Le moteur de recherche a annoncé lundi 7 mars le lancement d’un « déréférencement mondial » conforme aux exigences de la Cnil… ou presque. Depuis la consécration du droit à l’oubli numérique par la CJUE en 2014, le régulateur luttait pour que Google l’applique, jusqu’ici sans effet.

C’est peut-être la fin du jeu du chat et de la souris auquel se livrent Google et la Cnil depuis près de deux ans. Le moteur de recherche accepte d’étendre le déréférencement à toutes les versions de son service, mais pour les personnes localisées en Europe uniquement.

Désormais ce n’est plus l’extension sur laquelle l’internaute réalise la recherche qui importe - google.fr, google.uk, etc. - mais son adresse IP. Concrètement une personne qui, depuis la France, chercherait des informations déréférencées par Google ne les verrait pas s’afficher, mais s’il procède depuis les États-Unis, tous les résultats seront visibles car pour le site, l’arrêt de la CJUE s’applique exclusivement aux internautes européens.

 

 

Un motif légitime

 

Depuis cette décision, un citoyen européen peut demander à un moteur de recherche de supprimer des résultats de recherche associés à son nom quand ceux-ci portent atteinte à sa vie privée. Autrement dit, il faut un motif légitime pour voir ces informations disparaître de Google (informations erronées, obsolètes, etc.). Mais en pratique, même avec cette motivation, l’internaute aura toutes les peines du monde pour arriver à ses fins, tant la firme de Montain View fait preuve d’une inventivité étonnante pour contourner le dispositif. Pour elle, déréférencer un contenu dans le monde entier porte une atteinte grave au droit à l’information des internautes non européens.

 

Pour Google, déréférencer un contenu dans le monde entier porte une atteinte grave au droit à l’information des internautes non européens.

 

Nouvelle parade

 

Depuis le lancement de sa « procédure de demande officielle » en mai 2014, Google a déjà reçu près de 400 000 demandes de suppression d’URL, dont 85 000 pour la France. Or, il les rejette dans presque 70 % des cas, ce qui irrite la Cnil, qui souhaite également un déréférencement mondial.  

Google, qui de son côté estime qu’aucun État ne doit pouvoir « contrôler les contenus auxquels une personne peut accéder depuis un autre pays », semble avoir trouvé une nouvelle parade pour cantonner le droit à l’oubli numérique au Vieux Continent : la géolocalisation. 

Seulement, un tribunal japonais vient pour la première fois de se fonder sur ce mécanisme pour obliger Google à supprimer de ses résultats de recherche des données relatives au passé judiciaire d’une personne. Google s’y oppose et interjette appel. De même en juin 2015, la Cnil française l’a mis en demeure de procéder à un déréférencement mondial, contre lequel le moteur a formé un recours gracieux, finalement rejeté par le régulateur.

 

Des coûts importants

 

S’il refuse de se soumettre à l’autorité de régulation, le site risque une amende pouvant aller jusqu’à 150 000 euros. Mais plus que les sanctions financières, ce que craint réellement l’entreprise ce sont les retombées médiatiques, qui ne manqueront pas d’entacher son image. Google a donc fait un pas vers la Cnil, en proposant une nouvelle approche, censée concilier respect du droit communautaire et liberté d’information des citoyens non européens. 

 

Reste à savoir si cet effort suffira à contenter la Cnil.  


Hania Aït-Taleb 

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