Entre l'information donnée aux curieux, la fidélisation des volages voire la retenue des fugitifs : les promesses d'une relation client saine et sophistiquée abondent. Les nouvelles technologies, chatbots en tête, offrent de nouvelles perspectives aux marques dans l'optique d'un service plus personnalisé à leur clientèle. État des lieux d'un bouleversement inachevé.

Mot-valise des temps modernes, le « chatbot » s’est imposé en 2016 comme un virage technologique et un ouragan médiatique. Contraction du chat anglo-saxon (à traduire par causerie) et de robot, ce programme de messagerie interactionnel fondé sur des algorithmes de reconnaissance textuelle a suscité le plus vif intérêt parmi les spécialistes de l’innovation et du marketing. Les marques se sont elles aussi appropriées le sujet, présenté comme le futur des applications mobiles. Selon le cabinet Orbis Research, cité par Frenchweb, ce marché novateur devrait connaître une croissance annuelle de 37 %, et ce jusqu’en 2021.

 

Une technologie aux nombreux avantages...

 

Proches des assistants personnels comme Siri ou S-Voice, les chatbots simulent des conversations naturelles avec des clients à la recherche d’informations sur les services proposés par une marque ou une plate-forme. À partir de certains mots clés repérés dans les messages reçus, le chatbot fouille dans ses bases de données de questions-réponses préenregistrées les éléments les plus pertinents à rétorquer. Toujours courtois et fiables, ces programmes sont disponibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept à un coût réduit par rapport aux plateaux traditionnels de relation client. Autre caractéristique majeure de cette technologie à la réactivité instantanée, l’ubiquité qui supprime de fait les longues minutes d’attente en situation de stress ou l’inconfort des clients à la recherche d’une expérience sans accroc. Au-delà des conseils relayés sous une forme distrayante, ces programmes peuvent aussi se muer en agents commerciaux dématérialisés, orientant leurs interlocuteurs vers les produits les plus adaptés à leurs envies.

 

994,5 millions de dollars : ce sera la valeur du marché des chatbots en 2024 selon TMR Analysis (contre 113 millions de dollars en 2015)

 

Messenger, Slack, WeChat ou LinkedIn : les plates-formes de messagerie les plus populaires se sont largement ouvertes aux développeurs pour devenir le canal privilégié de ces nouvelles formes d’échanges entre consommateurs et sociétés. Certains géants comme Facebook ou Microsoft ont raté l’opportunité des magasins d’applications en ligne et misent gros sur ces technologies en proposant des plates-formes de créations de chatbot ouvertes à tous. Avec la diminution du nombre de téléchargements d’applications, il y a fort à parier que les messageries déjà installées sur de nombreux terminaux pourraient ajouter une couche supplémentaire de services aux marques. En parallèle, le niveau de sophistication de ces programmes interactifs n’a cessé de progresser afin de toujours mieux coller aux contextes particuliers et d’offrir des services plus nombreux et plus précis : réserver un restaurant, organiser un voyage, faire livrer des fleurs…

 

Autre exemple, la solution spécialisée iAdvize a travaillé sur des chatbots pour des marques de vêtements proposant des conseils mode et des looks disponibles en un clic selon les préférences de l’internaute. Tous les univers sont concernés dès lors qu’un échange entre un utilisateur et un conseiller peut créer une satisfaction supplémentaire chez le premier. Citons pêle-mêle les secteurs de la restauration, des nouvelles technologies, des médias, de l’assurance, de la banque ou encore du tourisme qui se sont déjà penchés sur cet outil. Selon le cabinet Gartner, 40 % des interactions mobiles seront prises en charge par des bots d’ici à 2020.

 

...mais devant être maniée avec précaution

 

Malgré ces évolutions à moyen-terme, les critiques pointent du doigt un effet de mode et une technologie faussement révolutionnaire, existant depuis 1966 et le lancement du projet Eliza. Derrière la « hype » passagère, les gains ne seraient pas aussi décisifs qu’annoncés et si les sociétés se précipitent bille en tête pour proposer leur chatbot maison, c’est bien plus par crainte de paraître déconnectées des nouvelles tendances que dans l’optique d’obtenir des bénéfices réels.

 

Les analystes de CB Insights affirmaient le 6 mars 2017 que les recherches sur Internet concernant les chatbots avait explosé en 2016 pour atteindre leur point culminant en octobre. Depuis, le niveau de curiosité se stabilise et connaît même une légère décrue. Les investissements nécessaires à ces agents conversationnels doivent être déployés dans le cloud, dans les systèmes d’information et dans les algorithmes d’intelligence artificielle. Bien que coûteuse, l’expérience proposée n’est pas toujours irréprochable. Le manque de pertinence, l’absence de profondeur des échanges ou le renvoi rapide vers un numéro de téléphone classique peut générer une frustration de l’utilisateur et dégrader l’image de la marque. Malgré les aspirations des sociétés, le mythe d’une relation client parfaitement automatisée ne se réalisera pas demain. L’appréciation des caractéristiques d’une situation singulière demeure l’apanage des conseillers en chair et en os et l’évolution des algorithmes n’offre toujours pas un niveau de réflexion capable de simuler une conversation authentique.

 

Toutefois, cette technologie laisse entrevoir un e-commerce plus simple et chaleureux. Avec une forte marge d’amélioration, notamment grâce à l’apprentissage indépendant des machines au fil de leurs échanges, et la multiplication des investissements leur assurant un progrès technique constant, l’avenir des chatbots pourrait être celui des marques digitales.

 

Thomas Bastin
@ThomasBastin

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