S’il a fallu trois confinements pour en arriver là, le télétravail semble s’être inscrit partout, dans les aspirations comme dans les pratiques des salariés. L’occasion d’identifier quelques tendances paneuropéennes relatives au bureau.

SFL a publié les résultats du 9ème baromètre Paris Workplace, réalisé en partenariat avec l’IFOP. Cette neuvième édition a sondé 3 700 salariés dans quatre capitales européennes (Paris, Berlin, Londres et Madrid) au sujet de leur rapport au lieu de travail. Si le télétravail structure toujours la vie des salariés, l’attachement au bureau comme lieu de vie sociale se manifeste. Dans quelles proportions ?

Télétravail que vaille

Dans un contexte d’hybridation du travail, les Parisiens se distinguent par leur attachement au bureau. Ils sont, en proportion, les plus nombreux à souhaiter travailler la majorité de leur temps au bureau (62 %). Ils sont, par ailleurs, 38 % à se sentir plus performant à leur poste de travail qu’en distanciel. "À Paris, alors qu’en 2017 ils n’étaient qu’un tiers à estimer les bureaux comme un élément déterminant dans le choix de rejoindre une entreprise, désormais, plus d’un salarié sur deux en fait un élément d’appréciation déterminant", témoigne Dimitri Boulte, directeur général de SFL. Eternels insatisfaits, les Parisiens télétravaillent en moyenne 2,2 jours par semaine alors qu’ils ne souhaitent télétravailler que 2,1. L’architecte Jean Nouvel estime qu’ "à l’avenir, il y aura probablement moins d’heures et de jours travaillés à Paris." Il ajoute : "Ce sera les grandes villes et la campagne, et non pas l’un ou l’autre. Cette évolution a totalement modifié l’idée même du travail tertiaire, avec les inconvénients et les avantages que tout le monde connait. Si on veut être lucide, chez soi personne ne vous embête, en revanche la collaboration réelle disparait." Conséquence directe de la compétition du domicile avec le bureau, les salariés se montrent de plus en plus exigeants vis-à-vis de leur lieu de travail. Pour la majorité, les bureaux constituent un élément important dans le choix de rejoindre une entreprise. Une tendance qui a presque doublé chez les Parisiens.

Le bien-être vivant

Le bien-être au travail progresse dans les capitales européennes, évolution qu’il convient de ne pas complètement décorréler de l’essor du télétravail. En d’autres termes, si le bien-être au travail gonfle, c’est peut-être parce que l’on y va moins. Toujours est-il que sur cette question, Berlin obtient un brillant 7,7/10. Cette appréciation s’est améliorée significativement à Paris depuis 2016, passant de 6,4/10 à 6,9/10. Elle se double d’une hausse de la satisfaction des Parisiens à l’égard de leur équilibre vie personnelle/vie privée, de 68 % en 2016 à 84 % en 2022. Là encore, difficile de ne pas y voir l’influence du télétravail et de la flexibilité qui l’accompagne. Dans les quatre capitales, la vie sociale constitue la première motivation pour venir au bureau. C’est le cas pour 46 % des Parisiens et 49 % des Londoniens. C’est l’impression de faire pleinement partie d’une équipe qui justifie, en second lieu, la venue des salariés au bureau, sauf à Londres où le fait de travailler efficacement prend une place importante. Les formes de socialisation entre collègues fluctuent selon les pays. À Londres comme à Berlin, c’est dans la pratique d’activités extra-professionnelles que les liens se tissent, comme le sport. Les Parisiens se distinguent par leur culture du déjeuner : 67 % d’entre eux déjeunent avec leurs collègues, soit 13 points de plus que les Madrilènes. D’ailleurs, la pause déjeuner française se distingue par sa longueur, culminant à 67 minutes contre 57 à Madrid, 52 à Londres et 47 à Berlin.

Inimaginable avant la crise sanitaire, même en cas de grève des transports, le télétravail a bouleversé le marché du travail et chamboulé notre rapport au bureau. Les exigences des salariés ont cru, redoutablement. Et en situation de guerre des talents, la flexibilité est un levier et le bureau demeure un argument.

Alban Castres

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