C. Poisvert (Nomos) : "Il y a du positif à retirer de cette crise"
DÉCIDEURS. Quelques années seulement après avoir fondé votre propre structure, pourquoi avez-vous choisi de rejoindre le cabinet Nomos ?
Cédric Poisvert. Intervenir dans le secteur santé/pharma oblige à une certaine agilité, car l’activité des opérateurs de ce secteur soulève des questions dans de nombreux domaines du droit. Pour pouvoir leur offrir un accompagnement efficient, il est donc indispensable d’avoir une connaissance approfondie de leur activité, mais également d’aller au-delà du seul rôle d’expert du droit pour adopter une approche globale de leurs besoins. Il faut donc également savoir identifier, au-delà du sujet strictement santé/pharma, les autres sujets spécifiques et mobiliser, en conséquence, les experts en mesure de répondre.
C’est cette possibilité de pouvoir mobiliser les compétences les plus adaptées pour répondre aux besoins de nos clients qui a fait que mon association au sein de Nomos, après un partenariat de plusieurs années, était une évidence. Les synergies entre les différents départements de Nomos permettent en effet des interventions ciblées, avec pour seul objectif d’apporter une réponse pragmatique à nos clients.
Quelles synergies espérez-vous développer en créant la pratique du cabinet consacrée au droit de la santé et à l’industrie pharmaceutique ?
Notre partenariat a déjà permis de soumettre à l’épreuve de la réalité nos synergies. Ainsi, l’accompagnement, par exemple, d’acteurs du secteur pharmaceutique implique de pouvoir répondre à leurs besoins en propriété intellectuelle, en droit des données de santé, en droit fiscal, en droit social, en droit de la distribution, etc. Ainsi, à titre d’exemple, le département droit économique de Nomos a également des besoins en droit de la santé pour ce qui concerne la publicité ou la distribution auprès du grand public de produits et de services en santé ou assimilé. Nous entendons également renforcer notre présence en matière de santé animale.
Comment se compose votre clientèle ?
Ma clientèle est quasiment exclusivement composée d’opérateurs du secteur de la santé. Ainsi, j’accompagne des laboratoires pharmaceutiques, des sociétés de biotechnologie, des fabricants de dispositifs médicaux, des fonds d’investissement, notamment sur les aspects réglementaires de leurs activités ainsi que dans le cadre de leurs activités de recherche. Par ailleurs, j’interviens auprès d’établissements publics ou privés de santé ou du secteur médico-social et auprès des professionnels de santé pour structurer leurs activités (regroupement, contractualisation, audit, etc.) et prendre en charge, soit directement soit via leur assureur de responsabilité, leur défense en cas de mise en cause dans le cadre de contentieux civils, pénaux, administratifs ou disciplinaires.
"Les synergies entre les différents départements de Nomos permettent des interventions ciblées avec pour seul objectif d’apporter une réponse pragmatique à nos clients"
Sur quelles typologies de problématiques intervenez-vous ? Pouvez-vous nous partager vos plus belles réussites récentes ?
Le spectre d’interventions dans le secteur santé/pharma est large. Pour les industriels du secteur, j’interviens sur des questions réglementaires liées à leur statut ou leur activité (relations avec les professionnels de santé, qualification de dispositifs médicaux, etc.) mais aussi pour la rédaction et la négociation de contrats de partenariat notamment pour des recherches en santé. Enfin, ils nous confient la gestion de leurs contentieux portant notamment sur des sujets de rupture des relations commerciales ou sur des questions de responsabilité du fait des produits. Dans ce cadre, nous avons eu à traiter des contentieux très lourds concernant une mise en cause sérielle d’un produit de santé ou encore des demandes indemnitaires élevées, en raison de préjudices particulièrement lourds.
Concernant les établissements de santé et les professionnels de santé, nous les accompagnons dans toutes les étapes de leur activité, ce qui va de la mise en place de la structuration juridique de leur projet jusqu’au leur défense lorsque leur responsabilité est recherchée, notamment sur le plan disciplinaire ou pénal.
L’actualité est marquée par la pandémie de Covid-19. Vous a-t-on confié des dossiers en rapport avec la crise sanitaire ?
La crise sanitaire a bousculé l’activité des opérateurs du secteur de la santé avec, par exemple, les déprogrammations d’activités, le stand-by de certains projets, l’absence de visibilité de la reprise et surtout les nouvelles questions soulevées par ce contexte exceptionnel. Il a donc fallu être en mesure de s’adapter au mieux de leurs besoins quotidiens pour les conseiller au jour le jour, en proposant des solutions concrètes en prenant en compte la faible visibilité relative aux contraintes liées à cette crise. Il y a du positif à retirer de cette crise. En effet, avec un an de recul, cette situation a renforcé les liens avec nos clients pour lesquels nous avons eu à coeur d’être un conseil de proximité.
Vous intervenez aussi fréquemment en droit pénal. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre activité en la matière ?
Le droit pénal est une composante du droit de la santé car la plupart des sanctions prévues dans cette matière sont des sanctions pénales. À titre d’exemple, la réglementation dite anti-cadeau ou la réglementation en matière de transparence peuvent connaître des sanctions pénales. Il est donc indispensable d’inclure cette composante dans l’accompagnement de nos clients.
"Nous entendons renforcer notre présence en matière de santé animale"
Par ailleurs, la question de la responsabilité pénale médicale, notamment en cas de dommage dans le cadre des soins, est prégnante. En effet, on assiste à une pénalisation de plus en plus importante des rapports entre les individus, avec la recherche d’une responsabilité pénale personnelle, vécue comme étant moins déconnectée de l’humain qu’une responsabilité indemnitaire.
De plus, depuis ma prestation de serment, je participe à la défense pénale d’urgence mise en oeuvre par le bureau pénal de notre ordre, au début en tant que permanencier et désormais en tant que référent et tuteur. Il s’agit d’une nécessité que de pouvoir assurer, en tout lieu et en toutes circonstances, les droits de la défense. Vous êtes également chargé d’enseignements dans plusieurs universités.
Quelle matière enseignez-vous ? Qu’est-ce qui vous plaît dans cette activité ?
Enseigner, c’est s’enrichir. Cela vous oblige à tout mettre en oeuvre pour capter l’attention, intéresser vos étudiants à des matières qui peuvent parfois leur sembler lointaines, et surtout être en mesure de répondre aux questionnements que soulèvent vos enseignements.
J’ai la chance de pouvoir enseigner en master 2 le droit de la déontologie professionnelle, ainsi qu’au Conservatoire national des arts et métiers, dans plusieurs diplômes, notamment le droit des usagers du système santé et le droit de la responsabilité. Certains étudiants sont des professionnels de santé qui ont une approche pratique des sujets juridiques, ce qui conduit à échanges tellement enrichissants. Ce sont les échanges avec les étudiants qui donnent toute sa substance à cette activité d’enseignement.