La société d’investissement lance Ardian Real Estate dédié à l’immobilier tertiaire européen. Bertrand Julien-Laferrière, ancien directeur général de SFL, va diriger cette nouvelle activité, qui vise un volume de deux milliards d’euros d’actifs gérés à horizon 2020. Entretien.

Décideurs. Vous venez d’être nommé responsable de la nouvelle activité d’Ardian, en immobilier. Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre le groupe créé par Dominique Senequier ?

Bertrand Julien-Laferrière. Je connaissais Ardian de nom et de réputation, ainsi que la formidable réussite de ses équipes, et j’avais eu l’occasion d’échanger avec Dominique Senequier au cours des deux dernières années sur ce sujet de l’immobilier. La croissance du groupe est très forte. En dix-huit mois, la société est passée de 36 milliards de dollars d’actifs sous gestion à 50 milliards, et l’idée est maintenant de développer une nouvelle activité, l’immobilier, un secteur très porteur qui attire des volumes considérables de capitaux ces dernières années. Parmi les 350 investisseurs qui font aujourd’hui confiance à Ardian, certains s’intéressent beaucoup à cette classe d’actifs. L’objectif est de développer une activité de long terme, avec une logique de fidélisation de nos investisseurs et de constitution d’un portefeuille d’actifs de qualité, comme cela a été fait pour les autres activités du groupe. Cette diversification s’inscrit dans la stratégie d’Ardian d’être un « global player » au niveau mondial.

 

Décideurs. Quelle est votre feuille de route à la tête d’Ardian Real Estate ?

B. J.-L. Notre stratégie d’investissement vise à constituer un portefeuille de deux milliards d’euros d’actifs sous gestion dans les cinq prochaines années dans les plus grandes métropoles d’Europe continentale, notamment en Allemagne, en Italie et en France, et de nous concentrer sur l’immobilier tertiaire (non résidentiel). Nous excluons volontairement Londres qui est un marché très encombré. Notre logique d’investissement sera une combinaison de trois éléments : l’appétit de nos investisseurs pour l’immobilier ; notre propre capacité à constituer des équipes en Europe continentale, proches du terrain ; et les conditions de marché permettant de créer de la valeur pour nos investisseurs.

 

Décideurs. Sur quelles typologies d’actifs comptez-vous vous positionner ?

B. J.-L. Des actifs de bureau et de commerce core+ ou value-added en région parisienne, mais aussi dans les grandes villes allemandes, ainsi qu’en Italie, à Milan ou à Rome, et pourquoi pas à Bruxelles ou Varsovie si les opportunités se présentent… Nous visons une certaine taille d’actifs comme des portefeuilles transnationaux et nous aurons recours à un effet de levier adapté à la typologie et au niveau de risque des opérations. Nous nous inscrivons clairement dans une logique de valeur ajoutée pour nos clients.

 

Décideurs. Quelle lecture faites-vous du marché immobilier ?

B. J.-L. Les volumes de capitaux qu’il attire sont considérables, les taux d’intérêt élevés  et les prix des actifs le sont donc aussi. Les niveaux de professionnalisme sont très variables, certaines opérations ont fait l’objet d’une véritable analyse, d’autres nous paraissent plus hasardeuses. Mais, dans l’ensemble, il y a un sujet dont on parle assez peu, la valeur d’usage du produit, qui est une notion très importante et que j’ai toujours défendu lorsque j’étais chez Société Foncière Lyonnaise (SFL). Répondre aux besoins des occupants d’un immeuble est fondamental et pour cela, il faut s’intéresser au produit et être à l’écoute de ce que veulent les utilisateurs, c’est une évolution du métier qui va devenir de plus en plus incontournable pour tous les investisseurs immobiliers et les forcer à faire évoluer leur façon de travailler.

 

Décideurs. On voit de grands groupes faire le choix de quartiers qui ne sont pas habituellement dédiés aux bureaux pour s’implanter ou implanter certaines de leurs filiales. Qu’en pensez-vous ?

B. J.-L. Ces nouvelles typologies d’entreprises font évoluer la structure du marché immobilier de bureaux. Auparavant, des arrondissements comme le 2e, le 10e ou le Marais étaient délaissés alors qu’aujourd’hui, ils retrouvent une certaine vigueur sous l’effet de la dynamique enclenchée par la nouvelle économie. Ces lieux proposent de nouvelles formes de travail et sont plus ouverts sur leur environnement extérieur, ce qui séduit la nouvelle génération. Il y a là l’émergence d’un nouveau paradigme en immobilier, avec cette nouvelle offre de bureaux et les nouveaux modes de travail qu’elle propose comme le co-working. Prenez l’exemple de l’immeuble Cloud, dont la réalisation a été lancée lorsque je dirigeais SFL. C’est une opération assez unique, située rue du Quatre-Septembre et donc a priori en marge du quartier central des affaires, qui se loue pourtant à des loyers records à de très belles entreprises, sous le double effet des modes de travail innovant qu’elle propose et de l’évolution des attentes de la nouvelle économie.

 

Propos recueillis par Sophie Da Costa

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