Par Maurice Nussenbaum, Président, et Guy Jacquot, associé. Sorgem Evaluation
L’objet de cet article est de montrer comment des outils utilisés par les praticiens pour gérer l’exploitation des marques permettent de répondre aux attentes des administrations fiscales en matière de prix de transfert.

Le développement de la consommation de masse et des nouvelles technologies, et l’internationalisation des entreprises, donnent une importance croissante à l’immatériel : marques, brevets, logiciels, mais aussi savoir-faire, réseaux de distribution ou encore fichiers clients. Ces actifs font ainsi de plus en plus l’objet de transferts intra groupe affectant la répartition des bénéfices imposables entre des structures relevant d’autorités fiscales différentes. Ces transferts soulèvent de multiples questions concernant la définition des incorporels, l’attribution des profits et la valorisation de ce type d’actifs et sont aussi à l’origine de nombreux contentieux avec les administrations fiscales locales.

La nature des litiges
Ces contentieux concernent le plus souvent la répartition de la propriété des actifs transférés entre le cédant et le cessionnaire lorsque ce dernier contribue par son exploitation à développer la valeur de l’actif, ainsi que l’influence de l’application du principe de pleine concurrence pour la détermination des conditions de la transaction. Pour les marques ils renvoient notamment à la distinction entre ce qui relève des stricts droits de propriété sur le nom de la marque en tant que trade mark et ce qui relève de la marque au sens large.
Les litiges peuvent aussi surgir lorsque la rémunération demandée à une entité assurant la distribution de produits ne prend pas en compte les charges de promotion que le distributeur supporte et qui peuvent contribuer à développer la valeur de la marque.
De nombreux litiges sont soulevés par la mise en œuvre pratique de ces principes. Les outils que nous présentons ici apportent un éclairage au niveau des marques mais ils abordent nécessairement celui des autres actifs incorporels dans la mesure où la principale question à laquelle ils répondent est celle de la frontière entre les immatériels. Les situations les plus fréquentes auxquelles nous sommes confrontées concernent la mise à disposition d’une marque par son propriétaire à des filiales et le transfert de la marque d’une entité à une autre.

La mise à disposition d’une marque par son propriétaire à des filiales
La question centrale est alors celle du choix du taux de redevance. Quand il est possible d’identifier des contrats de licence concernant des marques appartenant au même secteur, la solution paraît aisée. Cette facilité n’est toutefois souvent qu’apparente car la sensibilité du résultat au taux de redevance est très forte et qu’il existe peu de marques faisant l’objet de contrats de licence entre sociétés indépendantes et pour lesquelles les conditions de licence sont publiques. La distinction entre la marque et le concept est, par ailleurs, délicate dans la mesure où la notoriété et l’image d’une marque s’appuient souvent sur les caractéristiques du concept : des couleurs, un mode de distribution, un choix d’articles…
De plus, l’exploitation d’une marque ne justifie l’application d’un taux de redevance que si elle apporte à l’utilisateur une image et une notoriété. Or, peu de marques sont dans cette situation quand on les implante dans un nouveau pays.
Ainsi, la première question à poser pour fixer un taux de redevance est donc celle du rôle de la marque et des contributions relatives du propriétaire de la marque et de son exploitant.
L’approche que nous proposons pour répondre à cette question est résumée dans ce que nous appelons la matrice de partage. Les colonnes de cette matrice présentent les facteurs clés de succès du marché ainsi que leur importance relative. Les lignes recensent les différents actifs incorporels exploités par le « centre» et par les structures « locales ». Chaque case de la matrice correspond au rôle de chaque actif incorporel dans la réalisation de chaque facteur clés de succès.
La part de la marque dans la création de valeur s’obtient en multipliant le rôle de la marque pour chaque facteur clé de succès par le poids du facteur considéré. Cette part peut alors être appliquée au résultat disponible pour rémunérer l’ensemble des actifs incorporels, définis comme la différence entre le résultat d’exploitation net d’impôts et rémunérations des actifs corporels et du besoin en fonds de roulement.

Le transfert de la marque d’une entité à une autre
Le passage du taux de redevance à la valeur d’une marque s’obtient en appliquant ce taux aux prévisions d’activité actualisées avec un taux adéquat.
Dans certains cas, toutefois, le transfert ne concerne pas seulement la marque, mais aussi un certain nombre de services relatifs à la protection de la marque, à son développement ou encore à sa communication. L’outil que nous utilisons permet de valoriser les actifs transférés à partir d’une approche de type « but for » appliquée en matière de litige. Cette méthode revient à comparer les situations avant et après le transfert.
Pour appréhender l’existence d’une plage de négociation, les calculs peuvent être réalisés du point de vue du cédant et du point de vie du cessionnaire.

Conclusion
La détermination d’un taux de redevance doit s’appuyer sur l’analyse précise de la répartition des services rendus par l’entité locale distributive et par l’entité globale propriétaire ainsi que par les risques respectifs supportés par ces deux entités.
Les outils présentés et notamment la matrice de partage apportent une réponse pratique aux questions de définition, d’affectation des résultats entre entités locales et globales et d’évaluation que soulèvent les prix de transfert relatifs aux incorporels.

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