Comme en 2014, les banques centrales devraient continuer à mener la danse sur les marchés obligataires.
La BCE amène les taux vers des plus bas historiques

La politique monétaire volontariste de la Banque centrale européenne (BCE) a de nouveau tiré les rendements obligataires vers le bas. Au cours du dernier trimestre 2014, la France a ainsi emprunté à un taux de 0,812 % sur dix ans, un plus bas historique, tandis que le taux à l’émission du bon du trésor à trois mois entrait même en territoire négatif à - 0,06 %. Des rendements qui devraient encore rester contenus en 2015, comme le confirme Andrei Gorodilov, gérant de fonds chez Fidelity : « La BCE va poursuivre sa politique très agressive, et au demeurant très efficace, en procédant au rachat de créances titrisées (ABS) et d’obligations sécurisées durant deux ans. » Cet environnement pour le moins singulier pourrait se révéler favorable au marché obligataire européen. C’est en tout cas l’avis de Steven Ellis, gérant de fonds chez Fidelity : « La volonté de la BCE de ramener l’inflation à 2 % sera un moteur très important pour les actifs obligataires. Avec le resserrement des spreads, l’investment grade devrait être le grand bénéficiaire de cette politique monétaire. »

USA : une année marquée par la fin du quantitative easing

Les bonnes nouvelles relatives aux fondamentaux de l’économie américaine ont encouragé la FED à poursuivre la normalisation de sa politique monétaire. Première conséquence, l’institution dirigée par Janet Yellen a décidé de mettre fin à sa politique de quantitative easing et pourrait même annoncer, au cours du premier semestre 2015, un relèvement de ses taux d’intérêt. « Ce relèvement ne se fera toutefois que progressivement et au diapason des marchés obligataires. Toute hausse des taux allant de pair avec une forte augmentation des rendements à long terme et des spreads de crédit sera considérée comme une menace pour l’économie », prévient Andrew Wells, global chief investment officer chez Fidelity. Une menace, pour l’instant fantôme, confirmée par Éric Frenois, directeur de la gestion sous mandat chez Dorval Finance : « La FED était jusqu’ici le premier acheteur d’obligations US, l’équilibre du marché est désormais précaire. Le danger est d’autant plus important que la masse en jeu est considérable. Il faut, à mon avis, s’attendre à de fortes variations dans les mois qui viennent. » Et, malgré les précautions d’usage de la FED, une poussée inflationniste semble se dessiner au pays de l’Oncle Sam, nourrie par une possible hausse des salaires aux États-Unis. Autant de facteurs défavorables aux marchés obligataires.

Vive inquiétude autour des marchés obligataires

Un dicton veut que les gérants obligataires soient payés à se faire du souci. Et le moins que l’on puisse dire c’est que les sources d’insomnies ne manquent pas. Les investisseurs doivent, en premier lieu, faire face à des risques de nature géopolitique et notamment une éventuelle aggravation du conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine. Le changement de cap de la FED et la fin de son quantitative easing ont également fait naître des craintes au sujet d’une divergence des taux d’intérêt avec la BCE ou la Banque du Japon et des possibles disparités sur les marchés du crédit et des changes.
Igor de Maack, gérant de DNCA Finance, met quant à lui en garde les marchés contre le caractère « préjudiciable de la nouvelle politique de la FED pour les économies émergentes. En cas de hausse des taux d’intérêt, les investisseurs pourraient être tentés de se réfugier dans la zone dollar et y placer leur flux pour profiter de taux attractifs. »
Enfin, sur le front du high yield, les investisseurs pointent du doigt les risques de liquidité et la détérioration du couple rendement/risque.

Stratégie de diversification : la voie à suivre ?

La diversification des moteurs de performance (obligations d’État, emprunts d’entreprises privées, dettes émergentes, convertibles, obligations indexées sur l’inflation…) semble être l’approche privilégiée par les principaux gérants obligataires pour mieux maîtriser la volatilité des taux d’intérêt. Une flexibilité que les fonds n’hésitent pas à utiliser dans la gestion de leurs devises et de la duration. Éric Frenois rappelle cependant que cette stratégie est autant vécue comme une contrainte que comme une opportunité : « Les gérants de fonds obligataires sont tenus de diversifier leurs investissements, en raison notamment des incohérences du marché. Pour preuve, il arrive même que le rendement de certaines obligations privées soit inférieur à celui de certaines obligations gouvernementales. »

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