Christophe Harrigan (La Mutuelle générale) : « Le DAF doit s’adapter à la dynamique opérationnelle »

Décideurs. Quelle est la plus-value de la fonction finance dans l’élaboration du futur du groupe ?

Christophe Harrigan. Au sein du comité exécutif, la direction financière contribue à définir la véritable identité du groupe avec ses forces et ses faiblesses. Notre rôle est aussi d’anticiper le paysage dans lequel nous allons évoluer. Nous intervenons alors pour imaginer avec la direction générale les trajectoires les plus appropriées pour atteindre l’ambition stratégique. L’agilité de l’entreprise est renforcée lorsque la direction financière est en capacité d’émettre les bonnes alertes vis-à-vis de la stratégie suivie. Nous avons dès lors développés des outils permettant de fournir rapidement une information financière fiable et pertinente. La valeur ajoutée que nous apportons permet d’insuffler un sentiment essentiel pour tout projet de transformation : la confiance.

La communication est décisive dans votre fonction. Comment parvenez-vous à emporter l’adhésion de vos interlocuteurs ?

L’essentiel est de s’adapter au degré d’expertise de son auditoire. Il est parfois pertinent de vulgariser son propos afin de rendre les messages plus accessibles. La question de la pédagogie est indissociable de la communication en entreprise. Tout sujet abordé doit préalablement être présenté en résumant les principaux enjeux et mécanismes qui le sous-tendent. Il est parfois efficace d’illustrer un thème en faisant référence à des problématiques du quotidien de tout un chacun. La communication est devenue essentielle puisqu’un message qui n’est pas correctement transmis ou qui est mal formulé, est un message qui n’existe pas.

Une posture centrée sur l’immobilisme et les contraintes de coûts constitue un danger

Quelles sont les spécificités du secteur mutualiste pour la direction financière ?

Une mutuelle ne distribue pas de dividendes car elle n’a pas d’actionnaires. Tous les résultats remontent dans les fonds propres et servent à financer sa marge de solvabilité et son développement. Son objet est donc celui de l’économie sociale, solidaire et non lucrative. Il n’est donc pas dans l’intérêt d’une mutuelle de dégager des marges trop excédentaires. Ensuite, la gouvernance est différente des modèles classiques car la mutuelle est contrôlée par ses adhérents qui sont représentés dans l’assemblée générale et le conseil d’administration. Dans ce système où un homme représente une voix, si les prestations d’assurance ne répondent pas aux attentes de l’ensemble des assurés adhérents, ceux-ci ont la possibilité de les faire évoluer. La mutualisation des risques permet de proposer des contrats à des coûts raisonnables pour tous et respectant des principes de solidarité.

Le métier de directeur financier est-il le même qu’il y a dix ans ?

Le directeur financier aide la direction générale à définir sa stratégie vis-à-vis de risques exogènes et endogènes. Sa mission est toujours la même mais il est encore mieux armé qu’avant pour y répondre. La direction financière doit apporter de la souplesse et de l’intelligence pour s’adapter à la dynamique opérationnelle. Elle doit aussi trouver des éléments pour compenser financièrement l’absence de croissance le cas échéant. Notre vigilance est permanente pour ne pas rester statique et nos travaux de veille sont indispensables pour répondre aux futures ruptures du marché. Dans ce contexte, le directeur financier n’est qu’un membre d’une équipe, le comité exécutif, soudée autour d’une direction générale et d’un conseil d’administration. Cette humilité est source de grandes victoires. L’isolement est un danger, tout comme une posture centrée sur l’immobilisme et les contraintes de coûts… Afin de bien capter l’information à forte valeur et de la digérer pour faciliter le pilotage général, le directeur financier se doit d’être un partenaire et un support de toute l’entreprise.

Propos recueillis par Thomas Bastin