Le président de l’UMP aurait espéré un vrai changement de cap pour la France et déplore les effets de com'.
Décideurs. L’arrivée de Manuel Valls à Matignon n’est-elle qu’un «?effet de com?» ou peut-il réellement changer le cap de la gouvernance ?

Jean-François Copé.
J’aurais espéré un grand changement de cap, pour le bien de mon pays. C’est ce que les Français ont clairement demandé en balayant la gauche lors des élections municipales. Mais je crains que l’arrivée de Manuel Valls ne change pas grand-chose. Il ne fait que mettre en musique la politique décidée par François Hollande. Et l’on a tendance à oublier un peu vite qu’avant d’arriver à Matignon, Manuel Valls a été l’un des principaux ministres de François Hollande sans être un opposant de l’intérieur. À ce titre il est comptable lui aussi du bilan désastreux des deux premières années du quinquennat en matière d’explosion du chômage, d’insécurité, d’impôts… Il n’a rien d’un homme neuf : il mène la politique que Jean-Marc Ayrault aurait aussi menée.


Décideurs. Qu’avez-vous pensé de son discours de politique générale ?

J.-F.?C.
Cela a été un discours réussi du point de vue de la com et de la mise en scène personnelle. Mais absolument pas à la hauteur des enjeux sur le fond… Ce qui me frappe, c’est que Manuel Valls n’a proposé aucune réforme de structure hormis la réduction du nombre de collectivités. Une réforme nécessaire mais renvoyée à 2021, dans sept ans !
Pour le reste, c’est une approche malthusienne qui prédomine. Jean-Marc Ayrault avait créé cinquante milliards de prélèvements nouveaux. Manuel Valls dit vouloir raboter de cinquante milliards les dépenses. Que ce soit l’impôt ou le rabot, cela ne peut pas réussir si l’on ne révolutionne pas le système. Geler les pensions des retraités, le point d’indice des fonctionnaires et les prestations des familles sans réformer le système, la fonction publique ou le périmètre de l’État, cela revient à organiser la pénurie. Cela appauvrit les Français sans leur donner de perspectives. C’est mortifère.


Décideurs. Le président pouvait-il aller plus loin dans sa réponse au besoin de droite exprimé par le pays ?

J.-F.?C.
Non seulement il le pouvait, mais il le devait ! La vague bleue des municipales que j’avais promise a été d’une ampleur inédite. Dans les 1 018 communes de plus de 9 000 habitants en France métropolitaine, la droite détient désormais 633 communes, soit plus de 62?%, contre 45?% à la veille des élections… Ce tsunami électoral imposait à François Hollande un changement majeur, il a choisi de remanier a minima pour que rien ne change au final. Les Français n’ont pas été entendus, c’est pourquoi ils doivent renouveler la sanction aux élections européennes du 25?mai pour que leur colère soit enfin prise en compte.


Décideurs. Le pacte de responsabilité est-il bien compris par les chefs d’entreprise et les Français en général ? Et n’arrive-t-il pas trop tard… ce qui expliquerait aussi la déroute de la gauche aux dernières élections municipales ?

J.-F.?C.
Non, il n’est pas compris car il est en contradiction avec ce qui a été dit pendant la campagne présidentielle par la gauche, et par ce qui a été fait depuis mai?2012. Le pacte de responsabilité va mettre trois ans à détricoter deux ans de matraquage fiscal intense pour les entreprises. Depuis 2012, François Hollande a supprimé la TVA sociale, augmenté à deux reprises les cotisations sociales, fiscalisé les heures supplémentaires… Après avoir considérablement alourdi le coût du travail, le président de la République semble considérer aujourd’hui qu’il faut l’alléger… C’est une prise de conscience bien tardive ! Deux ans de perdu qui ont coûté la destruction de milliers d’emplois ! Mais cela ne va ni assez vite ni assez fort pour restaurer la compétitivité de notre économie.


Décideurs. La gauche a choisi de privilégier les allégements des charges sur les bas salaires. Quel choix aurait fait la droite ?

J.-F.?C
. Il faut une politique globale. Se contenter de saupoudrer les allégements n’est pas suffisant. Nous voulons remettre la liberté à tous les étages. Il faut réduire les dépenses, les impôts, les charges, les normes, les contraintes qui étouffent les Français. L’UMP a validé à l’unanimité le principe d’une réduction de 130?milliards des dépenses sur cinq ans, soit une baisse de 10?% de la dépense publique. Cela nous permettrait de revenir dans la moyenne européenne avec un taux de 50?% de dépense publique par rapport au PIB. Ces 130?milliards seraient répartis pour moitié en baisses de prélèvements, dont une suppression des cotisations «?famille?», et pour l’autre moitié en baisse de la dette. En parallèle, il faut en finir avec les 35?heures, doubler les seuils sociaux dans les PME, faciliter l’apprentissage, instaurer un contrat de travail unique, mieux former les chômeurs, recentrer l’Éducation nationale sur l’enseignement des fondamentaux pour arrêter de produire 150 000 décrocheurs par an… Le chantier est immense, mais le redressement de la France est à ce prix !


Décideurs. Les délais demandés à Bruxelles et le choix d’Arnaud Montebourg ne signent-ils pas l’engagement d’un bras de fer avec l’Europe ?

J.-F.?C
. Quel bras de fer ? Nous n’en avons pas les moyens. Don Quichotte-Montebourg peut bien faire quelques rodomontades, nous n’avons aucune marge de manœuvre. Depuis l’élection de François Hollande, la France s’est retrouvée comme jamais isolée en Europe et le couple franco-allemand ne fonctionne plus.
Notre pays a même été placé sous surveillance en compagnie de la seule Slovénie…
Nous ne pouvons continuer à être le seul pays d’Europe à renâcler devant les efforts nécessaires pour retrouver la croissance. Pour retrouver du crédit au niveau européen, il faut voter en masse pour les candidats de l’UMP le 25?mai prochain.


Décideurs. Le spectacle offert par la tête de l’UMP ne risque-t-il pas de lasser les Français ? Comment l’UMP peut-elle se remettre en ordre de combat ?

J.-F.?C.
Vous savez, l’UMP de 2014 n’a plus rien à voir avec l’UMP 2012 ! Ce n’est pas un hasard si le 30?mars dernier, notre parti a remporté la plus grande victoire de toute l’histoire de la Ve?République aux élections municipales… C’est le premier parti de France et j’espère qu’il le sera toujours au soir des européennes. Cela témoigne d’une confiance de la part des Français qui ne peut être éclipsée par quelques incartades personnelles. Je note d’ailleurs que seuls 19?% des Français pensent que l’UMP ferait moins bien que le gouvernement actuel… Mon ambition est de renforcer encore cette crédibilité pour préparer l’alternance.

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