2018 s’annonce comme une année charnière pour les banques privées. Dans un secteur en pleine évolution, Béatrice Belorgey détaille les changements induits par l’entrée en vigueur du règlement Mifid 2 et précise les projets de la banque privée qu'elle dirige.

Décideurs. L’entrée en vigueur de la réglementation Mifid 2 bouleverse-t-elle le business model de la banque ?

Béatrice Belorgey. Pour se rendre compte des implications concrètes de cette réglementation, il va falloir attendre douze à dix-huit mois. Au-delà de la question des coûts supplémentaires pour nos clients, ce qui est certain, c’est que cela nécessite de se doter d’outils informatiques spécifiques, ce qui va représenter un coût non négligeable. Au quotidien, Mifid 2 transforme de façon significative notre façon de travailler puisqu’il modifie la manière dont une transaction pourra être conclue. En 2018, il faudra opérer en trois étapes. Le banquier privé devra tout d’abord présenter les coûts associés à la souscription du produit qu’il envisage de proposer, puis, contrôler que ce produit est compatible avec le profil de son client. Si tel est le cas, s’ouvre la phase pendant laquelle le banquier privé peut effectivement présenter ce produit à son client puis, si celui-ci choisit d’y souscrire, un autre test doit être mené lors de l’exécution de la transaction puisqu’elle n’est pas nécessairement concomitante au premier test. Ce processus doit être documenté et conservé par la banque, ce qui implique de se doter d’outils informatiques appropriés. Certes, cette procédure s’avère plus longue et plus coûteuse qu’auparavant, mais elle renforce les liens entre la banque et son client.

« Les clients, quels que soient leur âge et niveau de fortune, veulent gagner en autonomie »

Quelle est votre politique en matière de tarification ?

Depuis 2012, nous avons mis en place un système combinant un forfait fixe et une commission de gestion sur les encours confiés. Il existe également un forfait all inclusive pour la gestion sous mandat. Nous sommes donc en avance dans le domaine. L’année 2018 marquera l’adaptation de nos tarifs mais il n’y aura pas de modification de fond. La principale nouveauté réside dans la discussion que les banquiers privés devront avoir avec leurs clients avant de leur proposer un produit.

 

Comment, dans ce contexte, parvenir à se distinguer de la concurrence ?

Par la force des choses, Mifid 2 va pousser les acteurs du secteur à renforcer la segmentation de leurs offres. Tout l’enjeu est de parvenir à proposer la bonne offre, au bon prix, au bon client. Nous accompagnons une clientèle disposant d’un patrimoine financier sur nos livres d’au moins 250 000 euros. Notre spectre d’intervention est donc très large et, pour tirer notre épingle du jeu, nous travaillons à segmenter davantage nos offres pour nous démarquer de nos concurrents. Pour les patrimoines supérieurs à cinq millions d’euros, nous sommes en concurrence directe avec les pure players. Pour les patrimoines inférieurs à ce seuil, nous devons nous distinguer des banques plus généralistes et, pour les clients les plus affluent, des robo-advisors. Pour y parvenir, BNP Paribas Asset Management a pris une participation majoritaire dans Gambit Financial Solutions, une fintech belge spécialisée dans les solutions digitales de conseil en investissement. Aujourd’hui, la personnalisation est le maître-mot pour des clients de plus en plus exigeants, aspirant à des services sur mesure et toujours plus de réactivité. 

« Proposer la bonne offre, au bon prix, pour le bon client »

La gestion conseillée constitue-t-elle un axe de votre développement ?

Absolument. Par ce biais, des propositions d’arbitrage (conformes à notre stratégie d’investissement) sont adressées par le net (avec alerte SMS) ou par courrier à nos clients, selon leur degré d’appétence au digital. Quelle que soit la forme que revêtent nos recommandations, nous veillons bien entendu à ce qu’elles soient compatibles avec leurs profils clients.

 

Quels sont les autres projets de la banque ?

Nous accélérons notre transformation digitale. Outre l’étude sur l’opportunité de proposer un robo-advisor, nous misons beaucoup sur le selfcare. Les clients, quels que soient leur âge et leur niveau de fortune, veulent gagner en autonomie et en rapidité d’execution. À nous de les contenter en leur permettant, par exemple, d’utiliser la signature électronique (prévue pour le premier trimestre 2018). Nous venons de lancer une plate-forme accessible à tous nos clients, avec des horaires d’ouverture étendus, qui leur offre une assistance pour toutes les opérations de banque du quotidien. Nous allons également inaugurer un service entièrement à distance baptisé « i-private » qui proposera à son utilisateur la même offre, de même qualité, aux mêmes tarifs que le service « classique ». La seule différence réside dans le fait que le client pourra contacter directement les experts dont il a besoin, sans passer par l’intermédiaire de son banquier privé. Cette offre requiert un investissement accru en matière d’outil de CRM.  

Propos recueillis par Sybille Vié

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