Cofondateurs de Bougartchev Moyne Associés, Kiril Bougartchev et Emmanuel Moyne dressent le bilan de l’activité du cabinet en 2020 ainsi que sa stratégie de développement.

Décideurs. Quel bilan de l’année 2020 tirez-vous pour l’activité du cabinet ?  
Kiril Bougartchev.
En dépit de la crise sanitaire, le cabinet a réalisé une bonne année 2020 qui s’est soldée par une croissance de 3 %. Nous avons régulièrement été sollicités dans le cadre de contentieux commerciaux et haut de bilan directement ou indirectement liés aux effets de la crise sanitaire, en particulier sur des problématiques de rupture de pourparlers lors des opérations d’acquisition ou sur des litiges entre actionnaires. Des sujets de droit pénal des affaires nous ont aussi occupés notamment les fraudes au président dont la recrudescence est assez inquiétante depuis la mise en place du télétravail généralisé par les entreprises.

Emmanuel Moyne. Par ailleurs, la fermeture des tribunaux judiciaires pendant le premier confinement n’a pas empêché les enquêteurs de police de continuer à travailler leurs dossiers. Donc la reprise intense de l’activité judiciaire à l’issue de cette période a contribué favorablement au développement de notre activité. 

La cooptation de Geoffroy Goubin au rang d’associé s’inscrit-elle dans une stratégie interne faisant monter les jeunes talents du cabinet ?  
K. B. La stratégie du cabinet consiste effectivement à privilégier la promotion de ses jeunes talents plutôt que de recruter latéralement des associés et leurs équipes. C’est d’ailleurs notre modèle. L’association de Geoffroy Goubin s’inscrit dans cette logique. En plus, Geoffroy dispose d’une compétence particulière en contentieux haut de bilan, pratique ayant connu une forte croissance en 2020 comme précisé plus haut.

Bougartchev Moyne Associés est reconnu en droit pénal des affaires et compliance, en contentieux civil et commercial ainsi qu’en contentieux ­réglementaire. Comptez-vous développer de nouveaux savoir-faire et/ou en renforcer certains ?
E. M.
Le droit pénal des affaires représente le cœur de notre activité, suivi de la compliance et des contentieux de nature réglementaire, civile ou commerciale. S’il est vrai que nous souhaitons renforcer nos capacités dans ces domaines, un positionnement sur les contentieux spécialisés tels que ceux de la faillite, de la concurrence, de la propreté intellectuelle ou en arbitrage demeure à l’ordre du jour. Certes nous traitons déjà des dossiers dans ces matières, mais notre objectif est de devenir la boutique de référence en contentieux des affaires tout en préservant une forte dominante en droit pénal des affaires.

"La grande tendance se résume à une sévérité accrue de la justice répressive"

Selon vous, quelles sont les grandes tendances actuelles en matière de droit pénal des affaires ? 
K. B.
D’une manière générale, la grande tendance se résume à une sévérité accrue de la justice répressive qui se traduit par le prononcé de peines significatives au point d’ailleurs que les infractions de droit pénal des affaires sont désormais plus durement sanctionnées que celles de droit commun.
Par ailleurs, j’observe que les droits de la défense sont de plus en plus méprisés. En témoignent les atteintes au secret professionnel des avocats ou l’affaire des fadettes. De même, la longueur des enquêtes préliminaires pose un problème d’accès aux dossiers puisque l’avocat ne peut les consulter pendant cette période qui peut durer plusieurs années. Pourtant, le procès pénal doit être équitable, contradictoire et respecter l’équilibre des parties. En pratique, ces principes ne sont pas ­appliqués.
Certes, la justice pénale s’est modernisée en offrant pour certaines infractions la possibilité de recourir à des modes alternatifs de règlement du litige comme la CRPC ou la CJIP. Mais ces avancées sont encore trop timides et parfois mal ­encadrées.

E. M. Au titre de la sévérité accrue, il faut noter le revirement jurisprudentiel en matière de responsabilité pénale des personnes morales dans le contexte d’une fusion-absorption. Désormais la société absorbante peut être poursuivie et condamnée pénalement pour des faits commis par la société absorbée avant la réalisation de l’opération de fusion-absorption. C’est un changement de paradigme absolu qui entraîne une nécessité de réaliser des due diligences plus poussées sur les cibles en amont d’une opération d’acquisition. Il faudra notamment examiner avec une attention particulière les risques encourus en matière pénale qu’ils soient certains ou probables. Dans certains cas et même en l’absence de toute procédure impliquant la société absorbée, les praticiens du M&A devront notamment revoir leurs modèles de franchises et de garanties de passif. 

L’innovation est au cœur de la pratique du cabinet. Comment cela se traduit-il concrètement ? 
K. B.
Nous essayons d’être inventifs dans notre approche des dossiers. Nous avons d’ailleurs contribué à la refonte de l’article 145 du CPC. Nous sommes aussi les premiers à avoir organisé la mise en examen, pour une autre cause, d’un détenu par visioconférence entre la France et les États-Unis d’Amérique sans laquelle il n’aurait pas été remis en liberté. Nous avons enfin été parmi les premiers à être saisis d’un rapport de contrôle de l’AFA et avons mis en œuvre la première CRPC de l’histoire du Parquet national financier (PNF) en matière de blanchiment de fraude fiscale. 
Dans notre soif d’innovation, nous intégrons également des éléments de droit comparé, ce qui nous incite à nouer des liens avec d’excellents cabinets aux quatre coins du monde. 

Le cabinet est très actif à l’international. Comment gérez-vous vos dossiers transfrontaliers ?
E. M.
Du fait de nos précédentes expériences professionnelles au sein de grands cabinets internationaux, nous bénéficions déjà d’un réseau de partenaires, que nous nous sommes attelés à développer dès l’ouverture de notre cabinet. Aujourd’hui, nous travaillons avec des confrères à travers le monde entier comme si nous faisions partie d’un réseau intégré.

K. B. Notre présence au sein des associations IBA et ABA a également favorisé la constitution de notre réseau de correspondants étrangers. Il en va de même de notre travail académique pour le compte de Chambers. En tant que contributing editors de leurs guides White Collar Crime et Anti-Corruption, nous participons au choix des cabinets à travers le monde qui rédigent les chapitres relatifs à leur pays.

"Nous sommes associés à la réflexion stratégique de nos clients"

Vous vous positionnez comme partenaires de vos clients et non seulement comme leurs avocats. Pouvez-vous nous en dire plus ?
K. B.
Notre approche consiste à établir une relation durable avec nos clients institutionnels en nous évertuant à découvrir ou à connaître davantage leur environnement économique, par-delà le traitement technique de leurs dossiers. Nous participons par ailleurs à la formation de leurs équipes et des membres de leur comex sur tous sujets dignes d’intérêt pour eux. 

E. M. Nous sommes enfin associés à leur réflexion stratégique notamment en termes de structuration de leur compliance en France comme à l’étranger. Nous ­intervenons aussi bien en amont pour anticiper les évolutions réglementaires qu’en aval dans le cadre notamment de contentieux réglementaires. Enfin, nous les ­accompagnons dans la gestion de leur ­communication de crise. 

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