La candidate RN se lance dans une habituelle surenchère sécuritaire et cible Emmanuel Macron qui a pourtant des arguments à mettre en avant.

"La France a peur, elle est en proie à la barbarie, la faute à un gouvernement laxiste. Heureusement, je suis là pour rétablir l’ordre". Cela fait plus de trente ans que le FN, désormais baptisé RN, tient le même langage. Cette année encore, la candidate d’extrême droite utilise ce ressort. Sans parler de guerre civile comme Éric Zemmour, elle évoque, toutefois "des pans entiers du territoire qui échappent à l’autorité de l’État" et où "le trafic de drogue et d’armes a pris des proportions inédites". Pour remédier à la situation, elle propose un programme riche de 24 pages, là où son projet européen n’en comporte aucune.

Parmi ses propositions phares qui veulent se démarquer de l’hôte de l’Elysée qu’elle nomme le "président de l’ensauvagement", l’obligation d’instaurer une police municipale dans les communes de plus de 10 000 habitants, la construction de 85 000 places de prison à l’horizon 2028, la fin des aménagements de peine sauf pour les condamnations inférieures ou égales à six mois pour les atteintes aux personnes. Marine Le Pen propose également d’instaurer une "présomption de légitime défense pour les policiers et les gendarmes".

Le programme de Marine Le Pen consacre 24 pages à la sécurité, 0 à l'UE

Islamisme : des solutions qui existent déjà

Fidèle au fonds de commerce de son bord politique, le programme de sécurité de Marine Le Pen prévoit d’interdire "la pratique, la manifestation ainsi que la diffusion publique de l’idéologie islamiste". Elle compte également "interdire la manifestation de l’idéologie islamiste dans les établissements d’enseignement" et planifie de "retirer la nationalité française aux individus qui l’avaient acquise, s’ils manifestent ou diffusent l’idéologie islamiste". Cette dernière proposition semble juridiquement inapplicable car causant une rupture d’égalité entre citoyens français. Les deux premières propositions, pour leur part, existent déjà. Preuve en est avec les dissolutions du CCIF ou de Baraka City en 2021 ou l’obligation pour les associations recevant des subventions publiques de signer une charte de la laïcité. Concernant les établissements d’enseignement le corpus législatif existe déjà. Son nom ? La laïcité.

Maîtrise des frontières : impossible dans l’état actuel

Pour assurer la sécurité des Français, la candidate RN prône  "la maîtrise des frontières" vue comme "une condition indispensable au rétablissement de la sécurité et à la préservation de notre souveraineté. Un État doit savoir qui entre ou sort de son territoire et pouvoir à cette occasion procéder à des vérifications. Il doit également mieux savoir quelles marchandises pénètrent ou quittent son territoire. Les graves défaillances dans ce domaine des mécanismes instaurés par l’Union européenne imposent de rétablir une surveillance et un contrôle permanent de nos frontières". Si cette vision des choses a le droit d’exister dans le débat public, Marine Le Pen omet de préciser que le droit communautaire n’autorise pas ce qu’elle compte instaurer. Seule solution : la sortie de l’UE.

Du côté d’Emmanuel Macron, un bilan de l’ombre ?

Le régalien est perçu par les Français comme le talon d’Achille de la majorité. Ainsi, en février 2022, 62% des Français jugeaient mauvais le bilan sécuritaire d’Emmanuel Macron. Pourtant, sur l’année 2022, le budget dédié au ministère de l’Intérieur a augmenté de 1,5 milliard d’euros pour atteindre un total de 14,7 milliards et des augmentations annuelles sont budgétées jusqu’en 2027 en cas de réélection. A priori, l’objectif de recrutement de 10 000 policiers et gendarmes sera atteint fin 2022.

Pour tenter de renverser la vapeur, le programme "Avec vous" déroule, chiffres à l’appui, un bilan vantant, notamment, la baisse des cambriolages et des vols de voiture ou encore la diminution des points de deals. Le projet met également en exergue l’ouverture de 2 000 places d’hébergement pour les victimes de violences conjugales créées en 5 ans, ou la formation de 90 000 policiers à la lutte contre les violences conjugales.

Pour les promesses, il semble que la surenchère sécuritaire ne soit pas au rendez-vous. En revanche, il est prévu d’approfondir et d’accélérer sur ce qui est déjà mis en œuvre. Ainsi, le Macron cuvée 2022-2027 compte poursuivre "la fermeture des associations et des mosquées radicales, des écoles clandestines, l’expulsion des prêcheurs radicalisés, le contrôle des financement étrangers". Au programme également, "achever le doublement de la présence des forces de l’ordre sur la voie publique, le déploiement de 200 nouvelles brigades pour plus de gendarmes en ruralité". Enfin, concernant les petits délits, l’accent serait mis sur : "des amendes forfaitaires (comme c’est désormais le cas pour l’usage de cannabis ou l'occupation des halls d’immeuble), plutôt que des procédures longues. Elles pourront être prélevées directement sur les revenus".

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