Focalisées sur leur taille, les licornes ne doivent pas pour autant oublier de soigner leur rentabilité. Dans cette optique, le déploiement d’un modèle économique « scalable » reste la priorité. Au risque de décourager les futurs investisseurs.

Deux milliards de dollars en 2015, 2,8 milliards en 2016 et autant anticipés cette année. Depuis sa création, Uber accumule les pertes financières. Cela ne l’empêche pas d’être, avec une valorisation de soixante-dix milliards d’euros, la plus importante des licornes. Car les investisseurs s’intéressent surtout à son potentiel de croissance. Et il est énorme. En 2016, son chiffre d’affaires a doublé pour atteindre vingt milliards de dollars. Cette année, malgré les nombreux scandales, il devrait même franchir la barre des trente milliards de dollars.

Le syndrome Twitter

Si cette course à la taille plutôt qu’à la rentabilité peut dérouter, elle s’explique en grande partie par la stratégie mise en place par les fonds. En promettant un retour sur investissement d’au moins quatre fois la mise initiale sur dix ans à leur limited partners, ils voient obligés de prendre des risques. En effet,  comme 50 % des start-up soutenus par des fonds font faillite, ceux-ci doivent dénicher celle qui sera capable de leur fournir un retour d’au moins quinze fois la mise pour compenser. Résultat, l’argent est mal réparti et certaines sociétés qui avaient un business model rentable mais un potentiel de croissance plus faible n’arrivent plus à lever les sommes nécessaires. À tel point que certains investisseurs ont choisi de miser sur une autre catégorie de start-up : les zèbres. Contrairement aux licornes, ces sociétés qui dégagent des bénéfices bien réels mais leur valorisation est limitée à 500 millions de dollars.

Si les licornes disposent donc de temps pour atteindre la rentabilité, la question du business model demeure bien sûr centrale. Dans ce domaine, le mot d’ordre est l’ambition. Pour cela, elles doivent être capables d’élaborer un modèle économique « scalable », c’est-à-dire qui puisse répondre à une forte augmentation de son volume d'activité. Autrement dit, plus l’activité se développe, plus la rentabilité est importante. Très souvent, l’évolution se fait de manière non linéaire et il faut atteindre un niveau palier pour dégager des bénéfices. Cette nécessité de construire très en amont un système ne doit cependant pas empêcher la start-up  de rester souple. Même les sociétés les plus rentables ont changé deux ou trois fois de modèle économique. C’est par exemple le cas de Facebook outre-Atlantique ou de Criteo en France.

Pour une licorne, le risque est de tomber dans le syndrome Twitter. Malgré une croissance soutenue depuis sa création, le réseau social n’a toujours pas réussi à rentabiliser son audience. Des performances économiques médiocres qui se manifestent désormais sur sa valorisation. Atteignant quarante milliards de dollars lors de son introduction en Bourse, le groupe américain ne pèse plus « que » treize milliards. Pour inverser cette tendance, Twitter tente de parier sur l’abonnement en proposant aux entreprises souhaitant gagner en visibilité un forfait de 99 dollars par mois.

Vincent Paes

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