Lorsqu’on parle des maux économiques français, l’Allemagne est souvent citée comme l’exemple à suivre. Est-ce toujours justifié ? Comparaison sur cinq points clés, chiffres à l’appui.
1- Marché du travail : Allemagne

Indicateurs : taux de chômage et coût salarial unitaire réel

Le taux de chômage recule en Allemagne depuis le milieu des années 2000 et atteint 5,3 % pour les 20-64 ans en 2013. Sur la même période en France, il n’a jamais été en deçà de la barre des 7 %. L’évolution des taux de chômage entre les deux pays est particulièrement divergente depuis le retournement conjoncturel de 2008-2009.

Entre 2000 et 2007, une différence marquée est apparue dans les coûts salariaux unitaires réels (coût du travail par unité de production), les coûts salariaux unitaires allemands ont fortement baissé tandis qu’ils restaient stables en France. Ainsi, si on prend une base 100 pour les deux pays en 1991, l’Allemagne arrive à 94 en 2013 tandis que la France a maintenu son niveau à 100 la même année.

2- Finances publiques : Allemagne

Indicateurs :
dépense publique primaire et dette/PIB

Les dépenses publiques primaires comprennent les dépenses du gouvernement central, des collectivités locales et des organismes de Sécurité sociale moins les intérêts de la dette. Celles de la France, exprimées en pourcentage du PIB sont relativement élevées mais stables, excepté après la crise qui a conduit à une augmentation importante. L’Allemagne se caractérise par une réduction de son ratio durant les années 2003-2007 et par un rapide retour à son niveau pré-crise dès 2010. En 2013, les dépenses atteignent 55 % du PIB en France, contre 43 % en Allemagne.

Évoluant en parallèle durant la plus grande partie de la période 1990-2013, les ratios de dette publique des deux pays ont commencé à diverger à partir de 2010. En 2013, il atteint 90 % du PIB en France, contre environ 70 % en Allemagne.

3- Démographie : France

Indicateur :
taux de natalité

Alors que le taux de fécondité est stable en Allemagne, autour de 1,4 depuis 1997, il a crû de façon constante en France depuis 1993, passant de 1,7 à 2 en vingt ans (1993-2013). La France, avec un taux de fécondité de deux enfants par femme, est, après l’Irlande, le pays le plus fertile de l’Union européenne. L’Allemagne, où les femmes ont eu en 2012 1,4 enfant en moyenne, est confrontée à un déclin de sa population.
Depuis les années 1970, la population allemande s’est stabilisée autour de 80 millions d’habitants et sa variation (positive ou négative) est essentiellement due à l’évolution du solde migratoire (immigration moins émigration). À mesure que le vieillissement s’accélère, des flux migratoires plus nombreux sont requis pour maintenir le niveau de la population : la courbe d’accroissement naturel de la population (naissances moins décès) est située en dessous de celle du solde migratoire. Ce n’est pas le cas en France où les variations de la population sont davantage liées aux taux de fécondité qui ont connu un fort rebond dans les années 2000. Si les choses restent ainsi, la population française dépassera celle de l’Allemagne en 2050.

4- Inégalités : France

Indicateurs :
taux de pauvreté et coefficient de Gini

À partir de 2000, le taux de pauvreté et les inégalités, mesurées par le coefficient de Gini, ont augmenté en Allemagne. Le taux de pauvreté allemand dépasse désormais celui de la France et les inégalités atteignent des niveaux comparables. Les indices de Gini en France et en Allemagne sont désormais quasiment identiques et se situent autour de 0,3. Le taux de pauvreté (part des individus ayant un revenu inférieur à 60 % du revenu disponible médian) est de 16 % en Allemagne, contre 13 % en France.

5- Innovation : Allemagne

Indicateur :
investissement en R&D/PIB

Au début des années 1990, dans le cadre de la « stratégie de Lisbonne », l’Union européenne s’est fixée pour objectif de consacrer 3 % de son PIB aux activités de recherche et développement (R&D) d’ici à 2010. À cet égard, la performance de l’Allemagne a été nettement meilleure que celle de la France. En pourcentage du PIB, l’effort global de R&D en Allemagne a augmenté de façon presque continue depuis 1994 pour atteindre 2,7 % en 2013, contre 2,2 % en France.

En Allemagne, la tendance haussière est principalement attribuable au secteur privé. Dans ce domaine, la diminution lente observée en France entre 1993 et 2007, qui est pour une grande part liée au processus de désindustrialisation, ne s’est inversée que depuis la réforme du crédit d'impôt recherche en 2008. En pourcentage du PIB, les dépenses totales de R&D réalisées par le secteur du gouvernement et celui de l'enseignement supérieur ont, elles aussi, augmenté en Allemagne sur l’ensemble des deux dernières décennies, alors qu'elles ont diminué en France.

Résultat : Allemagne : 3 – France : 2

Si le modèle économique allemand fonctionne effectivement mieux que son homologue français, les répercussions sociales donnent un avantage à la France en matière d’inégalité et de pauvreté. Dans les prochaines années, le faible taux de natalité risque également de peser sur la croissance allemande. Le moment pour la France de prendre sa revanche ?

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