« Mister Innovation Worldwide » dans l'âme et directeur général adjoint d'Altran dans la profession, Pascal Brier se livre sur les technologies breakthrough à venir, et l'intérêt pour les jeunes entreprises de nouer des partenariats avec des experts de la R&D.

Décideurs. Altran est l’un des leaders mondiaux de l’externalisation de l’ingénierie des entreprises. Comment restez-vous innovants pour vous-même ?

Pascal Brier. En ce moment, l’un de nos principaux développements est celui des World Class Centers (centres mondiaux d’excellence). À terme, nous comptons structurer nos grands pôles de valeur ajoutée. Si le centre mondial d’excellence est situé en France pour l’Internet des objets, il en aura la responsabilité pour toutes les opérations conduites à travers le globe. Arrivés à maturité, ces hubs devraient représenter 15 % de notre activité. Par ailleurs, nous sommes ouverts à des opérations de croissance externe : lorsqu’une entreprise correspond à notre stratégie, peu importe sa taille, nous cherchons à l’acquérir. Ce fut le cas récemment avec Tessella, l'expert britannique de la data science. De nouvelles acquisitions pourraient intervenir dans les prochains mois.

 

Décideurs. Certains domaines sont plus forts en valeur ajoutée que d’autres. Quelles sont alors les plus grandes « disruptions » technologiques en cours tous secteurs confondus ?

P. B. Nos métiers de haute technologie fonctionnent par vagues qui apparaissent, murissent puis périclitent. C’est la difficulté de l’innovation : l’expertise devient vite obsolète. Chez Altran, nous devons identifier les sujets d’ingénierie de demain et nous positionner en avance sur leur exploitation. Nous sommes aujourd’hui à un moment historique où il n’y a jamais eu autant de « disruptions » technologiques. Uber et consorts ne sont que la partie émergée d’un iceberg colossal ! Prenez l’industrie automobile. Elle est confrontée à des problématiques de croissance qui ne font pas partie de son cœur originel de connaissances : la voiture autonome, le moteur électrique et l’appareillage connecté. Pour moi, les plus grands bouleversements seront provoqués par les véhicules autonomes, l’Internet des objets, le big data (ou plus exactement l’analytique complexe), l’innovation en matière de santé, et pour finir, l’industrie 4.0 (l’usine du futur).  

 

Décideurs. Vous allez accompagner de grandes entreprises dans ces différents projets de transition industrielle. Pourquoi ces groupes requièrent-ils vos services alors qu’ils ont tous, ou presque, un pôle innovation de taille significative ?

P. B. Au niveau mondial, 20 % de la R&D est externalisée. La demande historique de nos clients est de les « aider à développer quelque chose », soit parce qu’ils n’ont pas la flexibilité nécessaire, soit parce qu’ils n’ont pas l’entière compétence. Ensuite vient la problématique du « faites-le pour moi ». Dans ce cas, une entreprise n’a plus forcément envie de continuer à réaliser une activité elle-même et préfère sous-traiter cette tâche. Enfin, et cela devient très intéressant, nos partenaires nous demandent de plus en plus « que devrais-je faire ? ». Par conséquent, un groupe d’électronique en France va vouloir s’appuyer sur notre expérience dans les semi-conducteurs en Inde et les télécoms aux États-Unis pour sonder et définir sa stratégie d’innovation from scratch. Nos missions sont ainsi très variées et vont de la simple exécution d’un projet d’ingénierie à la résolution de problèmes novateurs sur la station spatiale internationale.

 

Décideurs. Au-delà de la variété des missions, travaillez-vous uniquement avec de grands groupes ? Pourrions-nous imaginer des liens plus ténus avec le monde des jeunes entreprises ?

P. B. Environ 400 des 500 premières entreprises mondiales, parmi lesquelles Airbus, notre principal client, sont partenaires d’Altran. 80 % de notre activité se fait avec les grandes entreprises, le reliquat avec des sociétés de plus petite taille. Les start-up devraient travailler avec nous mais elles n’ont pas ce réflexe. Une partie de leurs levées de fonds serait bien investie chez nous puisque nous leur ferions gagner du temps, notamment dans la gestion de projets. Cela est possible grâce à notre analyse de la complexité et des exigences de chaque mission.     

 

@firminsylla

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