayrault perd son portefeuille de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie en juillet 2013. Puis Cécile Duflot, ministre du Logement et de l'Égalité des territoires, à l’arrivée de Manuel Valls à Matignon. L’Élysée en sera quitte pour deux nouveaux opus : Insoumise (Grasset) pour la première et De l'intérieur, voyage au pays de la désillusion (Fayard) pour la seconde. Succès éditoriaux là encore.
Delphine Batho n’est pas tendre. Elle dénonce « l’injustice » de sa mise à l’écart. Elle ne doit d’être congédiée qu’à sa remise en cause de « l’autorité » du Premier ministre. Il la limogera, une simple « formalité imposée par le président de la République ». La ministre a beau se défendre d’être « une petite fille » qui ignore les « quelques relents de sexisme ultra-minoritaires », c’est trop tard. Elle a défié les hommes du gouvernement. Ces « machos », comme l’admet Daniel Cohn-Bendit. Sans doute les mêmes qui avaient émis des caquètements de poule à la prise de parole dans l’hémicycle de Véronique Massonneau, députée EELV de la Vienne.
Cécile Duflot n’est pas plus accommodante. La parité dans le gouvernement ? « Le gouvernement était paritaire, mais les réunions restreintes, les plus importantes politiquement, étaient la plupart du temps exclusivement masculines.» Dans les cabinets ? « Les directeurs étaient la plupart du temps des hommes et les cabinets étaient loin d’être paritaires. » Peut-on être une femme en politique ? « On a assigné celles qui font de la politique à deux rôles : la jolie potiche souriante ou celle qui adopte les codes masculins, cheveux courts, tailleurs gris et visage fermé ! Je suis une mère de famille nombreuse, pas mince et en plus écolo. »
Faveur et défaveur des femmes
Du côté des citoyens, les chiffres varient peu selon les instituts de sondage. La plupart s’accordent à remarquer qu’en 2012, au premier tour de la présidentielle, François Hollande n’a reçu davantage de votes favorables de la part des femmes que dans une mesure limitée : 30,2 % contre 27 % pour les hommes. Au second tour, seulement un point sépare le vote masculin (51 %) du vote féminin (52 %). Le survote féminin, même s’il est léger, l’emporte. Au même moment, sur les dix candidats à la magistrature suprême, une réduction nette du clivage entre les genres est confirmée, exception faite d’un sous-vote féminin à l’adresse de Marine Le Pen, alors que leur défiance à l’égard de la politique est légèrement plus importante, en raison d’un pragmatisme et de peurs plus marqués.
Durant les deux premiers mois de son mandat, la popularité de François Hollande se maintient. « Le Président oscille entre 61 % et 63 % chez les hommes et 59 % et 57 % chez les femmes », constate Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d’entreprise à l’Ifop. Deux ans plus tard, en octobre 2014, elle sombre à 15 % chez les hommes et 14 % chez les femmes. Elle perd d’ailleurs cinq points chez ces derniers et trois chez les femmes après l’épisode du livre de Valérie Trierweiler. Des données qui se confirment avec la dernière étude de l’institut de sondage : 15 % de popularité chez les hommes et 14 % chez les femmes. « Les chiffres sont vraiment très proches », constate Frédéric Dabi, son directeur général adjoint.
Aucun décrochage féminin
On retrouve quasiment le même écho lorsqu’on ressort les cotes de confiance du Président : d’un à quatre points maximum d’écart entre les deux sexes pour BVA Opinion. L’affaire Gayet et l’ouvrage de Valérie Trierweiler ne changent pas la donne : un ou deux points d’écart seulement. En somme, aucun décrochage féminin à proprement parler. « Le rapport de François Hollande aux femmes n’a pas d’incidence visible dans nos baromètres », résume Emmanuel Rivière, directeur de la business team stratégies d'opinion de TNS Sofres. Comment expliquer pareil phénomène ?
Réponse d’Éric Bonnet, directeur des études politiques de BVA Opinion : « On ne juge pas différemment le président de la République et son action selon que l’on est un homme ou une femme, pour la simple raison qu’on ne "genre" pas le vote. Ajoutons également qu’en France, à la différence des pays anglo-saxons, on ne juge pas la personne privée mais l’élu. » « Le caractère politique prime le caractère privé », surenchérit Jean-Daniel Lévy, directeur du département opinion d’Harris Interactive.
Pas de conséquence sur le vote des femmes
En mai 2011, c’est une autre affaire brûlante qui éclate : le scandale DSK. Et qui pose la question de l’enjeu électoral féminin.
Les politologues Réjane Sénac et Maxime Parodi résumeront* ainsi la situation : « La publicisation de l’égalité femmes-hommes comme enjeu politique (…) est à éclairer par le croisement d’un contexte particulier, celui du renouveau du féminisme dans le cadre d’une crise économique mondiale, de la mise en examen de Dominique Strauss-Kahn et Georges Tron pour agression sexuelle et tentative de viol, et du moment électoral présidentiel. »
Aussi étonnant que cela puisse paraître, la révélation des frasques et abus sexuels du directeur du FMI n’a pas entraîné de sur-réaction chez les femmes. La sanction à son endroit fut d’égale violence chez les femmes et chez les hommes. Son actuelle cote d’avenir le confirme : 23 % chez les hommes et 24 % chez les femmes (TNS Sofres) souhaitent le voir jouer un rôle !
Ainsi, les scandales n’auraient ainsi pas de conséquence sur le vote des femmes. Janine Mossuz-Lavau, directrice de recherche CNRS au Cevipof (Sciences-Po) est très claire : « Si elles s’y intéressent, elles ne s’y attardent pas. Et, à la différence du chômage par exemple, cela n’a pas d’influence. »
De là à penser que les femmes sont insensibles aux dérapages des représentants publics, il y a un pas à ne pas franchir. L’automne 2012 et ses nombreux couacs, la conférence de presse de mai 2013 et l’affaire Cahuzac ont entraîné un décrochage féminin, sans doute davantage dû à des éléments comme celui d’une autorité remise en question, comme avec le tweet du 12 juin 2012 de Valérie Trierweiler en soutien à Olivier Falorni. « En France, l’autorité a du succès, comme en témoigne la popularité de personnalités telles que Nicolas Sarkozy, Alain Juppé ou Laurent Fabius. Mais cette attente d’autorité est autant partagée par les hommes que par les femmes », explique Jean-Daniel Lévy.
Une image perturbée
Reste que ces événements ont bien un impact sur l’image du Président. Entre 2000 et 2012, François Hollande est régulièrement apparu comme « sympathique » et « proche des gens ». Mais les photographies dans Closer sont venus altérer son image. « Plus que la compassion pour Valérie Trierweiler, c’est l’égoïsme de François Hollande qui joué en sa défaveur », commente le directeur du département opinion de Harris Interactive. L’Ifop, de son côté, rapporte que pas moins de sept points d’écart distinguaient les deux sexes en janvier dernier sur la question de l’image sympathique du Président. Preuve que dans l’imaginaire féminin, le Président socialiste n’est plus si « exemplaire ».
Julien Beauhaire
Lire également : Comment votent les femmes ?
* Gender gap à la française : recomposition ou dépassement lors de l’élection présidentielle de 2012, Revue française de science politique, Presses de Sciences Po (2013/2, Vol. 63, pp. 225-248)