Michel David est le dirigeant-fondateur du cabinet de recrutement Creative Value. Sa particularité ? Il travaille exclusivement avec des fonds de private equity dans la mise en place de managers investisseurs tels que des operating partners, board members, CEO ou CFO. Rencontre.

Décideurs. Quel est votre mode d'intervention lors d'une auction organisée par une banque d'affaires ?

Michel David. Lors d'une mise aux enchères ou en amont d'un dossier prêt à sortir, plusieurs fonds d'investissement peuvent m'appeler. Les sponsors souhaitent savoir quel est mon angle sur l'entreprise qu'ils convoitent. Deux cas de figure se présentent alors. Soit il s'agit d'un MBI et dans ce cas le financier ne se lancera dans l'opération que s'il a un dirigeant à même de conduire l'entreprise. Le rôle de Creative Value est donc de l'identifier en amont du deal et de le proposer au fonds. Soit le CEO est en place et je vais alors m'atteler à apporter une autre vision du business que celle de la banque d'affaires. Si jamais je connais le manager (Creative Value a pu le recruter dans le cadre d'un LBO précédent), on va pouvoir court-circuiter la banque et faire bénéficier au fonds d'un accès au management. Cela lui permettra de créer un premier lien avec cette équipe de direction, ce qui peut avoir de réelles retombées sur l'issue du deal. À défaut de connaître le CEO, et sans hypothèse de MBI, le rôle du ou des advisors investisseurs devient très pertinent. Dans tous les cas, l'équipe est trouvée très rapidement (48h/72h).

 

Décideurs. Et lorsqu'une dizaine de fonds se pressent aux enchères, cela ne vous pose pas de problèmes ?

M. D. Les probabilités de succès sont nettement réduites quand de nombreux candidats se manifestent. Pour le manager investisseur, le fonds et moi-même. Aujourd'hui, je commence par évaluer la motivation du sponsor dans sa volonté de rachat de l'entreprise. L'un des bons moyens est de lui faire comprendre que j'ai un angle intéressant mais que les discussions n'auront vraiment lieu que s'il passe le premier tour des enchères. Au second tour, nous signons un contrat d'exclusivité bilatérale. Par ailleurs, le rôle du manager investisseur devient crucial. En fonction des valorisations proposées et de sa connaissance profonde du marché, il va pouvoir se prononcer pour ou contre le deal. Lorsqu'il décide de ne pas y aller, c'est en général une très bonne indication pour le fonds – qui devrait en faire de même.

 

Décideurs. Les rachats par les fonds s'accompagnent parfois de recours à une équipe de direction extérieure (MBI). Quelle est alors votre approche ?

M. D. Le MBI en auction créé une vraie zone d'inquiétude pour le GP. Certains fonds refusent catégoriquement d'aller sur une opération où le management quitte le navire. Lorsque le CEO réinvestit son argent et passe au conseil d'administration de la société, la recherche d'un nouveau CEO pour le MBI peut se réaliser : ce dernier aidera le fonds dans ses études de marché, rédaction de business plan...

 

Décideurs. Quel est votre rôle dans le cas où un manager investisseur fait face à de vraies difficultés après avoir été installé au volant de l'entreprise ?

M. D. Durant toute la vie d'une participation, je fais des points réguliers avec le dirigeant en place. Parallèlement, je vois aussi les actionnaires financiers de manière à recueillir leur avis sur l'administration de leurs sociétés. L'un dans l'autre, j'observe continuellement leur travail, et surtout, je pèse le pour et le contre de chaque côté. Si jamais un problème émerge, il arrive que je donne un conseil « light » au CEO, mais cela reste toujours à la marge de ce que les actionnaires peuvent décider de faire. Ils ont évidemment la faculté de le licencier même si je n'ai jamais rencontré pareille déconvenue jusqu'ici. Le cas échéant, je serais obligé de trouver un remplaçant, ce qui est très ennuyeux. Je ne crois pas au modèle de la short-list d'une dizaine de managers potentiels pour un poste, c'est toujours la rencontre entre un ou deux entrepreneurs avec un projet. Au final, c'est toujours le fonds qui a le dernier mot, à condition que le manager souhaite y aller. Je fais part de mon sentiment mais nul n'oblige personne à y aller. Mon rôle a ses limites…

 

FS

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