Vingt-quatre millions d’euros, c’est le montant de la nouvelle levée de fonds réalisée le 13 janvier dernier par la plate-forme de publicité vidéo cofondée par Loïc Soubeyrand. Un refinancement qui en dit long sur les ambitions de cette start-up présentée comme le nouveau Criteo français.
Développement technologique, ouverture de nouveaux bureaux à l’étranger, consolidation des positions à l’international… Pour se donner les moyens de ses ambitions, la start-up Teads - cofondée par Pierre Chappaz, Bertrand Quesada, Loïc Jaurès, Gilles Moncaubeig et Loïc Soubeyrand – a levé vingt-quatre millions d’euros auprès de BPIFrance et de ses investisseurs historiques, les fonds Elaia Partners, Partech Ventures et Gimv. Le financement de cette opération se partage à parts égales entre une augmentation de capital et une ligne de crédit à moyen terme pour « diluer les risques et préserver les actionnaires existants », confirme l’un des fondateurs. Il s’agit de la première levée de fonds d’envergure depuis la fusion en mars dernier de la start-up montpelliéraine et de la société Ebuzzing, créée en 2007 par M. Chappaz, serial entrepreneur et fondateur du champion européen Kelkoo, racheté par Yahoo! pour 475 millions d’euros il y a dix ans.

« Il a mouillé le maillot »
Teads révolutionne les formats de publicité sur Internet. Avec sa technologie outstream – où les vidéos publicitaires sont visibles à l'écran mais non intrusive pour les utilisateurs – la start-up française brigue le fauteuil de leader mondial dans la vidéo en ligne haut de gamme. TF1, Forbes, Reuters, Le Monde, Conde Nast… À l’instar des 500 plus grands sites médias mondiaux, les annonceurs comme les marques de luxe ont aussi été séduites par ces nouveaux format de vidéos publicitaires intégrées directement à du contenu de qualité. Cartier, Nestlé, Samsung ont lancé leurs campagnes internationales via la plate-forme orchestrée par Teads.

De quoi susciter l’appétit des investisseurs. « Il y avait plein de scénarios possibles notamment avec des investisseurs étrangers, confie Loïc Soubeyrand avant d’ajouter on a fait notre choix en notre âme et conscience ». Il faut dire que la BPI a certainement su se montrer très convaincante. Dans la droite ligne de sa stratégie offensive visant à construire des géants français, Nicolas Dufourcq a sorti l’artillerie lourde. « Il a mouillé le maillot. Il a joué un rôle clé », reconnaît Loïc Soubeyrand qui salue l’investissement opérationnel du patron de la BPI. « Il croit à notre projet et la BPI était la mieux placée pour nous accompagner. » Dix millions d’euros ont été mis sur la table pour convaincre les fondateurs de cette pépite de la vidéo en ligne, estampillé « Criteo bis » par les experts de la tech.

« On est face à un problème de culture du leadership »
La start-up a en effet toutes les cartes en main pour devenir un géant du secteur. Une croissance exceptionnelle de 65 % en 2014, un chiffre d’affaires qui passe la barre des cent millions de dollars, un savoir-faire technologique unique, une force de frappe internationale incontestable avec neuf bureaux ouverts dans le monde et des pointures au board comme Pascal Gauthier, ancien COO de Criteo. Avec cette levée de fonds, Teads prévoit de recruter 180 personnes dont une cinquantaine à l’innovation et une quarantaine aux États-Unis où la start-up est déjà installée sur la prestigieuse Cinquième avenue en face du siège du magazine Forbes, l’un de ses clients. De nouvelles antennes devraient voir le jour au Brésil, en Argentine, en Russie, en Corée du Sud et au Japon. De quoi asseoir la présence mondiale de la pépite française et construire un avenir à la Uber ou à la Airbnb.

À ceci près que la France ne sait pas encore façonner des champions mondiaux de ce calibre. « On est face à un problème de culture du leadership », déplore Loïc Soubeyrand, qui pointe du doigt les lacunes du dispositif financier français. « Le maillage des structures comme les pépinières qui accompagnent les start-up est extrêmement dense mais cela ne suffit pas à faire naître des leaders sur la scène internationale », constate le CSO de Teads. Pourtant, ces derniers mois, « la culture française du risque amorce un vrai virage », note-t-il en citant Sigfox, Blablacar et Deezer qui ont atteint voire dépassé le cap des cent millions de dollars.
Alors, qui dit champion mondial dit nécessairement force de frappe financière ? « Quand Uber boucle une levée de fonds dépassant le milliard de dollars sans être cotée en Bourse, c’est très impressionnant », avoue admiratif Loïc Soubeyrand qui n’a désormais plus aucun doute sur le rôle clé joué par le capital-investissement dans la construction d’un géant mondial.

Émilie Vidaud

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