Le secteur de la tech française est en pleine ébullition. Le spécialiste des solutions connectées, Sigfox, vient de conclure le plus impressionnant tour de table de l’année, à hauteur de 150 millions d’euros. Quel est le secret de cette start-up toulousaine qui fait le bonheur des investisseurs ? Réponse avec son fondateur, Ludovic Le Moan.

Décideurs. Sur votre site internet vous indiquez vouloir « donner vie au monde physique qui nous entoure ». Pouvez-vous nous en dire plus sur les activités de Sigfox ?

Ludovic Le Moan. Sigfox est le premier fournisseur d’une solution de connectivité mondiale dédiée à l’Internet des objets (IoT). En seulement cinq ans, nous avons construit un réseau international capable de connecter des milliards d’objets à Internet, de manière très simple, tout en réduisant leur consommation d’énergie et les coûts. Le réseau Sigfox est aujourd’hui présent dans 28 pays, couvrant ainsi 451 millions de personnes. Avec des millions d’objets enregistrés sur son réseau et un écosystème de partenaires grandissant, Sigfox permet aux entreprises de déployer des solutions IoT à grande échelle et d’accélérer la transformation de leurs modèles économiques vers plus de services.

 

Concrètement, qu'est-ce qu'un réseau bas débit ? Quelles retombées concrètes pour les entreprises ou particuliers qui souhaiteraient s'y connecter ?

Le réseau Sigfox est bas débit dans le sens où il véhicule des messages courts, contrairement aux offres haut débit existantes (2G, 3G, Wi-Fi). C'est cette particularité qui permet une basse consommation. Ce qui est clé pour permettre aux applications IoT de se déployer à l’échelle industrielle. Aujourd'hui, plusieurs sources d'énergie, notamment solaire, éolienne et électromagnétique, sont disponibles dans le monde physique pour capter l'énergie. La technologie de Sigfox permet déjà de la collecter pour alimenter les objets. C’est le cas du traqueur GPS solaire à cellules photovoltaïques qui offre une puissance et une connectivité illimitées. Développé par notre partenaire Hidnseek, il permet de déclencher des alertes générales de géolocalisation et de mouvement en temps réel. La simplicité de la technologie Sigfox permet également de réduire drastiquement le coût et la complexité des composants requis pour connecter les objets. Aujourd'hui, un module de carte SIM pour l’industrie mobile revient à quarante dollars ; nos partenaires semi-conducteurs ont récemment annoncé les premiers modules compatibles Sigfox à partir de deux dollars. Ceci va permettre à tous les fabricants d’objets connectés d’accélérer le processus de conception de leurs objets et de réduire considérablement leur prix.

 

Vous venez de lever 150 millions d'euros. Dans quels domaines va être investi cet argent ?

Cette levée de fonds de 150 millions a été réalisée grâce au soutien d’investisseurs historiques et nouveaux tels que Total, Salesforce Ventures, Alto Invest ou encore Air Liquide. Ce nouveau tour de financement va permettre à Sigfox d’accélérer l’expansion de son réseau international et atteindre une couverture mondiale. Depuis novembre, nous avons annoncé le déploiement de notre réseau dans quatre nouveaux pays : le Japon, l’Afrique du Sud, l’Estonie et la Slovaquie. Cette levée de fonds va également permettre à Sigfox d’atteindre l’équilibre financier.

« D’ici 2025, les experts estiment à plus de 25 milliards le nombre d’objets qui seront connectés à Internet »

 

Souhaitez-vous à terme faire une entrée en Bourse ?

Nous n’avons pas encore confirmé de date, notre priorité étant l’accélération de notre développement international afin de couvrir soixante pays d’ici 2018 et de construire un réseau de partenaires forts pour accélérer le développement de l’IoT à l’échelle mondiale.

 

Voyez-vous émerger des concurrents sérieux dans les réseaux télécoms à bas débit ?

D’ici 2025, les experts estiment à plus de 25 milliards le nombre d’objets qui seront connectés à Internet. Nous voyons un dynamisme incroyable autour de l’IoT avec la présence et l’arrivée d’acteurs innovants. Sigfox propose une solution de connectivité complémentaire aux réseaux de télécommunications classiques, que nous ne voyons donc pas comme des concurrents à proprement parler. Nous avons d’ailleurs annoncé un partenariat avec SFR en mars 2016 qui a choisi d’intégrer la connectivité Sigfox à son offre globale. Des opérateurs tels que NTT Docomo, SK Telecom ou encore Telefonica figurent également parmi nos investisseurs. Par ailleurs, le fait de proposer une offre de service mondiale qui permet à nos clients de bénéficier d’un contrat unique et d’un engagement de qualité homogène sur l’ensemble du réseau n’est pas comparable avec celle d’acteurs actuellement présents sur le marché.

 

Qu'a représenté pour vous la visite du président de la République dans vos locaux et qu'en est-il ressorti ? 

Nous étions évidemment ravis de l’accueillir à Labège, près de Toulouse, surtout au lendemain de l’annonce de notre levée de fonds record. Nous avons parlé du dynamisme de l’IoT, que nous devons amplifier. Chaque acteur de l’IoT doit porter l’ambition de bouger les lignes, c’est ce qui nous anime chez Sigfox au quotidien. Nous arrivons à fédérer des start-up et des grands groupes autour de nos projets et la visite du Président nous a permis d'amener un peu de lumière et de visibilité sur les entreprises et les entrepreneurs de l’IoT Valley qui en ont besoin. L’ouverture des portes de Sigfox, couplée à notre levée de fonds de 150 millions, sont bénéfiques pour tout l’écosystème local, ce que le Président n’a pas manqué de rappeler : l’innovation est partout, pas seulement à Paris ou dans les grandes capitales européennes et internationales.

 

Propos recueillis par Marion Robert

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