L’Euro 2016 est un véritable vecteur de développement pour les villes hôtes de l’événement. Une organisation qui a néanmoins un coût. La facture des chantiers de construction ou de rénovation s’élève à 2,6 milliards d'euros, dont 1,7 milliard pour les collectivités locales. Dans ces domaines, les projets les plus emblématiques sont ceux de Lille et de Lyon avec d’un côté un partenariat public privé et de l’autre un projet 100 % privé.

1- Risque financier : Lille

 

À elle seule, l’enceinte du stade des lumières de Lyon a coûté 410 millions d’euros, soit cinquante millions d’euros de plus que les premières estimations. En 2007, pour lancer le projet, Jean-Michel Aulas lève cent millions d’euros en introduisant en Bourse son club de football. Il travaille également avec la Banque Rothschild  pour élaborer un plan de financement comprenant d'autres partenaires privés tels que des groupes hôteliers et des restaurants. Par la suite, Lyon a réalisé deux émissions obligataires de cent millions d’euros. Au total, le club aura versé 390 millions d’euros pour s’offrir son nouveau stade. Les vingt millions restant ont été apportés par des dotations publiques à l’occasion de l’Euro 2016. Si le potentiel est énorme, le risque financier qui pèse sur l’Olympique lyonnais est immense. Une simple non qualification en Ligue des champions suffirait à faire perdre plusieurs dizaines de millions d’euros de revenus.

 

De son côté, le Stade Pierre-Mauroy est un partenariat public-privé. Sur les 324 millions d’euros, 74 % sont pris en charge par Eiffage et 26 % par les collectivités locales. Quant au club du Losc, il devra payer 4,5 millions d’euros par an pour exploiter le stade le jour de match. Les recettes qu’il y réalise lui appartiennent en majeure partie. Et, contrairement à l'Olympique Lyonnais, le Losc s'est couvert contre d'éventuelles mauvaises performances sportives. En cas de relégation en Ligue 2, le loyer ne serait plus que d’environ deux millions d'euros, auxquels s'ajouteraient 20 % des recettes de billetterie. 

 

2- Coût pour la collectivité : Lyon

 

Seul projet porté à 100 % par son club, le stade des lumières n’a coûté « que » 207 millions d’euros aux deniers publics : vingt millions en dotations publiques pour l’Euro 2016 et 187 millions payés par les collectivités locales pour l’aménagement des abords de l’enceinte et la construction de nouvelles routes d’accès. Pour Lille, l’addition est plus salée. Au totale, la facture s’élève à  559 millions d’euros. La plus grande partie de ce montant provient de la redevance annuelle de dix millions d’euros que devra verser la communauté urbaine de Lille (LMCU) pendant les trente-et-un ans à venir à Eiffage, choisi pour l'exploitation du stade.

 

3- Revenus les jours de match : Lyon

 

Grâce à son enceinte qu’il vient d’inaugurer, Lyon espère engranger des recettes conséquentes. À terme, il compte réaliser cinquante millions d’euros de revenus par an, contre seulement 14,6 millions l’an passé. Du côté de Lille, les chiffres sont beaucoup moins impressionnants mais bien réels puisque le stade est ouvert depuis trois ans déjà. Au cours des trois dernières saisons, le Losc a réalisé une recette annuelle moyenne de 13,3 millions d’euros, contre 5,2 millions auparavant. Un écart qui s’explique notamment par la différence de capacité entre les deux enceintes : le stade des lumières est doté de 59 186 sièges, contre 50 156 pour le stade Pierre-Mauroy. De plus, le projet de Lyon a été pensé comme un vrai parc d’attractions : boutiques, loges VIP, restaurants et hôtels sont autant de sources de revenus supplémentaires pour le club.

 

4- Revenus les jours sans match : Lille

 

En dehors des matchs de football, Jean-Michel Aulas souhaite accueillir une dizaine d'événements majeurs par an. Seul problème, les artistes ou événements capables de remplir un stade de cette taille-là ne courent pas les rues et ceux qui le peuvent privilégient bien souvent Paris. Une stratégie risquée donc. Au contraire de Lille, qui a fait le pari de se doter d’une structure permettant une plus grande diversification des spectacles. Grâce à sa toiture amovible en trente minutes et à sa pelouse rétractable, le stade de Lille se transforme en zénith. Rihanna, Johnny Halliday ou encore Patrick Bruel s’y sont déjà produits. Le stade de Lille sait également s’ouvrir à d’autres sports : le tennis avec la finale de la Coupe Davis, le basket avec les phases finales de l’Euro 2015 et le handball avec les mondiaux de 2017.

 

5- Retombées économiques : Lyon

 

Les travaux de construction ont permis de créer près de 700 emplois à Lille et 1 500 à Lyon. L'exploitation du site lillois mobilise environ 150 emplois permanents. Pour le stade des lumières, les premières estimations faisaient état d’un doublement des effectifs pour atteindre près de 2 000 salariés. L’afflux de spectateurs permettra de développer l’activité économique des agglomérations (commerce et hôtellerie principalement). Dans les deux cas, ce sera loin d’être suffisants pour compenser les investissements publics.

 

Résultat : Lyon : 3 – Lille : 2

 

Le projet 100 % privé de Jean-Michel Aulas révolutionne le secteur. Pensé comme un parc d’attractions, le stade des lumières devrait gonfler les recettes du club et booster les retombées économiques de l’agglomération. Mais le pari de l’entrepreneur lyonnais est encore loin d’être gagné. Une non-qualification en Ligue des champions pour la prochaine saison serait dramatique pour le club. Si les objectifs du stade de Lille sont moins ambitieux, ils sont aussi moins dangereux. Surtout, trois ans après son inauguration, il a montré qu’il savait être viable. Le stade des lumières saura-t-il en faire autant ?

 

V. P.

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