À l’instar de Microsoft, Coca-Cola ou encore Cisco, le chaebol Samsung a choisi de placer ses pions en France en investissant dans la start-up Sigfox. Une tendance forte du marché.
Samsung a annoncé investir dans la start-up française Sigfox, pour un montant non dévoilé. Cette dernière, experte des réseaux à bas débit connectant les objets intelligents, a ainsi pu boucler sa levée de fonds de cent millions d’euros. Cette prise de participation se double d’une association majeure pour produire les nouvelles cartes à puces Artik de Samsung, permettant de rendre facilement n’importe quel objet connectable. Le coréen ne s’arrête pas là. Il s’est également engagé à investir dix millions d’euros en France dans les six prochains mois et à y installer un centre de recherche dédié au cloud computing. Et il n’est pas le premier ! Microsoft rachetait l’été dernier le français Capptain, spécialiste des solutions de marketing comportemental. Cisco promettait, en février, cent millions de dollars aux entrepreneurs français grâce à une collaboration avec l’État. Quant au groupe Coca-Cola, il a racheté à la mi-avril 5 % du capital de Sponsorise.me, le leader européen du financement participatif pour le sport. À croire que les start-up françaises font figure de nouvel Eldorado pour les multinationales.

Les investissements corporate venture, des partenariats gagnant-gagnant

Directement, via un fonds de capital-risque d’entreprise ou en créant leur propre incubateur, les grandes firmes financent toujours plus les jeunes pousses. Exemple patent : Google a lancé l’été dernier son propre fonds entrepreneurial pour l’Europe doté de quelque cent millions de dollars. Et ce n’est pas par altruisme ! Les multinationales, notamment technologiques, ont simplement constaté que la R&D en interne est aujourd’hui plus lente que l’évolution des besoins des consommateurs. Pour innover, elles se tournent vers l’extérieur. Les start-up, agiles et flexibles, parviennent à suivre le marché et à inventer des technologies "disruptives". Elles sont ainsi des partenaires de choix pour des géants peu agiles. Ces prises de participations minoritaires constituent à présent 40 % des fonds investis dans les start-up. Du côté des benjamines, s’adosser à un géant est également très attractif. En témoignen la collaboration de Drivy et de Mobivia inaugurée en avril dernier. Les avantages : la puissance financière, un réseau de clients et de fournisseurs et surtout une image de marque.

France, Douce France

C’est un des pays développés les plus critiqués pour son manque de souplesse, pourtant quand il s’agit d’entrepreneuriat, la France semble avoir des atouts non négligeables. Ses ingénieurs d’abord. Issus de très bonnes écoles comme Polytechnique ou l’Epita, ils sont particulièrement formés en mathématiques et en informatique. De plus, « à un stade de développement identique, les sociétés françaises sont en général moins chères que leurs homologues américaines », affirme Antoine Baschiera, le fondateur d’Early Metrics, l’unique agence de notations de start-up. Il précise qu’une petite entreprise d’outre-Atlantique peut avoir une valorisation trois à dix fois supérieure à celle d’une consœur française. L’investissement est donc plus rentable au pays de Voltaire. Enfin, les difficultés financières rencontrées dans l’écosystème hexagonal font paradoxalement son attractivité : pour survivre, les firmes doivent se structurer très tôt et sont donc plus solides. L’investisseur étranger arrive à un stade où le business model de la nouvelle société a déjà été validé par le marché.

« C’est un mariage difficile, un grand écart »

Reste que s’adosser à un grand groupe comporte aussi des risques souligne Antoine Baschiera, qualifiant ces alliances de « mariages difficiles ». Il ajoute que « c’est structurellement un partenariat assez efficace mais il faut qu’il y ait un respect de l’ADN de la start-up ». Si elle peut accéder à un nouveau marché grâce à un géant étranger, elle doit néanmoins s’intégrer dans le mastodonte, sans perdre agilité et pouvoir de décision. « Le plus important, rappelle l’expert, est de se baser sur des synergies business. » La French Tech peut bénéficier grandement de ces nouveaux investissements, mais ils ne comblent pas tous les retards de l’Hexagone dans ce domaine. L’equity gap, le vide existant en France entre les financements de type seed et le capital-développement, reste un frein à la montée en puissance des plantes tricolores naissantes.

Sophia Sanni Soulé

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