Aksana Gréboval : "Fidéliser est et restera toujours moins cher que recruter"
Décideurs. Quel regard portez-vous sur le phénomène qualifié de grande démission, cette crise de l’engagement des salariés ?
Aksana Gréboval. Même si j’ai tendance à me méfier des concepts un peu "fourre-tout" qui peuvent presque prendre des allures de prophéties autoréalisatrices, ce que nous observons me renforce dans l’idée qu’il est plus que jamais important pour les entreprises de ne pas se tromper de combat. La crise sanitaire a accéléré la remise en question de notre rapport au travail, déjà prégnante avant : le besoin de se sentir utile, d’avoir de la valeur ajoutée dans son job et au sein de son entreprise est devenu impérieux. Cette exacerbation semble également démontrer que les recettes toutes faites ne fonctionnent pas ou, au mieux, camouflent temporairement les symptômes. Pour faire bouger les lignes et répondre à une quête aussi personnelle, il faut aller vers plus d’individualisation. Comment parvenir à entretenir un beau jardin sans connaître les particularités des plantes qui le composent : le niveau d’ensoleillement, d’hydrométrie, qui convient à chacune d’entre elles… ? En entreprise, comment amener vos collaborateurs à donner le meilleur d’eux-mêmes sans comprendre de quelles conditions chaque talent a besoin pour se révéler ? Le potentiel, la personnalité ou encore les soft-skills sont des choses invisibles, mais dont tout le monde parle. Comment être sûr de ne pas faire fausse route en jugeant sans véritablement connaître ?
Il s’agit donc de s’inscrire dans une vraie démarche d’individualisation des solutions…
Oui, car ce qui marche pour les uns, sera "nocif" pour les autres. Je vous donne un exemple. Un manager, soucieux de créer du lien, organise plusieurs réunions dans la semaine avec son équipe et un point quotidien individuel pour s’assurer du bien-être des collaborateurs. Mais certaines personnes ne créent du lien qu’à condition de recevoir la juste quantité de sollicitations. La démarche du chef d’équipe s’avère alors contre-productive… pour certains d’entre eux. Utiliser des évaluations psychométriques permet de mieux connaître ses collaborateurs, la façon dont ils fonctionnent dans le travail et avec les autres, et donne au manager les clés pour les accompagner au mieux dans la prise de fonction, lors du changement d’équipe, tout au long de leur parcours.
Pour le salarié, cela entraîne une meilleure connaissance de lui-même et facilite l’instauration de modes de travail et de relation qui lui permettent d’être au mieux de ses capacités. Les entreprises qui ont l’habitude d’utiliser ces solutions le font aujourd’hui dès le stade de l’onboarding. Ensuite, la même approche se déploie sur le long terme dans le pilotage des programmes de développement des talents. Je pense que, dans dix ans, ce type de pratique sera devenu habituel au moment de l’intégration de nouveaux collaborateurs. Les professionnels RH se forment de plus en plus à ces dispositifs.
La réponse aux difficultés de recrutement peut d’ailleurs se trouver dans la façon d’appréhender les talents disponibles dans l’entreprise…
Fidéliser est et restera toujours moins cher que recruter. Quand on nous parle de pénurie des compétences, nous recommandons de commencer par un état des lieux interne. Beaucoup de talents sont encore "dormants", voire malheureusement "gâchés". Ils peuvent se révéler lorsque l’entreprise prend soin de mettre en place les conditions de leur expression. Le métier de The Myers Briggs Company consiste à doter les professionnels RH d’outils fiables et de compétences associées. Ils disposent ainsi d’une vision factuelle, objective de l’humain afin de proposer des programmes de développement individualisés pouvant répondre aux aspirations du plus grand nombre. Plus un collaborateur a le sentiment que ses talents sont reconnus et sollicités par l’entreprise, plus il utilise son énergie pour les mettre à son service et au service du collectif.
Propos recueillis par Marie-Hélène Brissot