À l'occasion de la quatrième conférence annuelle ESG (Environnement, social et gouvernance) de l’Afic, les débats se sont concentrés sur le rôle du secteur privé dans la lutte contre le réchauffement climatique.

En France, 2014 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée depuis 135 ans et le mois de juillet 2015 a également battu des records. Année après année, les conséquences du réchauffement climatique s’amplifient. Une récente étude estime que la probabilité du rôle de l’homme dans ce phénomène est supérieure à 95 %. Les gouvernements semblent enfin prêts à agir comme l’a récemment montré le discours ambitieux de Barack Obama.

 

Cent milliards de dollars par an

 

Organisée du 30 novembre au 11 décembre 2015 au Bourget, la Cop21 fixe un objectif ambitieux : limiter à deux degrés la hausse de la température. « Pour y arriver, la réduction des émissions de gaz à effet de serre devra fortement s’accentuer dans les années à venir », prévient Sylvain Lambert, associé chez PWC. Les soixante États déjà engagés dans des plans de réduction sont en retard par rapport à leurs objectifs fixés il y a cinq ans lors des accords de Copenhague. L’Europe, « la bonne élève », qui promettait de réduire de 40 % ses émissions d’ici à 2030 est à la peine. Lors d’une réunion tenue par les 28 ministres de l’Environnement à Bruxelles le vendredi 18 septembre, l’UE est cependant parvenue à un accord pour parler d’une seule voix, une avancée indéniable pour un alignement nécessaire sur le respect des engagements et pour peser sur les négociations. L’Europe y réaffirme son objectif de 40 % d’ici 2030, affichant la volonté d’une réduction de 50 % d'ici à 2050 par rapport à 1990 et à atteindre la « neutralité » d'ici la fin du siècle. Un suivi quinquennal de la réalité des avancements est par ailleurs prévu. 

Pour l’ensemble des pays, la tâche est énorme. « Au niveau mondial, les émissions devront diminuer de 3,9 % par an pour arriver à cet objectif », précise Sylvain Lambert. Les pays émergents sont  en première ligne tout en disposant de moyens financiers insuffisants. Philippe Delacroix, secrétaire général de la Cop21, estime que « leurs besoins s’élèvent à cent milliards de dollars par an ». S’il y a peu de chance qu’ils obtiennent un tel montant, ce sommet devrait réorienter certaines aides au développement pour faire face à ce défi écologique. Les gouvernements ont bien conscience qu’ils ne pourront pas le relever sans l’appui du secteur privé. Parmi les propositions avancées, la possibilité de créer des fonds publics et privés fait son chemin.

 

En attendant, de plus en plus de pays jouent la carte de la régulation pour mobiliser le secteur privé. C’est le cas de la France qui précise dans l’article 173 de la réglementation sur la loi de transition énergétique le rôle des investisseurs. Ces derniers doivent établir un plan pour réaliser la transition énergétique de leur société et mesurer l’empreinte carbone des actifs détenus. En France, la Caisse des dépôts et Axa sont les plus en avance en la matière. En mai 2015, l’assureur a indiqué qu’il n’investirait plus dans le secteur du carbone tout en injectant trois milliards d’euros dans les énergies renouvelables d’ici à 2020. En plus de ces initiatives, Axa publiera chaque année l’empreinte carbone de ses activités dès 2016.

 

15 % du budget

 

Même pour l’organisation de la Cop21, dont le budget devrait atteindre deux cents millions d’euros, les entreprises ont été mises à contribution. Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, espère que 20 % du budget sera financé par le secteur privé. Pour Philippe Delacroix, « arriver à 15 % serait déjà une bonne chose ». Parmi les sociétés ayant déjà répondu présent, on retrouve notamment Axa, Generali, BNP Paribas, la Caisse des dépôts et consignations, Suez Environnement, EDF, Engie ou encore Air France. En contrepartie, ces sponsors pourront afficher le logo « partenaire officiel Paris 2015 » pendant un an. Une opération communication à bas coût puisque, en tant qu’action de mécénat, 60 % des montants versés par les entreprises seront déductibles des impôts.

 

Au-delà de cet aspect financier, les associations environnementales condamnent l'omniprésence des entreprises au sein des débats. Leur message est clair : ce n’est pas aux pollueurs de s’autoréguler. Autre sujet de discorde, le propre bilan carbone de cet événement. Pas moins de 40 000 personnes sont attendues aux Bourget, sans compter les 3 000 journalistes. Le premier jour, jusqu’à 80 chefs d’État pourraient être amenés à faire le déplacement. Les investisseurs privés joueront-ils le jeu jusqu’au bout en mesurant l’empreinte carbone ?

 

V. P.

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