Décideurs. Quels ingrédients nécessaires au leadership qui ne sont pas suffisamment mis en lumière ?

Jean-Louis Ferrein. Avoir du leadership aujourd’hui, c’est faire en sorte que la relation individuel/ collectif soit parfaitement maîtrisée car le leader doit être capable de remettre en perspective ses collaborateurs dans un groupe, autour de projets communs. Ainsi, des études démontrent que pour être un bon leader, il faut être capable de parler aux trois cerveaux d’un individu : le cerveau reptilien – faire comprendre ce qui va changer sur son territoire –, le cerveau limbique – rassurer ses troupes et promouvoir le « travailler ensemble » – et enfin le néocortex – quelle stratégie sera menée demain. Bien souvent, c’est la stratégie qui est favorisée au détriment des deux premières réflexions sur le changement et le collectif. Or, un leader mature, qui aura pris du recul sur lui-même, sait combien il est important d’inclure ses collaborateurs dans un projet global et de prévenir de l’impact que ce projet va avoir sur la position de chacun. Il ne faut pas oublier que le leader a des choses à prouver dans son rapport aux autres pour porter sa communication et emmener les gens dans sa vision.

 

Décideurs. Par quels moyens le leader d’un groupe peut-il amener son ambition individuelle à devenir une cause collective ?

J.-L. F. C’est justement ce que nous nous efforçons de démontrer au travers de la méthode de l’intelligence projective. Elle s’exprime au niveau individuel soit par l’action d’un leader sur la collectivité, soit par un salarié doté d’un leadership tel que l’organisation va lui permettre de l’exprimer librement. Dans le prolongement de cette réflexion, il faut aller plus loin que le célèbre triptyque « optimisme, foi, espoir ». En effet, tous les chercheurs s’accordent à dire que le leader est pourvu d’une psychologie positive. Il est convaincu de la façon dont il veut avancer mais doit être également convaincu que tout individu a envie d’avancer avec lui, dans la même direction. Il n’y a pas de futur individuel sans futur collectif et inversement. L’empathie joue un rôle déterminant dans cette démarche, mais un leader n’est pas nécessairement empathique. Prenez le cas de Steve Jobs, ses collaborateurs avaient une forte admiration pour ce personnage qui était particulièrement antipathique et pourtant tous le suivaient et croyaient en ses projets. L’empathie est donc ce petit dénominateur commun qui permet aux gens de se reconnaître dans le projet. Le leader doit être capable de se mettre à leur place. Il est selon moi le garant d’un collectif qui marche dans la durée, qui repose sur une compréhension de la vision stratégique.

 

Décideurs. Dans quelle mesure le courage est une composante du leadership ?

J.-L. F. La notion de territoire est l’un des fondamentaux de la notion de courage. On va pouvoir adopter une attitude courageuse quand il en va du développement du collectif auquel on appartient mais également du territoire que l’on a à défendre. Le courage n’est pas inné mais bien cognitif dans la mesure où il dépend du degré de réflexion et du degré de motivation d’un individu. Pour le leader de demain il ne suffit pas de lui apprendre à manier des outils, il faut aussi travailler sur l’état d’esprit, la maturité psychologique. Les États-Unis en particulier ont compris qu’il faut travailler en amont sur le pourquoi apprendre. Il faut donner du sens à ses actions. Les individus réclament une reconnaissance de leur intelligence projective.

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