Commission des sanctions de l’AMF : l’information privilégiée au cœur des débats
Le colloque de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) est l’occasion, chaque année au Palais Brongniart, de faire le point sur l’année écoulée et de débattre des notions qui interpellent le régulateur et les entreprises sur le marché qu’il surveille.
Du point de vue de la forme, la commission des sanctions – c’est-à-dire l’autorité administrative chargée de sanctionner les personnes et les sociétés dont les pratiques sont contraires aux lois et règlements – a vu une partie de ses membres partiellement renouvelée.
21 décisions en douze mois
Sur le fond, au cours des douze derniers mois, la commission des sanctions a rendu 21 décisions, dont une de relèvement (elle a statué sur une demande de relèvement d’interdiction à titre définitif d’exercer une activité de gestion pour le compte de tiers, comme le lui permet la loi Sapin 2 de 2016).
En ce qui concerne les abus de marché, on dénombre un dossier de manipulation de cours, quatre relatifs à des manquements d’initiés et trois en lien avec la notion d’information financière. « Vous avez remarqué qu’entre les quatre dossiers de manquement d’initiés et les trois dossiers relatifs à l’information financière, le thème de l’information privilégiée ressort incontestablement », a fait valoir Marie-Hélène Tric, présidente de la commission des sanctions (CDS), lors de son discours d’ouverture.
« Ce sujet – par son importance pour l’intégrité du marché et la protection des investisseurs comme pour la vie économique –, est celui qui, actuellement, préoccupe le plus la commission des sanctions, bien qu’il soit permanent depuis de nombreuses années », a-t-elle ajouté.
Un concept mouvant
Le grand raout annuel de la semaine dernière a permis de prendre un peu de hauteur et de réfléchir sur la question. Gérard Rameix, ancien patron de l’AMF et actuel président du Haut comité juridique de la place financière, a rappelé lors d’un discours que les marchés avaient vécu pendant longtemps sans intégrer la notion d’information privilégiée. La prise de conscience de ce concept et une meilleure capacité pour les régulateurs à détecter les incartades ont entraîné une augmentation du nombre de sanctions liées à ce phénomène. Il y a « un mouvement progressif d’élargissement de l’information privilégiée », a-t-il précisé.
Les contours de l’information privilégiée
Il n’y a pas vraiment de modèle type de dossier et chacun d’entre eux est vraiment apprécié au cas par cas. Des affaires ont même été plus originales que d’autres, comme celle concernant un banquier ayant capté des informations relatives à une opération à venir sur l’écran d’un autre banquier dans un Eurostar.
D’où les deux tables rondes du colloque, qui ont porté sur les contours de l’information privilégiée et la détention de cette information ainsi que ses conséquences. Lors de ces discussions ont été rappelés la définition de l’information privilégiée, le risque d’en détenir sans le savoir, les procédures internes chez les émetteurs pour les éviter, le moment à partir duquel une information devient privilégiée et doit être divulguée au marché ou encore la manière dont le régulateur récolte des « faisceaux d’indices » pour les mettre en lumière, etc.
Afin d’assurer au mieux son rôle pédagogique, Marie-Hélène Tric a indiqué qu’un certain nombre d’outils avaient été mis en place pour mieux faire connaître les décisions. Par exemple, les sanctions donnent dorénavant lieu à des communiqués de presse en français et en anglais. Ainsi, la décision concernant Natixis a-t-elle été téléchargée à 2 000 reprises.