À la suite du déclenchement du conflit entre la Russie et l’Ukraine, Euler Hermes corrige ses prévisions économiques pour l’année 2022 et évalue à 65% la probabilité d’une escalade du conflit avec des conséquences mesurées sur les marchés financiers.

Côté européen, Euler Hermes alerte sur les risques de transmission des chocs via trois canaux : les marchés financiers, l’énergie et le commerce international. La dépendance énergétique de nombreux États européens à la Russie fait peser une menace sur leurs économies. L’étude souligne néanmoins qu’il n’est pas dans l’intérêt des Russes d’interrompre totalement l’approvisionnement, car cela réduirait drastiquement leurs revenus. Dans le cas le plus probable, le conflit produirait une augmentation des prix et une réduction des volumes : les prix restant alors dans la fourchette 75-90  €/MWh jusqu'à l'été. Dans le pire scénario, avec une interruption totale de l'approvisionnement de l’Europe en gaz, son prix pourrait grimper jusqu'à une moyenne de 140 €/MWh.

L’Europe est dans une position privilégiée. Là où le Vieux Continent représente 40% des échanges commerciaux russes, la Russie ne totalise que 5% du commerce européen.

l'énergie : le canal de transmission à surveiller 

À l’inverse, dans le rapport de force commercial, l’Europe est dans une position privilégiée. Là où le Vieux Continent représente 40% des échanges commerciaux russes, la Russie ne totalise que 5% du commerce européen, et 2 % pour la seule zone euro. Les détériorations des relations entre les deux parties, depuis des années, ayant contribué à réduire les liens commerciaux.

Euler Hermes temporise également les effets du conflit sur le secteur financier. Côté russe comme du côté européen, des mécanismes d’ajustement existent dans le cas de sanctions internationales drastiques. Depuis 2014, la Russie a ainsi développé une alternative au réseau SWIFT, le SPFS, un système d’ordre de virements disposant d’un réseau de 400 banques, dont 23 internationales, basé notamment en Allemagne et en Suisse. Les sanctions financières auraient, en revanche une incidence plus sévère sur les banques russes si elles vont jusqu’à l’interdiction de conversion des roubles dans des monnaies plus fortes : l’euro ou le dollar, entre autres.

Un choc qui, malgré tout, se transmettrait de manière limitée en Europe car les banques européennes sont faiblement exposées aux actifs russes. En France notamment, les créances russes détenues par les banques ne représentent que 0,5 % du volume total des créances étrangères.

Les effets sur les marchés financiers dépendront de deux paramètres : l’ampleur de l’engagement militaire de l’OTAN – et des Etats Unis - et l'intensité des restrictions sur le marché de l’énergie

Un cessez-le feu peu probable

Si la Russie de Vladimir Poutine est dans une position moins vulnérable qu’en 2014, la stabilité de ses marchés dépendra du degré des sanctions appliquées par l’Europe et les États-Unis. Plus le pays sera isolé plus le choc économique sera rude. À date, l’étude note qu’il est peu probable que le pays remplace autant de partenaires commerciaux, étant donné que 85 % des exportations de gaz russe sont destinées à l’Europe. À titre de comparaison en Chine, pays moins hostile aux échanges avec la Russie, les achats à Gazprom ne représentent que 10% du total de des importations, même si celles-ci sont en augmentation.

Globalement, les effets sur les marchés financiers dépendront de deux paramètres : l’ampleur de l’engagement militaire de l’OTAN – et des Etats Unis - et le degrés et la durée des restrictions sur le marché de l’énergie. En tout état de cause, l’économie mondiale devra faire face à une escalade du conflit liée à l’augmentation des sanctions internationales, une probabilité qu’Euler Hermes évalue à 65 %. À l’inverse, un cessez-le feu n’est envisagé qu’à 10% et le pire scénario, le cas d’une rupture totale des liens entre la Russie et l’Ouest, à 20 %. Dans le cas d’une escalade du conflit, l’inflation pourrait atteindre en Europe 4,8 % cette année contre 1,8 % si le conflit n’avait pas eu lieu et le taux de défaillances d’entreprises pourrait grimper de 3,8 % par rapport aux précédentes estimations.

Céline Toni

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