Alors que l’économie française tourne au ralenti, le faible coût de la dette et des valorisations peu élevées font des acquisitions un relais de croissance attractif. Les entreprises françaises ne profitent pourtant pas de l’opportunité.

Avec un montant de 92?milliards de dollars, en baisse de 41?% sur un an, les fusions-acquisitions impliquant une partie tricolore connaissent un franc revers. Une chute qui s’explique par une croissance anémique et une instabilité fiscale et sociale. Résultat, parmi les deals annoncés, nombreux sont ceux à ne pas voir le jour. Au niveau mondial pourtant, les rachats se multiplient?: sur les huit premiers mois de l’année, ils atteignaient 2?900?milliards de dollars, soit 3?% de moins que le record de 2007.

 

Créer de la valeur

 

Les entreprises françaises pourraient regretter ce décalage car les acquisitions restent un relais de croissance rapide. D’autant plus qu’avec un financement avantageux et des valorisations faibles, l’époque est propice. Réaliser une acquisition permet de se diversifier rapidement. Pour se repositionner sur l’énergie renouvelable, Engie a déboursé deux cents millions d’euros pour Solairedirect. Quant à la société Alain Afflelou, elle s’est offert Optical Discount pour se renforcer dans le low cost. «?Nous voulions spécialiser nos enseignes afin de clarifier notre stratégie marketing, explique Frédéric Poux, président du directoire. Pour s’internationaliser, JC Decaux a finalisé l’acquisition de Cemusa pour 80?millions d’euros, ce qui permettra au groupe «?d’étendre ses positions dans des villes telles que Madrid ou Gênes, et dans 41 aéroports espagnols, selon son directeur général finance, Davig Bourg.

 

Autre intérêt des fusions, atteindre une taille critique. C’est le cas de Drivy, le loueur de voitures entre particuliers, qui a réalisé trois acquisitions en 2015 pour améliorer son réseau. «?En 2010, nous comptions mille usagers pour environ 200 voitures à louer. Aujourd’hui nous avons plus de 800?000 utilisateurs et 30?000 véhicules enregistrés, précise Paulin Dementhon, le président. Des secteurs plus matures tel que l’immobilier suivent cette tendance. L’hôtelier Maranatha a ainsi doublé de taille grâce au rachat des Hôtels du Roy, atteignant les cent millions d’euros de chiffre d’affaires.

 

Transformer l’essai

 

Mais pour tirer profit de l’acquisition, encore faut-il convertir les synergies annoncées. «?Difficile de dire qu’une acquisition est une réussite avant deux ans. En revanche, vous savez très rapidement si c’est un échec, estime Alain Thibault, P-DG de Julhiet Sterwen, société de conseil en management. Certaines sociétés n’hésitent pas à mettre des équipes en interne. «?Nous avons recruté deux personnes. Cela nous permet d’être réactifs lorsqu’il y a des appels d’offres mais aussi proactifs en réalisant un travail de veille permanent, témoigne Philippe Salle, P-DG d’Elior. Atos a, pour sa part, une technique bien rodée?: «?Nous accordons une grande importance à la phase d’intégration, par des travaux de suivi régulier effectués par les mêmes équipes que celles de la négociation. Tout cela s’effectue dans le cadre d’une méthodologie d’intégration, détaille Michel-Alain Proch, directeur général adjoint.

 

Olivier Carvin, P-DG de Maranatha, met en garde contre les transformations superflues?: «?Il est urgent de ne rien changer quand un hôtel fonctionne bien.?» Pour éliminer les doublons, Klépierre a cédé «?800?millions d’euros d’actifs du patrimoine de Corio, en ligne avec notre stratégie de réallocation du capital?», explique le P-DG, Laurent Morel. Avec vingt-deux milliards d’euros d’actifs, la foncière est le concurrent direct d’Unibail-Rodamco. Un exemple que les groupes français devraient s’empresser de suivre avant que le marché de la dette ne se contracte.

 

S. S. S.

 

Le point de vue de Jean-Pierre Clamadieu, P-DG, Solvay.

 

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