Entretien avec Marwan Lahoud, directeur général délégué à la stratégie et à l'international d’Airbus Group.  
Décideurs. C’est la naissance d’une nouvelle identité en pleine tourmente de la restructuration…
Marwan Lahoud. L’année dernière on parlait d’EADS 2.0, cette année c’est une nouvelle étape dans la vie du groupe. Le changement de nom n’est rien d’autre qu’une décision qui va dans le sens d’une plus grande intégration. Quand vous avez 150 000 salariés qui ont tous le nom Airbus sur leur carte de visite, c’est un signe d’appartenance fort. Cela ne concerne pas uniquement la direction générale. Vous savez, Tom [Enders], Fabrice [Brégier], Thierry [Baril], Harald [Wilhelm], on est une bande de copains qui travaillons ensemble depuis de nombreuses années. On se connaît très bien. Mais il faut aussi que cette intégration se retrouve dans les couches intermédiaires du management de l’entreprise. Pour cela, il y a un modèle de leadership à impulser. C’est ce que nous faisons.

Décideurs. Comment définiriez-vous ce leadership ?
M. L. Dans les grands groupes la tendance est à la bureaucratisation. Il faut donc introduire toujours plus d’agilité pour mieux lutter contre l’inertie administrative. Dans notre cas de figure, la dimension internationale est essentielle. Nous ne sommes pas attachés à une culture en particulier. Nous avons des racines européennes et nous sommes tenus de respecter nos pays domestiques. Tout cela dans un modèle de leadership où nous devons prendre en considération la détérioration de notre pyramide des âges. En toute logique, il va y avoir du renouvellement dans les équipes. Parmi les priorités de notre modèle de direction figurent également la diversité et la mixité.

« Nous ne sommes pas considérés comme dirigeants au nombre de départs que nous faisons »

Décideurs. Vous avez annoncé l’acquisition de la Salzburg München Bank le 14 février dernier. Quel rôle exact allez-vous donner à cette banque qui prendra prochainement le nom d’Airbus Group Bank ?
M. L. L’objectif de cette acquisition est d’avoir à notre disposition un instrument bancaire qui facilite la gestion de notre trésorerie et optimise nos instruments financiers. Outre la capacité dont nous disposerons désormais pour financer nos propres projets, nous aurons accès à des conditions préférentielles. Par exemple, les taux d’intérêt accordés par la Banque centrale européenne aux banques [bien plus bas que ceux concédés aux industriels]. Pour Airbus Group, c’est une stratégie qui a vocation à optimiser notre trésorerie de façon considérable mais aussi et surtout le financement des ventes, des projets sans parler de la couverture de change.

Décideurs. Qu’allez vous faire des quatre-vingts milliards de dollars de couvertures de change ?
M. L. Pour le moment, ils sont là où ils sont. Nous avons plusieurs contreparties bancaires. Mais l’acquisition de Salzburg München Bank a pour objectif de diversifier le risque au travers de notre propre outil financier.

Décideurs. Un mot sur la rumeur de rachat d’Eutelsat ?
M. L. Il n’en a jamais été question. Eutelsat est un très bon client. Nous n’allons pas commencer à acheter nos clients.

Décideurs. Où en sont les négociations sur la suppression des quelque 5.800 postes ?
M. L. Tout ce qui a été rendu public est public et ce qui ne l’est pas est toujours en train d’être discuté. C’est difficile d’évoquer le sujet alors que nous n’avons pas encore une pleine et entière visibilité. Comme l’expliquait Thierry Baril [DRH Airbus Group], il faut essayer d’ajuster en permanence notre stratégie aux réalités du marché. Nous ne sommes pas considérés comme dirigeants au nombre de départs que nous faisons. Si effectivement nous avons un plan de charges qui explose parce que la défense repart ou les dépenses spatiales redémarrent, il n’y a aucune raison que nous ne révisions pas notre plan de restructuration. Mais ce scénario est peu probable…

Emilie Vidaud

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