J. Guénot (AXA XL) : "Le groupe Axa a pris conscience du rôle clé que joue l’assurance en tant que catalyseur du développement"
Décideurs. Lorsque nous nous sommes vus il y a deux ans, AXA avait racheté le groupe XL deux ans auparavant. Que s’est-il passé depuis ?
Julien Guénot. Quand nous nous sommes quittés il y a deux ans, c’était une première étape. Le Groupe AXA a fait le pari stratégique de recentrer son activité sur le dommage ; avant cela, le groupe était focalisé principalement sur l’assurance-vie. Depuis février 2020, une nouvelle organisation, pour AXA XL, a été pilotée par Scott Gunter, un nouveau directeur général à l’échelle mondiale. Il a modifié notre organisation pour que nous nous rapprochions de nos marchés et de nos clients, en partant du principe que, dans le monde de l’assurance des entreprises, chaque marché a sa façon de faire.
Pour l’assurance des entreprises, trois Business Units ont été créées. La première est celle à laquelle nous appartenons en France, qui couvre l’Asie pacifique et l’Europe. Elle a quatorze bureaux dans le périmètre, mais couvre davantage de marchés. La deuxième est le marché Anglais et du Lloyd’s, une place de marché par nature grossiste et au fonctionnement singulier. La dernière est consacrée au marché nord-américain, lui aussi très différent du nôtre. Cette organisation est en place depuis un an et demi, environ. Et ça fonctionne. Pourquoi ? Parce que nous sommes en ordre de marche, tant du point de vue de l’accompagnement de nos clients que de nos process en interne.
Aujourd’hui, notre objectif est de poursuivre notre croissance de manière profitable ; pour cela, on opère sur la quasi-totalité des branches d’assurance, en endossant un rôle de leader : on les accélère, on les redresse techniquement par rapport à l’évolution et à l’interconnexion des risques, on les complète avec des services pour offrir des solutions à long terme qui soient pertinentes et adaptées aux besoins de nos clients et de nos courtiers.
"Notre place de leader nous offre un poste d’observation privilégié, que l’on peut mettre à contribution"
Le sujet des risques en interconnexion prend-il de l’ampleur, pour vous ?
C’est un sujet d’actualité. Le débat actuel est concentré sur les risques émergents, qui se traduisent par des pertes fracassantes, aujourd’hui et dans le futur. Ce sont des éléments qu’on n’avait pas forcément imaginés il y a quelques années. Pour le risque climatique, par exemple, imaginait-on l’effet qu’auraient les risques liés au climat sur le monde de la supply chain ?
Dans un autre registre, on voit aujourd’hui certains actionnaires se retourner contre le comité exécutif d’une entreprise car ils considèrent que ses dirigeants ne vont pas assez vite dans la mise en place de critères ESG. Il y a deux ans, c’était inimaginable.
À l’échelle du groupe AXA, quelles sont les priorités ?
Le Groupe, un leader sur notre marché, a deux aspects fondamentaux dans son approche : le développement économique et le progrès humain.
Le premier aspect est envisagé en lien avec nos valeurs environnementales. Le Groupe AXA a pris conscience très tôt du rôle clé que peut jouer l’assurance en tant que catalyseur du développement et du changement. Ça passe par de l’investissement, par la souscription des risques de nos clients, mais aussi par l’accompagnement. Le Groupe a ainsi lancé l’AXA Climate Academy, ouverte à tous, qui permet de former entreprises, étudiants et élèves aux thématiques du changement climatique. C’est un module en ligne sur LinkedIn que nous avons adapté aux besoins des entreprises. Une entreprise du CAC40 qui avait besoin de s’ouvrir au sujet en a récemment bénéficié. Une version sur-mesure leur a été proposée pouvant être déclinée et adaptée à toute entreprise. Le Groupe a une influence sur la prise de conscience du problème, sur son impact économique, sur les outils qui peuvent être mis en place. Notre place de leader nous offre un poste d’observation privilégié, que l’on peut mettre à contribution.
Le deuxième axe tient à l’humain et la santé. AXA a porté la co-construction, avec Microsoft, d’une plateforme pour accompagner le parcours client dans des marchés peut-être moins évidents que le système français de la mutuelle. Elle est déployée dans plusieurs pays dans lesquels le Groupe opère et où nous apportons une solution qui complète l’offre proposée par les pouvoirs publics de certains pays.
"Nous avons besoin d’accompagner le changement dans l’entreprise et, pour ce faire, d’attirer les meilleurs talents"
Et la santé mentale, sujet mis en lumière par ces deux années de crise ?
Nous avons pris conscience du risque lié à la santé mentale. C’est devenu un sujet incontournable, dont on ne mesure peut-être pas encore totalement les effets. C’est aujourd’hui compliqué de connecter ce risque à un risque d’entreprise déjà connu, qui pourrait avoir un impact sur ce que nous savons assurer. Mais dans deux ans, je suis intimement convaincu que je serai capable de vous répondre.
Le Groupe est l’un des premiers acteurs à avoir encouragé le développement d’un environnement de travail flexible et hybride, ce que nous appelons le smart working. Il s’est également engagé sur l’accompagnement à la paternité, et sur l’équilibre vie privée/vie professionnelle. C’est un atout fort de notre marque employeur, qui nous rend attractifs.
À ce propos, comment se porte le volet recrutement ?
Nos recrutements sont dynamiques. Nous avons besoin d’accompagner le changement dans l’entreprise et, pour ce faire, d’attirer les meilleurs talents. Nous recevons beaucoup de candidatures. AXA XL jouit aujourd’hui d’une très forte attractivité, qui lui vient de sa position de leader sur le marché, et de son appartenance au groupe AXA. C’est plus qu’une marque : il y a un but, une exécution mondiale qui est visible. Surtout, on essaie d’attirer des talents qui viennent d’autres horizons.
"Nous prêtons par ailleurs une attention toute particulière à la sélection de nos risques : une société légère sur le plan de la prévention ne pourra pas être couverte"
Le groupe cultive-t-il une raison d’être ?
Le Groupe a une philosophie très claire, une raison d’être affirmée et alignée dans toute sa stratégie. Je pense que c’est important, étant donné le rôle fondamental de l’assurance comme catalyseur de développement économique.
Au sein d’AXA XL, l’une de nos priorités est de redonner toute sa place à la vision client. Cela passe par l’échange, la co-construction de solutions - avec nos assurés, nos courtiers, et le reste du marché. Le triptyque assureur-courtier-client est fondamental dans l’assurance des grands risques et doit continuer à être valorisé.
Quid du risque cyber ?
Le rôle de l’assurance cyber est d’apporter une analyse de risque, une capacité d’évaluer et de déterminer la matérialité du risque et de proposer des solutions de transfert. L’évolution du risque et surtout des expositions des entreprises font qu’on ne parle plus du même risque qu’il y a cinq ans. Le sujet des données sous le RGPD est moins impactant, par exemple.
Le sujet du cyber, aujourd’hui, porte sur la possibilité d’une entreprise à poursuivre son activité en cas d’incident. On doit pouvoir l’accompagner le jour où il y a un sinistre. Le marché est en recherche de solutions pour répondre à ce risque en pleine évolution. Ceci étant dit il ne s’agit pas d’une question purement assurantielle et nous travaillons avec des experts pour accompagner nos clients dans la prévention de leurs risques et lorsqu’un incident survient. Nous prêtons par ailleurs une attention toute particulière à la sélection de nos risques : une société légère sur le plan de la prévention ne pourra pas être couverte.
Propos recueillis par Emmanuel Ojzerowicz et Olivia Fuentes