Le conseil de l’ordre du barreau de Paris réaffirme sa volonté de contribuer à la définition d’un statut d’avocat en entreprise.
Hasard du calendrier : alors que la réforme sur les professions réglementées fait actuellement débat, le conseil de l’ordre du barreau de Paris organisait le 3 novembre dernier un colloque sur le statut d’avocat en entreprise, programmé depuis le début de l’année. L’occasion de faire le point sur les craintes qui divisent actuellement la profession.

Une question qui divise
Dans une lettre ouverte adressée à Emmanuel Macron le 24 octobre 2014, Jean-Marie Burguburu, président du Conseil national des barreaux (CNB), affirmait que : « Non, nous ne braderons ni notre indépendance ni notre déontologie (...) en admettant un statut de l’avocat en entreprise contraire à nos principes essentiels ». Un avis loin d’être partagé par l’ensemble de la profession. Favorable à la réforme, l’ordre du barreau de Paris a mis en place trois commissions de réflexion sur le statut d’avocat en entreprise relatives à son périmètre, aux conditions de sa mise en œuvre et à l’harmonisation des régimes sociaux. Pierre-Olivier Sur (photo), bâtonnier de Paris, rappelle que cette question était débattue depuis près de quarante ans et qu’il est désormais temps d’agir dans l’intérêt général. Également présent, Jean-Marie Burguburu admet être, à titre personnel, favorable à ce statut : « La question est étudiée sous le prisme des difficultés qu’elle pose et non pas sous celui des possibilités qu’elle offre. » Il a toutefois précisé que ses fonctions lui imposent de défendre l’opinion de l’institution jusqu’à la fin de son mandat, dans deux mois.

Un enjeu économique
De nombreux pays ont déjà reconnu ce statut et son défaut en France peut poser des difficultés aux entreprises présentes dans l’Hexagone. Daniel Desjardin, avocat et directeur juridique monde de Bombardier, dont le service juridique rassemble 175 avocats dans dix-sept pays, explique que cela réduit leur compétitivité à l’international : « L’absence de legal privilege de nos juristes en France nous contraint parfois à externaliser le traitement de nos dossiers français à l’étranger, particulièrement en Angleterre ». Une situation confirmée par Hervé Delannoy, président de l’Association française des juristes d’entreprise (AFJE) depuis 2011 et directeur juridique de Rallye (holding des groupes Casino et Go Sport) : « Une quinzaine de sociétés du CAC 40 ont des directeurs juridiques étrangers qui font la promotion du droit anglo-saxon au détriment de la civil law et des avocats français. Parallèlement, nos juristes d’entreprise n’étant pas avocats, ils ne peuvent exercer en qualité de consultants juridiques à l’étranger, contrairement aux juristes étrangers qui bénéficient de ce statut en France. »

Les craintes des professionnels
« Les principaux obstacles à l’instauration d’un tel statut tiennent à la culture de notre profession : beaucoup d’avocats ont une activité essentiellement contentieuse et sont particulièrement attachés aux valeurs qui ont contribué à notre développement », explique Jean-Michel Darrois, auteur du rapport homonyme de 2009 sur la création d’une grande profession du droit. « Certes, elles sont essentielles mais je ne vois pas en quoi elles interdisent à l’avocat d’exercer en entreprise », ajoute-t-il. Pour Frédéric Douchez, bâtonnier de Toulouse, la crainte du basculement de la gestion des dossiers en interne est également un faux problème. « Il est préférable pour la profession que les dossiers soient gérés en interne par des avocats plutôt que par des professionnels du chiffre qui nous font déjà concurrence sur nos compétences non exclusives », explique-t-il. De leur côté, si les entreprises sont plutôt favorables au statut en ce qu’il constitue un gage de confidentialité et de déontologie, il suscite aussi quelques interrogations. « Nous souhaitons le maintien du pouvoir disciplinaire de l’employeur. Mais si le bâtonnier doit être saisi lorsque le litige porte sur des questions déontologiques, ce motif ne risque-t-il pas d’être employé de manière dilatoire par les avocats ? », s’interroge Joëlle Simon, directrice droit de l’entreprise du Medef. Les trois commissions du conseil de l’ordre proposeront ainsi des solutions pratiques à la mise en œuvre du statut, transmises ensuite au gouvernement.

Pauline Carmel

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