Dix ans de chiffres sur la profession : de quoi offrir un premier bilan et une perspective d’avenir aux avocats.
Créé en 2004 à l’initiative de l’ancien vice-président du CNB Alain Hollande, l’Observatoire collecte les données statistiques et économiques de la profession et en restitue les résultats. À l’occasion de son dixième anniversaire, l’Observatoire, présidé par Loraine Donnedieu de Vabres-Tranié (photo) et dirigé par Pascale Honorat, a organisé le 11 septembre 2014 une conférence au cours de laquelle il a fait part de ses constatations et a révélé les résultats d’une étude menée par l’institut d’étude CSA s’intéressant à l’avenir de la profession.

Les dangers de la statistique
Les intervenants n’ont eu de cesse de rappeler l’importance des données statistiques et des indications chiffrées pour la conduite de la profession et la connaissance des résultats de son activité. Néanmoins, ils ont précisé qu’elles ne sont pas toujours des valeurs sûres, faisant notamment référence au récent rapport de l’Inspection générale des finances (IGF). Pour Jean-Marie Burguburu, président du CNB, « Les chiffres peuvent être plus menteurs que les lettres lorsque l’on fait varier la ventilation des paramètres ». La présidente de l’Observatoire a quant à elle souligné que le rapport de l’IGF se cantonne aux chiffres d’affaires des cabinets et aux revenus des avocats, sans considération de leurs nouvelles activités ni distinction entre le conseil et le contentieux. Également conviée, Carole Champalaune, directrice des affaires civiles et du Sceau, enfonce le clou : « Il existe trois formes de mensonges : le mensonge, le demi-mensonge et la statistique ». La messe est dite !

60 000 avocats
Les avocats représentent 81 % des professionnels libéraux du droit, aux côtés des notaires, des huissiers de justice, des administrateurs judiciaires et des greffiers des tribunaux de commerce. L’observatoire estime à 60 000 le nombre d’avocats en France en novembre 2013, contre 48 847 il y a dix ans. L’enquête menée par le CSA révèle que cette expansion démographique galopante des avocats est perçue comme une menace par la profession. En effet, elle renforcerait la précarisation du statut de collaborateur et aurait pour effet de contraindre certains avocats à un changement total de carrière, particulièrement en région parisienne. De plus, elle participerait à la dégradation globale de la profession : la confraternité serait de moins en moins pratiquée et que les écarts entre les avocats se creuseraient, engendrant une profession à plusieurs vitesses.
Ces chiffres sont néanmoins à relativiser lorsqu’on les compare à ceux de nos voisins européens. Ainsi, on compte 90 avocats pour 100 000 habitants en France, tandis que leur nombre s’élève à 167 en Belgique, à 191 en Allemagne et 270 en Italie pour le même nombre d’habitants. Contrairement aux idées reçues, ces chiffres tendent à démontrer que la profession n’est pas saturée et pourrait encore considérablement se développer. « La France n’est pas tellement chargée en avocats mais il n’y a pas assez d’avocats occupant tous les champs du droit, raison pour laquelle d’autres professionnels juridiques, tels que les experts-comptables, récupèrent des activités qui nous étaient autrefois dévolues », explique Jean-Marie Burguburu.

41,3% des avocats à Paris

Ces chiffres sont également à mettre en perspective avec les disparités constatées entre les différents barreaux, suivant qu’ils sont situés dans des zones rurales ou fortement urbanisées. Ainsi, le coefficient multiplicateur est de plus de 100 entre le barreau de Paris, qui compte 1 077 avocats pour 100 000 habitants, et le barreau le moins dense. L’Observatoire indique que 41,3 % des avocats français sont rattachés au barreau de Paris, tandis que les DOM-TOM ne rassemblent que 2 % de la profession et le centre de la France seulement 1 %.

53,3 % de femmes
L’Observatoire révèle qu’il n’y a pas de profil type de l’avocat français. En effet, si la profession est largement féminisée (53,3 % des effectifs), le taux de femmes varie significativement en fonction de la localisation, allant de 33,3 % à 72,2 % selon le barreau de rattachement. Par ailleurs, l’âge moyen des avocats est de 43 ans, mais seulement 20 % d’entre eux ont moins de 36 ans. D’autre part, si le nombre d’avocats a nécessairement augmenté en dix ans, leur manière d’exercer n’a pas tellement changé. Ainsi, environ un tiers des avocats exercent de manière individuelle, un tiers en tant que collaborateurs et un tiers en qualité d’associés. Enfin, en 2013, la part des avocats étrangers exerçant en France représentait 3,3 % de l’effectif global.

81 134 euros de revenu annuel moyen
L’étude du CSA révèle que 60 % des répondants se disent satisfaits de leur niveau de rémunération et 11 % se considèrent même très satisfaits. Cependant, on constate qu’il s’agit principalement d’hommes ayant la qualité d’associé, travaillant pour de grandes ou moyennes structures comptant principalement une clientèle de grandes entreprises et ayant une activité à dominante de conseil. Plus généralement, les revenus cumulés par l’ensemble des barreaux français atteignaient 4,167 milliards d’euros en 2012, soit une augmentation annuelle de 4,5 %. En 2011, le revenu annuel moyen de la profession s’établissait à 81 134 euros, avec un revenu médian à 47 365 euros. L’Observatoire précise que ces chiffres reflètent des disparités de revenus importantes au sein de la profession « suivant la structure d’exercice, le lieu d’exercice, le domaine d’activité de l’avocat et son âge ». Il omet toutefois de mentionner que ces disparités sont surtout fonction du genre. En effet, le revenu annuel moyen des avocates en 2011 était estimé aux alentours de 58 000 euros quand celui des avocats atteignait 100 000 euros. On déplore un manque de communication et de visibilité de l’Observatoire sur cette question de la parité qui n’est toujours pas abordée après dix ans.

Inquiets pour l’avenir de la profession
Le sentiment d’appartenance des avocats à leur profession est très fort. Toutefois, 96 % considèrent qu’elle n’est pas suffisamment représentée face aux pouvoirs publics. Leurs intérêts ne sont pas assez défendus par les organes internes, qui n’ont plus suffisamment de poids pour parler au nom de la profession. Si 78 % des avocats interrogés se disent optimistes pour l’avenir de leur cabinet, moins de la moitié le sont pour ce qui concerne la profession. Ils identifient un certain nombre de menaces, telles que la pression sur les prix, la concurrence des autres professions et l’émergence de prestations de service « low cost ». Pour parer à ces menaces, ils estiment indispensable d’encourager la formation continue des avocats et, surtout, d’améliorer leur formation à la relation commerciale et au développement d’une clientèle. Ils considèrent également important de pouvoir se former aux métiers du client, ce qui pourrait encourager le détachement des avocats en entreprise – pratique encore peu répandue – ainsi que la promotion du statut d’avocat en entreprise.

Pauline Carmel

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