Ballon rond ou ballon ovale ? La comparaison se heurte à l’ampleur du premier par rapport au second. Mais la modestie de l’un compense la démesure de l’autre.

1 – Audience : Football

Le mondial de rugby 2011 organisé par la Nouvelle-Zélande a attiré quelque 133 200 visiteurs, un chiffre bien maigre face au million de personnes qui se sont rendues au Brésil en 2014. En ce qui concerne les billets vendus, le résultat est du même ordre : 1,35 million d’unités en Nouvelle-Zélande contre 3,1 millions pour le Brésil. Sur le petit écran, quatre milliards de téléspectateurs ont suivi la Coupe du monde de rugby en 2011 alors que les audiences cumulées du mondial de football en 2014 atteignaient trente milliards de personnes. Reste que la Nouvelle-Zélande est particulière dans ce paysage des Coupes du monde, archipel lointain, le petit pays de 4,2 millions d’habitants fait difficilement le poids face au géant brésilien. Pour comparaison, recentrons-nous sur les événements organisés dans l’Hexagone : côté audiences télé, ce sont 37 milliards de téléspectateurs qui suivent les matchs de football en 1998 contre 4,2 milliards pour le ballon ovale en 2007. La billetterie, sans surprise, fait un meilleur score pour le ballon rond : trois millions de billets vendus en 1998 contre 2,2 millions en 2007. Lors de l’événement gagné par la France, l’Hexagone a accueilli deux millions de touristes. Neuf ans plus tard, seules 325 000 personnes avaient fait le déplacement.

 

2 – Partenariats marketing : Football

En 2014, les entreprises ont chèrement payé leur titre de sponsor de la Coupe du monde brésilienne. Les partenaires usuels de la Fédération internationale de football association (Fifa), à savoir Adidas, Coca-Cola, Emirates, Hyundai Motors, Sony et Visa remettent chaque année entre vingt-cinq et cinquante millions de dollars à l’organisateur du tournoi. À ceux-ci sont venues se greffer de grandes compagnies telles que Budweiser, McDonald’s ou l’entreprise de télécoms brésilienne Oi qui ont dû mettre entre dix et vingt-cinq millions de dollars sur la table pour participer à l’événement. La Fifa a ainsi engrangé 1,35 milliard de dollars en revenus marketing cette année-là. Le ballon ovale arrive loin derrière : World Rugby (la fédération internationale de rugby) n’a perçu « que » 44,9 millions de dollars des sponsors en 2011. Pour l’édition qui a débuté en Angleterre, Heineken aurait déboursé 31 millions de dollars pour être partenaire du tournoi. Concernant la vente des droits télévisés, la Fifa a récolté pas moins de 1,7 milliard de dollars contre 144 millions de dollars pour World Rugby.

 

3 – Organisation : Rugby

La Coupe du monde de rugby à XV a été créée en 1987, quand sa consœur footballistique remonte à 1928. Il faut dire que le monde de l’ovalie compte deux fois moins de membres avec seulement cent pays et dix-sept associés, alors que son homologue du ballon rond regroupe 209 pays. La quasi-totalité des nations du monde y adhère, seuls huit États souverains n’en font pas partie. Malgré le soutien des deux associations, l’organisation des tournois pèse lourd. Si la Nouvelle-Zélande dépensait 249 millions d’euros en 2011, le Brésil a dû trouver onze milliards de dollars pour la Copa. En moyenne, les trois derniers tournois dépendant de la Fifa ont coûté huit milliards au pays hôte, contre seulement 419 millions de dollars pour le rugby. Des événements qui se traduisent  souvent en pertes sèches pour les organisateurs, sans compter les éléphants blancs qu’ils laissent derrière eux : le Green Point Stadium du Cap, reconstruit pour la Coupe du monde de 2010, avait notamment un coût de fonctionnement de 4,65 millions d’euros par an. Proportions obligent, le rugby est moins nuisible aux économies que son confrère !

 

4 – World Rugby vs Fifa : Rugby

Si les hôtes ont bien du mal à rentabiliser leurs investissements, la Fifa, elle, roule sur l’or : ses recettes grimpaient à quelque deux milliards d’euros en 2014. Elle frôle pourtant la correctionnelle depuis qu’a été mis en lumière le scandale des pots de vin pour l’attribution des droits marketing et autres reventes de places au marché noir notamment. Neuf membres de la fédération ont été inculpés et les accusations continuent de tomber. World Rugby présentait pour sa part un chiffre d’affaires de 262,4 millions d’euros en 2011, 7,6 fois moins que le chiffre d’affaires de la Fifa ! Mais l’association des rugbymen compense ses faibles résultats par une réputation sans taches. De quoi marquer un nouvel essai.

 

5 – Afficionados : Football

World Rugby s’est fixé pour mission d’agrandir la famille du rugby : en 2014, 2,56 millions de joueurs étaient enregistrés dans le monde et 4,47 millions de personnes pratiquaient ce sport sans licence, dont 488 000 enfants. En 2006, lors de sa dernière enquête Big Count, la Fifa recensait pour sa part 265 millions de joueurs dans le monde. En France, le nombre de licenciés est reparti à la hausse. La Fédération française compte désormais plus de deux millions d’adhérents avec un chiffre en hausse de 19 % chez les femmes par rapport à l’année précédente. Au 31 mai 2015, son homologue du rugby recensait 438 144 abonnés, soit plus de quatre fois moins que les footballeurs. Étonnamment, selon un sondage réalisé en mai 2013 par l’institut d’études de marché BVA, 62 % des Français déclaraient préférer le ballon ovale. Une popularité démentie par les chiffres.

 

Conclusion : Football : 3 – Rugby : 2

Malgré des problèmes de corruption et des coûts d’organisation exorbitants, le mondial de football remporte ce match haut la main. Rien d’étonnant, par sa simplicité d’accès, le football reste le sport le plus populaire du monde. Mais l’actualité est au rugby. Si l’issue reste incertaine, le tourisme britannique serait d’ores et déjà le grand gagnant de cette huitième édition. Avec 2,3 millions de spectateurs sur place, les bénéfices nets devraient augmenter de 25 %, explosant le record de 154 millions d’euros, jusque-là détenu par la France pour la coupe de 2007.

 

Sophia Sanni Soulé

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