B&B, le breton à la conquête du monde
Décideurs Magazine. Pouvez-vous nous présenter le groupe B&B Hôtels et son histoire ?
Fabrice Collet. Le premier hôtel a été créé en 1990 à Brest. François Branellec, s’est rendu compte à l’occasion d’un mariage que l’hôtel où il séjournait était de qualité mais beaucoup trop cher en rapport avec l’inutilité de certains services proposés. Il a donc identifié un manque dans l’offre hôtelière et a lancé B&B. Nous cherchons à offrir un produit simple, pratique, efficace et abordable mais sans aucun compromis sur l’essentiel : la literie, le wifi, la climatisation, le petit déjeuner, …. Nous accordons aussi une importance particulière au design ainsi qu’à la qualité de notre service, très fluide, avec un check-in rapide via un personnel souriant et sincère. Nous essayons de nous implanter partout et nous voulons répondre présent dans toutes les villes où nous avons notre place. Nos clients sont représentatifs de toute la société et nous ne faisons pas d’hôtels dédiés à une catégorie socio-professionnelle en particulier. Ainsi, nos hôtels répondent à un besoin et non à un type de clientèle.
" Nos hôtels répondent à un besoin et non à un type de clientèle "
Comment expliquez-vous le succès de votre modèle malgré la forte concurrence du secteur ?
D’abord, le nombre de voyageurs sur la planète double tous les douze ans depuis 36 ans et les experts anticipent la même progression sur les 24 prochaines années. Il n’y a donc pas vraiment de sujet de concurrence mais davantage de structuration du futur marché à se partager entre acteurs du secteur. Si l’on évoque certains acteurs du web, je ne pense pas que ceux-ci aient pris beaucoup de clients aux hôteliers. En revanche, cela a permis à des gens qui ne pouvaient pas voyager avant de le faire. Ces acteurs me semblent davantage complémentaires que substitutifs à notre offre. Enfin, l’offre d’hôtellerie économique de chaîne reste encore marginale en Europe. En effet, 80 % de ce type d’hôtels sont indépendants tandis qu’aux États-Unis, c’est seulement 33 %. Cependant, la part des hôtels de chaîne progresse de 1 % en Europe chaque année avec la France pour principal marché. Aussi, de plus en plus d’hôtels indépendants préfèrent passer le relais aux réseaux qui disposent d’une surface financière permettant d’accroître plus rapidement les capacités. À titre d’exemple, nous pensons que la taille idéale d’un hôtel est entre 80 et 120 chambres tandis que la taille moyenne d’un hôtel indépendant en France est de l’ordre de 20 chambres.
Comment décrivez-vous votre présence en France et en Europe ?
Nous avons 280 hôtels en France, ce qui nous offre un maillage territorial important. Au niveau européen, nous avons commencé à nous développer en Allemagne à la fin des années 1990. Nous y avons simplement dupliqué le modèle français outre-Rhin dans un premier temps, alors que le client allemand avait ses propres besoins. Cette première expérience à l’étranger nous a indiqué la bonne marche à suivre. Pour réussir dans un pays, nous pensons qu’il faut s’implanter en masse dans une région définie et non se répandre de manière diffuse. Nous avons relancé l’Allemagne en 2005 avec un manager local et l’objectif d’implanter des hôtels tous les vingt kilomètres entre Düsseldorf et Francfort. Ce fut un gros succès et nous avons ensuite investi l’Italie en 2010 avec le même concept, entre Modène et Turin. Enfin, l’Espagne en 2015 avec un rachat de 15 hôtels qui étaient installés selon ce même modèle. Depuis, nous sommes présents dans une douzaine de pays en Europe et sommes l’un des deux leaders en France, en Allemagne, en Italie et bientôt en Espagne.
" Nous avons devant nous un océan de croissance "
Un mot sur vos résultats financiers ?
D’abord, cela fait vingt-huit ans que notre société connaît une croissance à deux chiffres avec des marges très satisfaisantes. Nous sommes convaincus qu’il est possible de faire encore bien mieux. Nous avons actuellement 500 hôtels mais quand nous regardons une carte d’Europe, il existe un potentiel de trois à quatre mille établissements supplémentaires. Si l’on regarde le monde entier, le chiffre monte à 5 000, et seulement dans les territoires où nous sommes déjà présents. Nous avons donc un océan de croissance devant nous.
Pouvez-vous revenir sur Goldman Sachs ? Pourquoi ce choix-là et pas un investisseur français ?
Nous pensons que Goldman Sachs sera un formidable soutien, doté de capacités importantes pour cibler d’autres marchés. Cela va certainement accélérer nos opportunités de croissance. Goldman Sachs valide totalement notre stratégie et a compris qu’il fallait faire toujours plus d’hôtels de qualité, car c’est ce que nos clients attendent. Ensuite, la nationalité des fonds d’investissement ne me semble pas être un sujet important car notre économie est globalisée et nous avons déjà eu des actionnaires anglo-saxons. Ce n’est donc pas un sujet et nous nous rendons compte qu’au-delà d’un certain montant, le nombre d’acteurs capables de se positionner sur un deal à plusieurs milliards d’euros est assez limité.
Quelle est votre approche sur les critères ESG ?
C’est un sujet incontournable mais face auquel il convient de rester humble. Au sujet des bâtiments, le problème de la réaffectation ne s’est jamais posé car nous n’avons jamais fermé un hôtel dans notre histoire. Sur les axes de progression, nous devons être meilleurs dans la consommation des plastiques et nous avons entamé cette mutation en les supprimant de nos hôtels espagnols. Les questions de diversité sont très importantes pour nous également. Notre modèle économique très particulier nous amène une diversité naturelle. En effet, nous confions nos hôtels à des entrepreneurs que nous avons détectés au sein de notre réseau et qui représentent souvent les localités où sont implantés les hôtels, ce qui constitue un véritable vivier de talents.
Propos recueillis par Yacine Kadri