Jean-Baptiste Danet, président de Croissance Plus et coprésident de l’entreprise de communication et de stratégie de marque Ipanema, voit dans l’entreprise libérée une évidence et dans le leadership qui s’y pratique un art de plus en plus complexe et déconnecté des anciennes notions de statut et d’autorité. Éclairant.

Décideurs. Qu’est-ce qui caractérise une entreprise libérée ?

Jean-Baptiste Danet. Une chose est certaine, ce ne sont ni l’open space ni le baby-foot qui font l’entreprise libérée, mais le fait de laisser les talents s’exprimer pleinement hors cadres figés. Cela implique une organisation reposant à la fois sur des valeurs communes et sur des libertés individuelles ; une organisation agile, capable d’anticiper les changements perpétuels du monde extérieur, de s’y adapter, voire de les anticiper en favorisant l’ouverture de chacun sur le monde. Et bien sûr, cela implique une nouvelle façon d’envisager les relations hiérarchiques, en accord avec les évolutions de la société, et notamment avec le fait que les nouvelles générations voient l’entreprise comme un lieu d’épanouissement, pas comme une entité confiscatoire de libertés !

 

Quels avantages l’entreprise tire-t-elle de cette nouvelle forme d’organisation et à quels risques celle-ci l’expose-t-elle ?

Les avantages sont multiples. Non seulement ce type de fonctionnement et d’organisation permet de fidéliser les talents et de les faire fructifier, mais il contribue à la réputation de l’entreprise, à ce qui fait la valeur de sa marque employeur. Autrement dit, cela permet de donner envie – aux collaborateurs en place d’y rester, aux talents extérieurs d’y entrer – en créant une fierté d’appartenance. Mieux, un désir d’appartenance, ce qui est fondamental : avoir envie de travailler tire vers le haut, crée une émulation et une motivation. Avoir besoin de le faire tire vers le bas, puisque cela relève d’une obligation et donc s’apparente à une contrainte.

 

Comment s’organise le pouvoir dans ce type d’entreprises décloisonnées et « déhiérarchisées » ?

L’entreprise libérée s’organise autour de l’idée non plus de pouvoir mais de savoir : les notions de statut et de hiérarchie n’y ayant plus le même poids, toute forme d’autorité tire sa légitimité du savoir, des compétences techniques et des qualités humaines essentielles comme la compréhension et l’écoute. Le management intermédiaire est plus dans la coconstruction, le partage et l’échange que dans le dirigisme, son rôle consistant surtout aujourd’hui à s’assurer que chacun a sa place dans un projet commun. Dans une entreprise libérée, la hiérarchie est là pour libérer les talents tout en veillant à ce que ceux-ci s’expriment dans un cadre donné et conformément à des valeurs communes, ce qui est très différent de ce qu’était sa mission par le passé.

 

Le leadership peut-il s’exercer hors d’une structure hiérarchisée ?

Tout à fait, puisque le leadership est une attitude ; un exercice de « savoir-être » assorti d’une capacité à faire évoluer et fructifier les talents et les personnalités ensemble ; ce qui, encore une fois, ne relève plus du pouvoir décrété et statutaire.

 

Quelles sont les qualités essentielles d’un leader dans une entreprise libérée ? En quoi diffèrent-elles de celles requises dans une organisation classique ?

être leader n’a jamais été aussi complexe que ça l’est aujourd’hui. C’est devenu une fonction qui ne s’exerce plus par le titre mais par la légitimité que confèrent des aptitudes comme la capacité d’écoute, l’empathie et, encore une fois, l’aptitude à mettre en collaboration des talents. Cela requiert une très grande intégrité et beaucoup de savoir-faire. D’autant que, dans une entreprise libérée, cela s’exerce hors prérogatives et territoires traditionnels d’autorité.

 

Propos recueillis par Caroline Castets

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