Un cabinet détenu par des non-avocats débarque aux États-Unis
C’est une opération inédite : le premier cabinet d'avocats dont le capital n’appartient pas à des avocats vient de voir le jour aux États-Unis. La création de cette structure singulière, qui porte le nom de Law on Call, résulte d’une autorisation de la Cour suprême de l’Utah visant à tester des modèles innovants de prestations de services juridiques. Le projet Law on Call est développé depuis une dizaine d’années par l’entreprise américaine et actionnaire de référence Northwest Registered Agent, qui fournit des services de formalités juridiques, administratives et fiscales aux entreprises, en leur proposant le savoir-faire d’agents agréés.
Programme pilote sur deux ans
Réinventant l'approche traditionnelle de l’offre de services juridiques aux États-Unis, Law on Call a été développé au sein de l'Utah Legal Sandbox, qui réunit des modèles de structures et de services juridiques innovants. Le projet pilote, programmé sur deux ans, est supervisé par l'Office of Legal Services Innovation, une division de la Cour suprême de l'Utah.
Law on Call a pour objectif de rendre les services juridiques accessibles à un grand nombre de justiciables. Drake Forester, responsable de la stratégie juridique de Northwest Registered Agent, relève en effet la difficulté d’accès au système judiciaire américain pour de nombreux particuliers et entreprises, faute de temps et de moyens financiers. Law on Call propose à ses clients de payer un forfait de 9 dollars par mois afin de bénéficier d’un accès téléphonique illimité aux avocats du cabinet, lesquels leur répondront tout de suite pour les conseiller sur des problématiques de droit des affaires, du travail, des contrats ou encore de l'immobilier. Law on Call garantit à ses clients des services de résolution juridique rapides et peu onéreux. La structure envisage par la suite d’étendre son intervention en Arizona puis dans d'autres États américains, dès lors que les restrictions sur la détention de cabinets d'avocats par des non-juristes seront levées. Trois avocats et deux assistants juridiques travaillent actuellement au sein de Law on Call, l'objectif étant à terme de recruter jusqu'à 100 avocats.
Traditionnellement, le capital social des cabinets d'avocats américains est détenu par des avocats, sans investisseurs extérieurs ou investisseurs de contrôle non avocats. En France, le sujet a été mis sur la table de nombreuses fois par les membres les plus entrepreneurs du barreau d’affaires mais reste pour le moment en suspens, voire tabou. La loi Macron pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques de 2015 prévoyait l’ouverture du capital des sociétés d'avocats (hors SCP) aux membres des professions judiciaires et juridiques établis en France, dans l’Union européenne ou dans un État membre de l’EEE ou de la Confédération suisse. L'ouverture des capitaux à des tiers, hors professions juridiques et judiciaires, suscite encore de nombreux débats. Si la profession d’avocats reste très divisée, certains y voient déjà des opportunités de financement et de développement non négligeables. Pour l’instant, la réglementation française est encore très éloignée de ce que l’on trouve en Angleterre ou en Australie par exemple, laissant l’idée d’actionnariat non avocat sur le palier d’une porte close.