Le dispositif ATT destiné à recueillir le consentement explicite des détenteurs d’Iphone pour le partage de leurs données personnelles afin de recevoir des publicités ciblées ne caractérise pas un abus de position dominante de la part d’Apple selon l’Autorité de la concurrence.

En pratique, l’App Tracking Transparency déclenche l’ouverture d’une fenêtre pop-up lors de la consultation d’une application téléchargée depuis l’Apple Store. L’utilisateur doit alors donner son accord explicite pour que l’entreprise derrière l’application ait accès à son identifiant IDFA et utilise ses données personnelles à des fins publicitaires. Propre à Apple, l’ATT permet notamment de suivre l’activité des personnes ainsi identifiées sur des sites tiers ou sur des applications reliées entre elles. La firme américaine estime ainsi renforcer la protection de la vie privée de ses clients.

Nécessité, objectivité et proportionnalité

Accompagnées par le cabinet Geradin Partners, des associations représentant les acteurs de la publicité en ligne (l’Interactive Advertising Bureau, la Mobile Marketing Association France, l’Union des entreprises de conseil et achat media ainsi que le Syndicat des régies internet) ont saisi l’Autorité de la concurrence 23 octobre 2020. Celles-ci contestent la mise en place de ce dispositif par la marque à la pomme, conseillée dans ce dossier par l'équipe des associés Hugues Calvet et Yelena Trifounovitch chez Bredin Prat. Selon elles, cela revient à imposer des conditions de transactions inéquitables aux développeurs d’applications sous IOS. Ces derniers seraient obligés de recourir à la sollicitation ATT pour accéder aux identifiants IDFA des utilisateurs, alors que les services publicitaires d’Apple eux, ont facilement accès à ces informations. Pour les plaignants, le RGPD et la directive ePrivacy obligent déjà les entreprises à obtenir un consentement similaire afin d’effectuer un suivi publicitaire de leurs potentiels clients. Ils se verraient donc imposer des obligations supplémentaires indues par les créateurs de l’iPhone. Pour les associations, c’est un abus de position dominante caractérisé de la part d’Apple (prohibé par l’article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne). Pour suspendre cette pratique anti-concurrentielle et donc de la mise en place de l’ATT, elles souhaitent obtenir le prononcé de mesures conservatoires.

Pour prendre une telle décision, l’Autorité de la concurrence doit s’assurer que les faits reprochés violent potentiellement le droit de la concurrence ou qu’ils portent gravement et immédiatement atteinte à l’économie générale, au secteur, à l’intérêt des consommateurs ou à l’entreprise plaignante. À cet égard, des professionnels de la publicité en ligne ont été auditionnés, des débats entre les parties ont été organisés et la Cnil a été consultée. Après cet examen préliminaire, dans une décision du 17 mars 2021, l’Autorité rejette la demande de mesures conservatoires et juge que l’abus de position dominante d’Apple, n’est pas caractérisé. Elle estime également que l’obligation de recourir à la sollicitation ATT n’apparaît pas comme dépourvue de nécessité, d’objectivité ou de proportionnalité : le RGPD et la directive ePrivacy ne s’opposent pas à sa mise en place. Elle décide par ailleurs de continuer l’instruction au fond, au cours de laquelle sera examinée plus particulièrement l’existence d’une forme de discrimination (ou "self preferencing") des opérateurs tiers de la part d’Apple.

Léna Fernandes

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